| par Invité Jeu 12 Fév - 15:59
| Je restais allongée sur le sol, encore sonnée. Je me pris la tête à deux mains: une migraine lancinante commençait à me battre les tempes. Ce n'était pas ce genre de douleur, fulgurante et irréductible, mais plutôt un mal discret et sournois qui vous a à l'usure. J'avais bien l'impression que dans deux heures, je n'en pourrais plus. La douleur irait croissant, jusqu'à ce que je sois incapable de ne plus penser à rien d'autre qu'à ce mal. Et ce n'était vraiment pas le moment de ne plus être en mesure de réfléchir: j'étais coincée dans une cellule de pierre humide avec une femme oiseau complètement barrée, qui me voulait je ne savais quoi et qui, de toute évidence, n'avait pas l'intention de me laisser m'en aller. Le poison auquel j'avais été soumise m'avait complètement assommée, me laissant un goût amer dans la bouche et une nausée persistante. J'étais apparemment une prisonnière et si les Rebelles étaient bien derrière tout ça, j'allais sans doute subir un interrogatoire musclé, où cette folle allait essayer de m'extirper tous les renseignements possibles sur qui j'étais, ce que je faisais, pour qui je travaillais, et que sais-je encore... Si je ne collaborais pas, je me doutais bien que ma gardienne n'hésiterait pas une seconde avant d'user de la force sans vergogne jusqu'à ce que je me décide à parler. Alors oui, j'allais parler. Mais il n'était pas question qu'un seul mot vrai sorte de ma bouche. Il était hors de question que je file toutes mes infos à ces malades et que je leur permette de détruire le Cercle. Je n'étais pas disposée à les laisser régner sur l'Avventura, faire couler le sang et les larmes impunément dans ma ville. Je m'étais battue pour intégrer les autorités de la ville afin de la protéger, de permettre que la paix s'installe et que les plus faibles se sentent en sécurité. Non, je n'aiderais pas ces monstres à détruire cet endroit, à en faire des cendres une fois de plus.
J'essayais de me relever lentement afin d'essayer de m'éloigner de ma geôlière, pour venir m'appuyer aussitôt contre un mur de pierre glacé, prise d'un violent vertige. Combien de temps le gaz continuerait-il à agir encore...? Dix minutes, vingt minutes, deux heures...? J'avais d'ailleurs perdu toute notion du temps dans cet infâme cachot où la lumière était presque totalement bannie. Il faisait sombre là-dedans, ça sentait le renfermé et j'avais de plus en plus envie de vomir. Cela-dit, je me doutais bien qu'on ne me donnerait rien pour soulager mes maux, l'occasion était trop belle de m'affaiblir pour me faire lâcher encore plus vite ce qui les intéressait. Je ne comptais pas les aider ni leur demander quoi que ce soit. Je ne voulais pas coopérer avec eux, alors faire preuve de lâcheté et leur quémander de quoi soulager cette espiègle douleur ? Et puis quoi encore ! J'allais faire preuve de force et tenir malgré mon état, pour protéger mes secrets jusqu'au bout. J'avais tenté de m'éloigner de cette folle, mais elle regagna bien vite du terrain: elle s'agenouilla de nouveau à côté de moi, avant de se décider à répondre à mes questions. Enfin.. Si on pouvait appeler ça des réponses:
-Autour de la ville..? C'est bien vague ça, comme réponse...
Je me doutais bien que je n'obtiendrais pas le lieu exact. Il serait trop facile de m'évader de ma prison si je savais où je me trouvais. Il était donc évident que je n'apprendrais ce renseignement que par une fortuite coïncidence. De toute façon, je n'entendais pas de bruit aux alentours. De toute évidence, on m'avait isolée et il n'y avait pas âme qui vive dans le coin à part ma tortionnaire et moi-même. Visiblement, mon audace surprenait l'hybride. Il semblerait que les bourreaux Rebelles n'aient pas l'habitude que leurs prisonniers leur posent autant de questions et se montrent aussi bravaches. C'était amusant d'ailleurs, de voir qu'il était quand même possible de les surprendre. Comme si ces idiots avaient déjà tout vu... Poser quelques questions...? Comme si elle allait se contenter de me les poser en restant tranquillement là à me regarder. J'avais renoncé depuis longtemps à penser que quelques Rebelles avaient encore une âme et un peu de compassion. C'étaient deux mots qui avaient disparu de leur vocabulaire, qui leur étaient inconnus. La seule chose qui leur parlait encore, c'était la violence. Arracher des aveux à grands coups de tortures plus barbares les unes que les autres afin d'obtenir ce qui les intéressait. Je soupirais, un sourire mi-méprisant, mi-exaspéré sur les lèvres. Elle croyait vraiment que j'allais avaler ça...? Apparemment, elle me sous-estimait. Et j'avais horreur de ça. Cependant, ça me laissait un avantage crucial sur elle. Si elle pensait que j'étais une petite fille sans défense et terrifiée, elle ne se poserait même pas la question de savoir si je mentais ou pas, tellement il semblerait évident que je disais la vérité. C'était tordu comme plan, mais avec des cinglés comme ces gens-là, il n'y avait que ça qui marchait. C'était triste, mais c'était la vérité. Je n'aimais pas mentir ou tromper, duper les gens n'était pas mon passe-temps favori, et pourtant, entre les griffes de ces tyrans auto-proclamés, c'était ma seule chance de survivre tout en évitant de me faire immanquablement malmener.
