L'atmosphère paisible qui régnait dans la chambre était propice à la quiétude émanant des deux corps étendus, eux-mêmes entrelacés avec les draps devenus tièdes au cours de la nuit passée ensemble. Les stores avaient été tirés, seule une timide lumière perçait dans la pièce, toujours plongée dans la pénombre. Rares étaient les rayons du soleil parvenait à filtrer au-travers des épais stores qui dissimulaient la vie à l'extérieur. Le temps semblait avoir suspendu son cours, l'espace d'un court instant de tranquillité dont profitaient pleinement les deux êtres respirant doucement entre les draps. Aujourd'hui on était dimanche, nul besoin de se lever de bonne heure pour finir de corriger quelques copies ou bien retravailler ses cours pour la journée à venir. S'il l'avait voulu, le Lightness aurait parfaitement pu passer la journée au lit mais ce n'était pas vraiment dans ses habitudes de traîner ainsi. Cependant, il n'était pas opposé à l'idée de retarder un peu, pour quelques heures supplémentaires, son lever du lit. Hormis lire et s'occuper de ses cours, au sens large du terme, il n'avait pas spécialement quelque chose à faire de sa journée, autant en profiter, non ? Pourtant, l'intéressé était bien loin de réfléchir au programme de sa journée puisqu'il profitait encore des derniers instants d'un sommeil paisible dans la chambre qui était la sienne. Moment qui n'allait pas durer éternellement vous vous en doutez bien. Du mouvement sur sa gauche troubla légèrement son sommeil mais ce ne fut pas suffisamment pour le réveiller complètement. Non, ce qui finit par lui faire ouvrir un œil, puis les deux, ce fut l'absence d'un corps chaud contre le sien. Le froid soudain le força à émerger, d'une manière un peu plus brutale qu'un baiser mais il n'était pas encore en état pour s'en plaindre. Laissant le soin à son cerveau d'émerger lentement, le jeune professeur se laissa aller sur le ventre, comme pour tenter de conserver un peu de la chaleur que sa partenaire avait emportée avec elle. Serrant son oreiller entre ses bras pour y laisser reposer sa tête, le bruit de l'eau en provenance de la salle de bain, laquelle était rattachée à la chambre, acheva de l'empêcher de se rendormir pour de bon. Le bruit de l'eau résonnait tel une douce mélodie et Jilan s'amusa à imaginer le parcours de celle-ci sur le corps de son amante. Elle commencerait d'abord par une chute délicate sur la nuque de la jeune femme, glissant ensuite sur ses épaules, empruntant peut-être un chemin détourné pour descendre entre ses seins, au lieu de suivre les lignes de son dos, parcourant son ventre, ses cuisses et enfin, s'écraser sur le carrelage humide de la salle de bain. Allait-il la rejoindre sous l'eau avant que Leann n'ait fini de se laver ? Le Lightness hésitait encore mais l'intéressée trancha à sa place puisque le bruit de l'eau cessa soudain, bien vite remplacé par les frottements de la serviette sur la peau de la louve. Tant pis, ce serait pour une prochaine fois ! Le jeune professeur fit semblant de dormir quand il perçut du mouvement dans sa direction. Même en gardant les yeux fermés, il suivit la progression de la jeune femme dans la chambre puis nota qu'elle venait de quitter la pièce. La journée ne faisait commençait qu'à peine. Un coup d’œil en direction du réveil posé en évidence sur sa table de chevet le renseigna à ce sujet. Il était fort probable que son amante soit partie se préparer du café ou tout simplement manger quelque chose. Dire que l'époque des petites-déjeuners au lit était révolue...
