| par Invité Lun 6 Mar - 4:42
| Sa manière d'éviter les questions était à la fois très amusante et très révélatrice quant aux réponses qui devaient s'y joindre. Et si je ne me trompais pas, les repas qu'elle avait raté n'étaient pas loin de ne plus pouvoir se compter sur les doigts de la main. Jetant un regard discret à la corpulence de la demoiselle, je ne pus que confirmer mon sentiment qu'elle ne mangeait pas toujours à sa faim. Bien sûr, je n'irais pas jusqu'à dire qu'elle avait la peau sur les os, ce n'était pas le cas. Mais elle n'avait pas tellement plus non plus. Pour ma part, manger était quelque chose d'essentiel autant pour mon estomac que pour mon équilibre et celui de mon entourage. Si un homme affamé était irritable, je supposais sans mal que ce n'était pas la peine de vous faire un dessin quant à la condition d'un lycanthrope affamé. Marchant donc de bon pas vers la boulangerie, je continuai ma discussion avec Octavia, abordant le sujet qui avait tant éveillé ma curiosité. Mais je regrettai aussitôt lorsque la mine de la demoiselle se décomposa. Je ne voyais pas ses yeux, ni leur expression, et pourtant à la soudaine tension dans ses épaules et à son ralentissement, je compris qu'elle n'avait vraiment pas souhaité que je l'entende. Et que le sujet la dérangeait plus que je ne l'avais pensé.
Lorsqu'elle répondit cependant, se rendant compte que j'avais en effet perçu son murmure, elle en vint à une conclusion rapide et pour le moins surprenante. Il était vrai qu'un humain ordinaire n'aurait pas pu entendre ce qu'elle avait dit. Mais comment savait-elle que j'avais un "double intérieur" comme elle avait semblé appeler mon loup. Et d'après son intonation, elle semblait avoir remarqué depuis un moment que je n'étais pas humain, ce qui me faisait à nouveau me demander comment était-ce possible. En général, sauf quelques exceptions, les humains n'excellaient en rien dans la reconnaissance des autres races. Lycans, vampires -pour peu qu'il fasse nuit-, élémentaires ou autres, avaient tous une forme humaine qui leur permettait de passer inaperçus au sein de la communauté humaine. C'était ainsi que nous avions pu garder le secret de notre existence caché si longtemps. Bien que certains humains avaient un instinct aiguisé, je n'avais pas eu vent de capacités à pouvoir nous débusquer. Mais d'une certaine manière, même si elle ne semblait pas être certaine, elle avait l'air d'en être capable Octavia. Etait-ce par rapport à cette histoire d'aura ? Je me doutais que c'était la clé à cette question. Mais je redoutais de poser d'autres questions trop poussées, de peur que celles-ci minent le moral de mon interlocutrice à nouveau.
-En effet je suis bien un loup, et c'est bien la première fois que quelqu'un d'autre qu'un loup ou un vampire fasse des estimations aussi précise. Cette double-nature que vous avez senti, c'est bien la présence de mon loup.
Et ce ne fut pas sans surprise que je la vis se tourner vers moi avec un large sourire, alors que deux minutes plus tôt elle semblait bien loin. Elle changeait d'humeur aussi vite que de soutiens -si je pouvais me permettre l'allusion-, et bien que ça la rende vraiment difficile à cerner, cela ne mettait que plus de vie dans la conversation. Mais son sourire et sa soudaine bonne humeur revêtait une lueur plus subtile. De l'intérêt, de la curiosité. Elle me regardait avec une insistance et une intensité qui me convainc qu'elle allait certainement me poser une question dans les secondes qui arrivaient. Et cela n'y manqua pas. Et sa question avait le don de me surprendre, tout comme le reste de sa personnalité. Je ris alors sans retenue, autant à cause de la situation amusante et de la surprise.
Encore une fois, je n'avais jamais eu à répondre à ce genre de questions de la part d'autres entités que des lycans tout comme moi. Mais peut-être que le problème n'était-il pas si différent après tout. Tout comme certains nouveaux -ou pas- loups qui ne contrôlaient pas leur partie animale, elle ne semblait pas avoir de contrôle sur son don. Et c'était très certainement la raison pour laquelle elle me posait cette question. Après avoir arrêté de rire, je m'excusai vivement et lui demandai d'attendre quelques secondes, que je lui explique. Certes, j'avais déjà eu l'occasion d'expliquer la relation que j'entretenais avec mon loup à d'autres lycans, cependant ce n'était surement pas pareil que ce qu'elle vivait malgré les quelques similitudes. Ces derniers comprenaient mieux la partie animale sans que j'ai à leur expliquer celle-ci car c'était commun à notre race. Prenant quelques secondes, je décidai enfin de reprendre la parole tout en me dirigeant à nouveau vers la boulangerie.
-Eh bien, pour faire simple...je l'accepte entièrement. Bien trop souvent, ceux de ma race ont tendance à lutter contre leur partie animale. De mon côté, je ne lutte pas. Disons que j'ai appris à communier avec elle, on tire chacun le meilleur de nos deux parties. C'est peut-être légèrement différent dans ton cas, mais dans mon cas je l'ai accepté. Et même si théoriquement nous sommes deux "entités", une "double nature" comme tu le dis, à bien des égards nous ne formons qu'un. J'ai accepté ses besoins, et lui les miens...
M'arrêtant quelques secondes alors que l'odeur des viennoiseries devenait de plus en plus fortes, je regardai mon interlocutrice dans les yeux. C'était un peu plus compliqué que ce à quoi je m'étais attendu et je ne savais pas si mon message était passé. Mais je voyais qu'elle avait en effet besoin d'aide. Et je désirais bien l'aider.
-Je ne sais pas si tu vois ce que je veux dire, mais il est plus facile de contrôler quelque chose que l'on a accepté. Quelque part, ce n'est qu'une extension de toi-même, fis-je avec une sourire doux. As-tu déjà réussi à contrôler ton don ? |
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