-Tu ferais mieux de garder tes surnoms pour toi. Je ne suis pas ta " petite oiselle", c'est compris ? D'ailleurs, qui te dit que je les ai les informations qui t'intéressent ? Rien ne te dit que tes petits copains ne se sont pas lourdement trompés en m'emmenant moi ici. Alors pose-les moi tes questions, mais je ne pourrai pas te répondre.
C'était là une simple bravade, lancée à la face de cette hybride malveillante qui œuvrait pour des inconscients dont le seul but était de semer le chaos. Et puis, qui savait ? Elle avait peut-être même été embrigadée de force ! Avec des monstres imprévisibles comme ces Rebelles, on ne pouvait jamais être sûr de rien... Il était possible que cette jeune femme ne sache même pas pour qui elle se battait. Ils avaient déjà prouvé qu'ils n'hésitaient pas à user du poison sur les gens pour les forcer à les suivre, alors comment savoir si ma gardienne était là de son propre gré ? Cela n'avait sûrement pas d'importance, mais je me refusais à condamner une innocente potentielle sans me demander ce qui avait bien pu lui arriver pour qu'elle se retrouve coincée là avec pour ordre d'extraire de ma personne un maximum d'informations. J'étais curieuse de savoir comment ils pouvaient être sûrs que j'étais du Cercle, compte tenu du fait qu'on était d'une extrême vigilance et que nous protégions jalousement nos identités afin d'éviter les prises d'otages dans ce genre. Se pouvait-il qu'ils aient frappé au hasard et choisi des gens sans savoir à l'avance qui ils emmenaient ? C'était peu probable, mais après tout, ça restait de l'ordre du possible... Ou alors, ils avaient infiltré le Cercle dans le but de dévoiler les noms de ses membres...? Si c'était effectivement le cas, tous les représentants courraient un grand risque, tout comme les partisans de plus ou moins haut grade. Si ces psycopathes parvenaient à tuer les membres, tous les membres, qu'adviendrait-il alors de l'ordre que nous tentions d'établir depuis plusieurs années et des progrès auxquels nous étions parvenus...? La perspective que tout notre travail s'effondre et disparaisse me faisait plus froid dans le dos que la pierre humide. Alors qu'elle effleurait ma joue de la main, je la repoussais d'un revers, mes yeux dorés brillant d'une lueur menaçante qui m'était peu coutumière. Mais pour qui cette hybride se prenait-elle ?
-Je m'appelle Andréa Stanley. J'ai 23 ans et je travaille comme informaticienne à domicile. Je donne des cours chez les gens. Et vous ? La moindre des choses pour me retenir ici, ça serait au moins de vous présenter. Je savais pertinemment que si elle se décidait à me répondre, elle me donnerait probablement elle aussi une fausse identité. Mais derrière un faux nom, il y avait toujours quelqu'un de bien réel, généralement quelqu'un du passé de la personne, ou d'un roman.. Bref, mais si elle était truquée, c'était toujours une information quelconque sur la véritable personnalité de quelqu'un. C'est en sachant ça que je m'étais inventé un autre moi, qui n'avait ni lien avec une personne que j'aurais connue. Andréa Stanley n'avait absolument aucune existence dans le monde, elle ne provenait ni d'une oeuvre littéraire, ni de quelque chose d'autre. Elle était inspirée de l'imaginaire seul, ce qui me protégerait pour un moment. Enfin, j'osais l'espérer... Je n'avais aucune idée de la quantité d'informations à laquelle ces timbrés avaient accès. |
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