S'étirant à plusieurs reprises, Jilan finit par se décider à se lever. A présent qu'il était parfaitement réveillé -et de bonne humeur qui plus est !-, il ne voyait pas l'intérêt de demeurer au lit. Encore moins s'il n'y avait personne pour lui tenir compagnie ! Le jeune professeur passa paresseusement sa main dans sa chevelure écarlate et prit à son tour la direction de la salle de bain. Il y resta moins longtemps que la louve, jugeant inutile l'eau sur son visage pour achever de le réveiller. L'imaginer sur le corps de son amante avait nettement contribué à y parvenir, sans doute avec un meilleur résultat au final. Depuis que sa fiancée avait refait irruption dans sa vie, le Lightness avait craint que ses rapports avec Leann ne se détériore, au point de ne plus exister que sous forme d'une collocation plus contrainte qu'autre chose. Mais après une petite mise au point qui avait eu lieu le soir même, les deux interlocuteurs avaient décidé de conserver une certaine proximité, si bien qu'ils pouvaient toujours passer pour un couple normal aux yeux d'un observateur extérieur. Si cette représentation d'eux l'ennuyait ? Pas vraiment. Il avait accepté qu'on les considère comme tel à partir du moment où la louve avait emménagé avec lui. Parce qu'il savait au fond de lui, qu'ils n'étaient pas réellement un couple. Et si la jeune femme désirait qu'ils le deviennent pour de bon, il allait falloir qu'elle parvienne à se faire une place dans son cœur. Ce qui n'était pas chose gagnée d'avance, surtout après qu'Eléanore ait repris contact avec l'intéressé. Coupant brutalement l'eau pour ne pas se mettre à repenser à la vampire, Jilan sortir aussitôt de la douche, effectuant les mêmes gestes que son amante quelques minutes plus tôt. Il n'avait aucune idée de ce qu'il allait bien pouvoir faire de sa journée. Sortir prendre l'air ? Avec ou sans la louve à ses côtés ? Se rendre à la Grotte pour savoir où en étaient les opérations de sabotage des rebelles ? Ou se contenter de flâner entre ces quatre murs, livre à la main ? La perspective de passer un dimanche entier à lire pour se cultiver et s'occuper, ne le dérangeait pas du tout. Mais n'allait-il pas passer pour un vieux avant l'heure à agir de la sorte ? Cette idée l'amusa et un premier sourire fit son apparition sur les lèvres de l'intéressé tandis qu'il ressortait de la salle de bain pour aller chercher de quoi se vêtir dans la chambre. Une simple chemise sur un pantalon de couleur différente suffirait, surtout s'il ne prévoyait pas tant que ça de sortir. Les chemises de couleurs foncées étaient davantage réservées aux occasions nocturnes, quand il s'amusait encore à sortir boire un verre en galante compagnie mais avec le travail de Leann, difficile pour eux de trouver le temps de se retrouver en tête-à-tête autour d'un verre ou deux. Minute. Depuis quand il pensait de la sorte ? Était-il vraiment en train de se prendre au jeu et de la considérer comme son amante officielle ? Au point d'agir comme un vrai petit couple heureux ? Ce qu'il pouvait être ridicule quand il le voulait... Peut-être que la louve apprécierait ce genre d'initiatives de sa part, même s'il ne l'admettrait jamais de son côté mais avaient-ils réellement besoin de ça ? Elle oui, peut-être mais, et lui ? Ce fut sur cette dernière pensée que le Lightness quitta à son tour la chambre, habillé des pieds à la tête pour se diriger lentement vers la cuisine d'où le bruit de cafetière lui parvenait déjà. Au fur et à mesure qu'il se rapprochait, l'odeur du café se fit plus présente, parvenant à ses narines afin qu'il s'en imprègne totalement. Oubliant dans le même temps, ce à quoi il pensait précédemment. Ce qui n'était pas plus mal, lui évitant ainsi, de se montrer désagréable envers la jeune femme.
« Tu en fais suffisamment pour deux ? » demanda t-il alors à l'intention de l'intéressée.
Et oui, même le quotidien du chef des rebelles commençait avec une phrase de ce genre... Rien d'exceptionnel en soi. Mais réalisant alors qu'il ne lui avait même pas dit bonjour en arrivant près d'elle, Jilan combla les quelques centimètres qui les séparaient alors, pour venir l'embrasser, après avoir cru apercevoir une drôle de lueur dans les iris de son interlocutrice. Voilà qui était réglé. La suite ne fut que la poursuite d'une conversation banale entre deux personnes vivant sous le même toit. Les bouches s'ouvraient puis se refermaient, les langues se déliaient progressivement, les tasses se vidaient doucement. Les esprits s'éveillaient pour de bon et les premières interrogations quant aux activités prévues pour la journée à venir, commencèrent à se manifester. Mais en voyant Leann laver puis reposer sa tasse, afin d'aller se préparer pour sortir, le Lightness ne put que froncer les sourcils.
« Tu sors ? »
Question qui apparut rapidement n'être que rhétorique puisqu'il songea immédiatement au loup que la jeune femme avait évoqué ce soir là. Allait-elle le retrouver pour chasser en sa compagnie ? Ou à défaut, passer un peu de temps avec un représentant de sa race ? Car il doutait de pouvoir la satisfaire de ce côté... Aussi reprit-il avant que son interlocutrice n'ait l'opportunité de lui répondre quelque chose.
« Si tu avais prévu de le revoir, je viens avec toi. » Et comme s'il redoutait une protestation ou de nouvelles interrogations de la part de la louve, il enchaîna rapidement avec une brève explication. « J'aimerais le rencontrer si, tu n'y vois pas d'inconvénients ? »
La seconde partie de la phrase, sous forme de question, n'attendait pas vraiment de refus de la part de la jeune femme, aussi Jilan s'empressa t-il de finir sa propre tasse avant de lui faire subir le même sort que celle de son amante. Constatant que cette dernière était déjà prête à sortir, contrairement à lui, il ne se fit pas attendre plus longtemps et se chaussa dans l'instant, avant de passer une veste sur ses épaules. Oui, même si le printemps était déjà bien entamé et que les beaux jours revenaient, le temps demeurait incertain, tantôt froid, tantôt gris. Peut-être même qu'il se mettrait à pleuvoir, le soleil s'étant caché derrière de gros nuages. Après avoir refermé la porte de l'appartement derrière eux, -à clé bien entendu !- le jeune professeur laissa Leann le guider une fois qu'ils se retrouvèrent à l'extérieur. Il n'avait que de vagues hypothèses sur la manière dont la louve passait ces moments avec son ami. Peut-être qu'il se trompait à leur sujet d'ailleurs, qu'ils n'allaient pas se retrouver dans les bois pour laisser libre cours à leurs pulsions de chasseurs poilus ? Pourtant, c'est presque amusé que le Lightness se vit guidé en direction de l'immense forêt qui entourait la ville. Ainsi donc, il ne s'était pas trompé ? Pour la peine, il aurait presque fait une réflexion à son interlocutrice mais il doutait qu'elle en apprécie la nature. Faisant confiance à son guide improvisé, le jeune professeur nota dans un coin de sa tête, le chemin qu'ils empruntaient. Pendant les premières minutes à progresser dans les bois, ils suivirent un petit sentier, à peine remarquable à cause du manque d'entretien flagrant dont il bénéficiait puis la louve tourna radicalement sur la droite pour s'enfoncer encore un peu plus dans la forêt. Par chance, le soleil parvenait toujours à filtrer à travers les feuillages des arbres alentours, le Lightness ne craignit pas de se montrer irritable par la suite. Pour un peu, il aurait remercié son guide pour avoir choisi un endroit pareil mais il se retint, car il doutait qu'elle l'ai fait à son attention. Le hasard faisait parfois bien les choses... Le bruit d'un ruisseau leur parvint alors et Jilan apprécia de découvrir l'endroit. Une sorte de petite clairière, elle-même traversée par un cours d'eau laissant voir les galets en son sein, tant le liquide était clair et transparent, les attendaient tous les deux. A moins que leur interlocuteur ne les attende déjà... ?
La nuit était passée bien trop vite aux yeux de la louve. Son esprit lui ressassait ce qu’il s’était passé plusieurs jours auparavant. Même avec la présence de Jilan à ses côtés, et plus proche d’elle qu’elle ne l’aurait cru ce soir là, Leann n’était pas parvenue à fermer l’œil rapidement. Et ce, malgré la fatigue physique et mentale dont elle était sujette. Elle avait naïvement pensé que s’allonger et sentir l’homme coller à elle lui aurait permit de faire fi de toutes ses pensées. Grossière erreur. La jeune femme avait donc passé une bonne partie de ce qui restait de la nuit, à parlementer avec sa bête. Cette dernière reconnaissait volontiers qu’elle était fière de sa partie humaine pour ses réactions violentes de la soirée mais elle ne comprenait toujours pas pourquoi elle s’obstinait à rester auprès de son amant. Puisque ce dernier avait retrouvé sa fiancée, quel était l’intérêt de garder la lycanne à ses côtés ? Parce qu’elle s’était attachée à lui ? Comme elle l’avait communiqué à ce dernier au cours de la soirée ? Elle ne pouvait pas croire qu’il s’agisse là d’amour, sinon elle se serait montrée plus jalouse qu’elle ne l’avait été non ? Ou alors, elle n’était pas encore assez dominante pour montrer les crocs dans ce genre d’histoire ? Alors quoi ? Cela ne pouvait pas non plus être pour leur partie de jambe en l’air, elle ne resterait pas simplement pour ce genre de chose. Donc ? Qu’elle le reconnaisse ou non, des sentiments un peu plus profonds qu’elle ne voulait l’admettre à haute voix l’habitaient. Si elle en parlerait à Jilan ? Pour qu’il lui rit au nez que la place était déjà prise depuis de longues années ? Aucune envie, pour le moment. Un autre sujet de conversation, et non pas des moindres, fut celui des deux mises à mort qu’elle avait faite dans la même soirée. Elle ne les regrettait nullement, ni l’une ni l’autre. Bien qu’elle devait reconnaitre être un peu déçue de ne pas avoir pu arracher le cœur de ce lycan. Peut-être même qu’elle l’aurait mangé si elle en avait eu l’occasion. Ce sera pour sa prochaine victime. Et en parlant de cette dernière, Leann se souvenait qu’elle devait toujours aller chasser l’humain en compagnie de Bran. Mais avant cela, elle devrait lui avouer ce qu’elle avait fait. Elle n’avait pas honte, loin de là, mais elle ne savait pas comment il allait le prendre. Et s’il se vexait de ne pas avoir été appelé pour participer ? Bien que dans les deux cas, elle n’ait rien prévu. Peut-être qu’il ne lui en tiendrait rigueur ? Elle le savait tolérant la concernant. Parce qu’elle avait encore pas mal de chose à apprendre ? Probablement. Mais avec les différents moments passés l’un avec l’autre, il ne pouvait pas négliger qu’elle avait fait des progrès. Peut-être même qu’avoir tué, serait un nouveau signe de son évolution ? Elle prit alors la décision de lui envoyer un message demain matin dès qu’elle se réveillerait pour lui demander qu’ils se voient. La jeune louve finit par s’endormir, après avoir fait accepter à sa bête qu’elle ne quitterait pas Jilan, quoi qu’il arrive mais qu’elle continuerait de rester -et de voir régulièrement- Bran. Sur ce semblant de compromit et sur la douce mélodie qu’était le souffle lent de son amant, Leann s’endormi pour de bon.
Comme dit plus haut, la nuit fut extrêmement courte. Trois ou quatre heures tout au plus. Ce furent le chant insistant des oiseaux qui eurent raison de son sommeil. Si elle en avait eut le pouvoir, elle les aurait fait taire pour les cinq prochaines heures suivantes. Mais elle n’était qu’une lycanthrope et grâce à ses capacités, elle avait tout le loisir d’entendre ces piafs chanter à plusieurs pâtés de maison de là. Déposant une légèrement lèche sur le coin des lèvres de son amant, la jeune femme se glissa hors du lit pour aller rejoindre la salle de bain. Trois douches en moins de vingt-quatre heures, elle n’allait plus rien sentir à ce rythme ! Mais elle en avait besoin pour se réveiller pleinement. Elle sentait encore les vestiges d’une nuit trop courte dans ses membres. Bien que les traces de ses deux combats de la veille n’existaient plus. Avant de se glisser sous l’eau, Leann envoya un sms à son ami, lui demandant si dans « à peu près une heure », il acceptait de la voir, dans la forêt, dans la même clairière qu’à leur habitude. Peut-être qu’il n’allait pas voir son message avant qu’elle ne parte ? Ou peut-être même qu’il avait déjà des projets pour cette journée ? Avec sa tante ? Cette pensée l’amusa légèrement. Le moins que l’on puisse dire, c’était que cette femme était plutôt tolérante avec son neveu ! Espérant ainsi le voir dans une heure, à quelques minutes prêtes, elle ouvrit l’eau et s’y glissa rapidement dessous. Eau chaude à fond. Elle ne se lava pas à proprement parler, c’était juste histoire de se rafraichir un peu. Et oui, avec de l’eau chaude et non froide. Avec une température corporelle comme la sienne, elle n’avait aucune envie de sentir l’eau gelée lui tomber dessus. Elle sorti de la douche pour se sécher et se coiffer. Puisqu’elle sortait, elle les tressa rapidement. Il n’était pas certain qu’ils allaient prendre forme lupine, alors pour plus de facilité, elle préférait les tresser. Elle retourna ensuite dans la chambre, en prenant garde de ne pas faire trop de bruit pour laisser son amant se reposer. Leann se saisit de sous-vêtements, d’un short et d’un tee-shirt avant de les enfiler en prenant la direction de la cuisine. L’avantage de vivre avec un homme qui connaissait votre corps par cœur et qui tolérait le nudisme, c’était qu’elle n’était pas obligée de s’habiller spécialement dans la chambre ou la salle de bain. La louve s’amusa toute seule à imager la tête de Jilan si un jour, elle se baladait toute la journée nue, dans l’appartement. Peut-être qu’elle essaierait, simplement pour voir sa réaction. Bonne ou mauvaise ? Ou encore exaspérée ? Les paris étaient ouverts !
Bref, arrivée dans la cuisine, elle mit de côté la casserole de thé. Aucune envie de boire ce breuvage ce matin. Ce n’était pas assez fort pour elle. Faisant donc comme chez elle, après tout, c’était ce que lui avait dit Jilan, elle entreprit de préparer du café. Même si elle ne savait pas quand ce dernier allait se réveiller et se lever, la lycanne en prépara assez pour deux et même pour quatre. Des fois, que l’un ou l’autre des occupants de l’appartement décidait d’en prendre plus d’une tasse. En attendant qu’il se fasse, elle lava celle que le jeune professeur avait utilisée et laissée dans l’évier. Leann finit par entendre de l’eau couler et sans vraiment savoir pourquoi, un sourire se dessina sur ses lèvres. Parce qu’elle était contente de pouvoir le voir avant de partir ? Franchement, avec ce genre de pensée et de comportement, il allait pouvoir la mener par le bout du nez. La louve gronda légèrement à cette idée. Elle n’était plus aussi soumise que ça ! Même avec lui ? Vraiment ? Elle remercia mentalement l’intéressé de ses songes de se manifester alors, pour lui éviter de répondre à ses interrogations. Sa question la fit sourire. Sa première préoccupation du matin, était de savoir s’il allait pouvoir bénéficier d’une tasse de café maintenant et non pas attendre pour s’en faire à son tour ?
« Bien sur. »
Leann fut assez surprise par son entreprise mais pas encore assez pour rester les bras ballants. Elle en profita pour lui rendre son baiser, avec une légère morsure sur la lèvre inférieure en prime. Si elle le cherchait de si bon matin ? Peut-être. Une fois le café prêt, elle le servit dans deux tasses, dont une qu’elle tendit à son amant. On pourrait presque croire qu’ils agissaient comme un couple normal. Cette pensée faillit la faire grimacer. Elle avait parfaitement conscience que ce genre de chose n’arriverait jamais. Parce qu’il avait été clair. Enfin... Il n’y avait que les imbéciles qui ne changeaient pas d’avis, non ? Quand vient la question de Jilan, la louve faillit lui demander s’il y avait un problème à ça. Avait-il peur qu’elle n’aille au commissariat pour donner aux forces de police son signalement et son lieu d’habitation ? Si c’était cela sa motivation à poser cette question, elle allait probablement hausser le ton pour lui faire comprendre une bonne fois pour toute sa position. Alors qu’elle ouvrit la bouche pour lui demander confirmation, il l’a devança. Et elle devait reconnaitre qu’elle était assez surprise qu’il ait vu aussi juste. Mais... Pourquoi voulait-il voir Bran ? Alors même qu’il n’avait posé aucune question à son sujet lorsqu’elle lui avait parlé de son ami ? Parce qu’il voulait rencontrer le loup qui avait permit à Leann de devenir plus forte ? Pourquoi cette idée ne l’enchantait guère ? Parce qu’elle n’avait aucune envie de voir les choses dégénérer ? Bien qu’elle savait que Bran n’était pas aussi impulsif que pouvait l’être d’autre lycan. Alors quoi ? Elle voulait garder ce petit jardin, secret ? Comme lui, l’avait fait avec la vampire ? Que de raisonnement puéril ! Elle s’exaspérait toute seule.
« Oui, c’est bien lui... Et si tu n’as pas peur de te salir, tu peux m’accompagner... »
Sa condition avait été prononcée sur un ton de plaisanterie, alors qu’elle s’approchait de lui pour lui lécher les lèvres. Encore une fois, pour le taquiner. En le voyant, du coin de l’oeil, vider sa propre tasse, Leann se demanda s’il n’était pas un peu pressé -parce qu’intrigué- de rencontre Bran. Et si... Elle les faisait se perdre en forêt... De façon parfaitement innocente ? Leann se retint de lever les yeux au plafond devant son comportement. A croire qu’elle allait avoir ses règles pour vouloir être aussi chiante. Encore heureux que ce n’était que des pensées ! Ils quittèrent rapidement l’appartement. Du moins, plus rapidement que si elle avait été en colocation avec une femme lambda -qui mettait des plombes à se préparer-. Elle lui laissa le loisir de prendre les clés, tant pis si elle ne prenait pas le double sur elle. Elle ne prit pas non plus de sac avec des vêtements de rechange. Elle allait juste devoir s’en rappeler avant de prendre forme lupine. La louve s’étonna presque du mutisme de Jilan pendant le trajet. Il n’était pas assez curieux pour vouloir poser des questions ? A moins qu’il ne soit assez patient pour cela ? En jetant un regard dans sa direction, elle pu noter que son attention était plutôt rivé sur les alentours et après l’avoir observé un petit moment, elle lâcha, sur un ton joueur :
« Je ne compte pas te perdre dans les bois, tu sais ? »
Elle agissait vraiment en toute décontraction aujourd’hui ! Etait-ce parce que les choses étaient claires entre eux ? Et qu’elle n’avait pas -encore- à craindre de se voir expulser de l’appartement ? Surement. En plus du fait qu’elle sentait sa bête heureuse et excitée à l’idée de revoit le jeune loup. Et qu’allait bien pouvoir dire Jilan en voyant que Bran était plus jeune qu’elle ? Allait-il penser qu’elle n’avait pas à recevoir des conseils de lui ? Ou allait-il apprécié qu’une personne aussi jeune ait déjà des centres d’intérêts aussi bestiaux ? Leann remarqua qu’elle ne voyait pas encore son ami dans les parages alors que le couple qu’elle formait avec son amant était arrivé à destination. Les observait-il dans un coin ? Cette idée l’amusa et elle se demanda s’il allait l’attaquer pour la tester même en compagnie d’un autre homme. Après avoir fermé les yeux quelques instants, un sourire en coin se dessina sur les lèvres de Leann, elle venait de percevoir l’odeur du lycan.
Dimanche...je n'avais pas l'habitude de rester chez moi pendant le week-end. J'avais bien plus tendance à aller me perdre en forêt et me prélasser au soleil presque deux jours durant, m'adonnant aux divers plaisirs de mes instincts bestiaux. Même si il était vrai que la plus part du temps je n'avais pas besoin de partir en week-end pour renouer avec ma nature. Je m'éclipsais souvent les nuits en semaine pour aller faire un petit tour en forêt et respirer de l'air frais, non pollué, et libre des odeurs caractéristiques de la ville. Mais la veille avait été le jour d'anniversaire de ma tante. Et bien que j'accordais énormément d'importance à mes excursions de fin de semaine, j'appréciais d'autant plus ma tante qui était ma seule famille avec qui j'avais gardé contact. J'avais donc passé la journée d'hier avec ma tante, à qui j'avais fait quelques surprises qu'elle avait plus qu'apprécié. Il était presque aussi plaisant de faire plaisir aux gens qui t'étaient chers que d'aller chasser un bon gibier. C'est donc avec une proximité attendrissante que j'avais passé la journée à profiter avec ma tante de cet jour un peu spécial, et nous nous étions divertis jusqu'à ce que l'astre de la nuit laisse place au soleil, et que l'énergie débordante de ma tante se transforme en un sommeil de plomb. Je l'avais alors transporter sans turbulence jusqu'à sa chambre, où je l'avais délicatement recouverte de drap après l'avoir déposé sur son lit.
Quant à moi, avec ce soleil levé et les voisins qui s'étaient réveillés, il m'était impossible de rejoindre mon lit. Pas lorsqu'ils s'adonnaient à leurs ébats matinaux. Non pas que cela me dérangeait au fond, mais si pour une ouïe humaine ils devaient faire un léger bruit, à mes oreilles ils généraient un sacré vacarme. Par ailleurs, mon loup était agité et ne m'aurait de toute façon pas laissé m'en dormir. De ce fait, je ne ressentais pas les effets de la fatigues et une irrésistible envie de bouger me démangeait. Bien que ma part humaine ait été satisfaite de la journée que je venais de passer, il manquait quelque chose pour ma part loup. Alors que j'allais me décider à faire une petite promenade matinale dans le parc, afin de revenir vers ma seule famille, mon portable sonna. Ma seule famille ? Non, pas tout à fait. Je venais de recevoir un message de Leann, juste à temps avant de quitter la maison -car je ne partais jamais avec mon téléphone- qui m'avait fait changer d'avis. Leann était une louve. Et bien qu'elle n'était pas de ma famille, nous nous étions tellement rapprochés que pour ma part c'était tout comme. Notre amitié était des celles qui naissaient entre deux loups d'une même meute : un mélange de jeu, de respect, de loyauté et de confiance régnait entre nous deux, et c'était d'ailleurs l'une des seules dans cette ville avec qui j'entretenais ce genre de relation. En même temps, elle était la seule louve avec laquelle j'avais nouer de réels liens.
Son message disait qu'elle serait dans la forêt dans environ une heure, à la clairière où nous avions l'habitude de nous rencontrer. C'était aussi là que j'avais fait sa connaissance pour la première fois, alors qu'elle avait volé ma proie involontairement. Me réjouissant d'avance, j'écris un mot à ma tante afin de la prévenir de mon départ, bien que ce n'était pas mon habitude. Mais à son réveil elle risquait de me chercher, et bien qu'elle savait que c'était mon habitude je ne voulais pas qu'elle s'inquiète trop lorsqu'elle sortirait des bras de Morphée. La note rédigée, sans plus de cérémonie je sortis de l'appartement où je vivais avec ma tante et me dirigeai vers la forêt, vêtu simplement d'un t-shirt blanc qui me saillait plutôt bien, ainsi qu'un jean noir et des baskets de la même couleur. En quelques minutes j'avais rejoint le point de rendez-vous, me déplaçant à travers les arbres avec aisance et rapidité. Il me restait une vingtaine de minutes avant que l'heure ne soit entièrement passée. Profitant du temps qu'il me restait, je grimpai en hauteur sur une branche d'arbre solide afin d'observer les alentours. Puis au bout de quelques autres minutes, le vent qui chassait dans la bonne direction m'apporta l'odeur de Leann et de quelqu'un d'autre à un kilomètre de là. Cette odeur m'était vaguement familière, et je mis quelques secondes à me rappeler que c'était celle du compagnon de la louve, dont elle portait sur elle des effluves éparses. Intéressant. Alors comme ça ce dernier était venu avec elle ? Etait-ce de la jalousie ou bien tout autre chose ? Quand ils furent assez proche pour que je les vois, j'observai discrètement leur progression silencieuse en paroles. L'homme semblait concentré et observait autour de lui, comme si il cherchait à mémoriser des détails qui lui permettraient de se retrouver par la suite. Et la louve à la chevelure émeraude l'avait remarqué et l'avait taquiné à ce propos. Elle avait l'air de bonne humeur, et cela me mit automatiquement le sourire aux lèvres. Cette dernière s'arrêta non loin de ma position, regarda tout autour d'elle à ma recherche, puis après un moment, elle ferma les yeux pour flairer mon odeur. Et je sus à son sourire qu'elle l'avait trouvé. Je fus tenté de tester sommairement les capacités de l'homme qui accompagnait celle que je considérais comme ma soeur de meute, mais je me ravisai.
Descendant d'un bond de l'arbre où j'étais perché, je fis un sourire immense à Leann, ravi de la revoir, et hochai la tête en direction de l'homme. Homme ? Pas vraiment. Il n'était pas humain, même si il y ressemblait énormément. Il n'était pas non plus un hybride ou un darkness. En parlant de darkness, alors que leur odeur me rappelait quelque chose de sinistre, la sienne me semblait au contraire chaleureuse. Mais c'était la première fois que je flairais quelqu'un comme lui. Bien sur, si l'on excluait l'odeur du café que lui et son amante semblait avoir pris ce matin là. Sans rien laisser paraître, je continuai à sourire à l'intention de la louve et engageai la discussion.
-Eh bien salut Leann ! Comme toujours ça fait plaisir de te revoir. Et cette fois-ci on dirait que tu as emmené un invité surprise, souris-je avec mon habituel provocation en direction de l'intéressé.
Bien que je mourrais d'envie de demander à Leann comment elle allait depuis notre dernier entraînement, et ce qu'elle avait de bon à me raconter, il aurait été impoli d'ignorer son ami de la sorte. Et d'ailleurs sa nature m'intriguait toujours.
Même si le ton de son guide improvisé se voulait joueur pour susciter une réaction de sa part, fut-elle un simple haussement d'épaules, le jeune professeur l'ignora superbement. Parce qu'il doutait de pouvoir se perdre dans les bois à cette heure de la journée, pas avec ce astre solaire qui brillait au-dessus de leurs têtes. Il n'était pas bien compliqué de s'orienter en fonction de la position du soleil dans le ciel. Et puis, si jeter des coups d’œil autour de lui, histoire de s'assurer que les rayons lumineux pourraient toujours l'atteindre, où qu'ils se retrouvent dans cette étendue d'arbres, était un comportement suspicieux aux yeux de la louve, et bien tant pis. Mais peut-être qu'elle essayait tout simplement de lancer un semblant de conversation entre eux ? Après tout, le Lightness s'était invité dans cette promenade matinale, il était un peu normal que la jeune femme s'interroge sur ses motivations, non ? A cette pensée, Jilan se retint de soupirer. C'était même plus que logique à ses yeux mais il ne voyait pas par où commencer. Lui dire la vérité ? Qu'il était curieux de connaître ce loup ? Ou lui sortir une raison complètement bidon ? Son interlocutrice n'était pas stupide au point de gober n'importe quoi, il le savait. Aussi préféra t-il reporter son attention sur le décors environnant, à présent qu'ils semblaient arrivés à destination, à en juger par l'attitude de Leann. Elle flairait quelque chose ? Son ami peut-être ? Franchement... Quelles méthodes de sauvages pour se reconnaître... Vraiment dignes de poilus ! Et en parlant de cela...
Une masse venait de s'écraser au sol, au pied de l'un de ces grands pins. Une silhouette se redressa rapidement, leur adressant un sourire. Ou plutôt, le nouveau venu sourit à la jeune femme avant de se contenter d'un vulgaire hochement de la tête en direction du Lightness. Quoi de plus normal quand on ne savait pas -encore- à qui on avait affaire ? Jilan ne s'en formalisa pas et lui rendit son mouvement de la tête. Était-ce vraiment l'ami que la louve était partie rejoindre ce matin ? Et qu'est-ce que faisait un prétendu lycan perché dans un arbre ? Les jeunes de nos jours avaient des passe-temps plutôt étranges... Le jeune professeur écouta l'échange entre les deux interlocuteurs présents sur place. Il ne faisait plus aucun doute que ces deux-là se connaissaient. Ainsi ce... gamin, était le loup dont Leann lui avait parlé ? Cette blague... Il devait avoir quoi... 18 ans, à vue de nez ? Comment la louve pouvait-elle espérer apprendre à chasser convenablement avec un gosse comme lui ? Il lui fallait un vrai mentor, pas quelqu'un de plus jeune qu'elle ! Même si avec des idéaux comme les leurs -puisqu'elle lui avait dit que son ami possédait la même vision des choses qu'eux-, l'âge ne comptait pas. On pouvait parfaitement être très jeune et avoir déjà du sang sur les mains... Tout comme certaines personnes vivaient des siècles sans jamais prendre aucune autre vie... Ses pensées lui renvoyèrent l'image d'Eléanore l'espace d'une fraction de secondes, mais le Lightness avait appris à la chasser rapidement. Il ne devait pas oublier la position qu'il occupait dans le groupe armé, laquelle ne tolérait pas ce genre de faiblesse. C'était beaucoup mieux ainsi.
« Un invité surprise ? Tu es peut-être l'invité sans le savoir tu ne crois pas ? »
Derrière un sourire d'apparence, le ton laissait subtilement entendre que la chose était tout à fait possible. Et bien quoi ? Il n'allait tout de même pas prendre des pincettes pour s'adresser à ce morveux non ? Ami de Leann ou pas d'ailleurs ! Le jeune professeur ne se gêna pas pour détailler l'adolescent des pieds à la tête, sans faire aucun effort pour masquer son attention. Dire qu'il n'arrivait toujours pas croire que ce garçon était comme une sorte de mentor pour sa louve... C'était d'un ridicule...
« Tu m'as menti Leann. Tu m'avais parlé d'un loup, je ne vois rien d'autre qu'un louveteau ici. »
Le simple fait qu'il énonça le nom de l'intéressée dans ses propos, permettait de conclure que Jilan s'adressait bien à elle, non à l'inconnu. Parce que oui, il ne connaissait même pas le nom du nouveau venu, alors même que la louve lui avait parlé de lui, il y a de cela, un petit moment déjà. Peut-être parce qu'elle attendait plutôt qu'il manifeste de lui-même de l'intérêt pour son ami ? Qu'à défaut de questions de sa part, Leann en aurait conclu hâtivement qu'il se fichait éperdument de savoir qui elle fréquentait en dehors de lui ? Certes, le Lightness n'avait pas fait beaucoup d'efforts pour reparler du concerné mais de là à tirer ce genre de conclusion... C'était petit ! Le regard hétérochrome ne quittait plus l'adolescent du regard, se tenant prêt à réagir au moindre signe d'agressivité. Compter sur la louve pour le défendre était une chose. Mais quelle serait le choix de cette dernière si son protecteur provoquait ouvertement son ami ? Le laisserait-elle s'en mordre les doigts par la suite ? Jilan n'avait aucune envie de prendre ce risque. Sa force n'égalerait jamais celle d'un lycan, il en avait cruellement conscience mais peut-être que sa mesquinerie l'emporterait-elle sur la force brute de l'une de ses créatures poilues ? C'était à essayer.
« Oh ne me regarde pas comme ça gamin. J'ai déjà vu ceux de votre espèce à l’œuvre pour savoir à quoi m'attendre en terme de gabarit. Et je doute que ton jeune âge t'avantage de ce côté. Tu dois avoir l'air d'une peluche une fois transformé, je me trompe ? »
Cette question faisait clairement office de provocation adressée à son interlocuteur. Mais si le Lightness s'attendait plutôt à une démonstration en guise de réponse, plutôt qu'à une contre-attaque verbale, il n'excluait pas pour autant la possibilité que la louve prenne la défense de son ami. A cet instant, il ne savait pas encore lequel des deux lycans lui répondrait en premier... Ni à quel genre de réaction il devait s'attendre...
Plus le temps passait et plus la localisation de son ami se faisait plus précise dans l’esprit de la louve, même si le temps entre leur arrivée et l’apparition de Bran n’était pas si longue. Et même si les deux autres ne le voyaient comme tel, Leann le prenait comme une sorte d’entrainement. Dans le fond, la louve prenait tout ce qu’elle pouvait comme tel, pour tester ses capacités dans n’importe quelle situation. La jeune femme observa l’attitude de son amant lorsque son ami apparut subitement et le moins que l’on puisse dire, c’était qu’il était égal à lui-même. C’est-à-dire, qu’il ne laissait pas grand chose -pour ne pas dire rien- passer sur son visage. Si elle ne le connaissait pas aussi bien -ou du moins ses habitudes faciales- elle l’aurait peut-être mal prit. Passons. Une certaine lueur passa cependant dans ses iris hétérochromes, ce qui la renseigna quelque peu. Ou du moins, elle pouvait imaginer ce qu’il était en train de penser. Ce qui pouvait se révéler particulièrement inexacte, puisqu’elle ne lisait pas encore dans les pensées d’autrui ! L’hypothèse la plus probable, était formulée sur le jeune âge de son ami. Elle avait elle aussi eut l’occasion d’avoir ce genre de pensée, lors de leur première rencontre. Mais elle s’y était faite, parce qu’elle avait reconnue certaines choses. Enfin, ce n’était là qu’une supposition et elle pouvait très bien se tromper ! Mais quelque chose lui disait qu’elle allait bientôt avoir les réponses à ses questions silencieuses. Leann sourit en coin à son ami en entendant les premières paroles de Bran et il ne faisait presqu’aucun doute que s’ils avaient été seuls, elle serait allé le prendre dans ses bras. Simplement pour le toucher et lui dire ainsi bonjour. Mais elle doutait que Jilan apprécie ce genre de comportement, probablement presque trop animale pour lui. Elle devait peut-être paraitre lointaine avec lui et cela ne plaisait pas à sa bête. Cette dernière grogna violemment pour lui faire comprendre qu’elle voyait juste. Elle ne comprenait pas pourquoi elle n’avait pas le droit de s’approcher du loup. Alors qu’elle allait prendre la parole pour lui répondre oralement, il poursuivit dans ses propos, faisant référence à Jilan. Un invité ? Hum... Oui, c’était bien le cas de le dire. Elle sourit de plus belle en hausse faiblement les épaules, à mi chemin entre l’excuse et l’amusement. Mais, est-ce que la présence de son amant allait déranger Bran ? Il devait déjà avoir remarqué que l’odeur de Jilan était sur elle depuis leur rencontre et il devait surement avoir fait le rapprochement non ? Dans tous les cas, que cela lui plaisait ou non, Leann supposait qu’ils n’allaient pas rester très longtemps tous les trois. S’ils commençaient à s’entrainer à chasser, Jilan ne pourrait certainement pas suivre. Mais s’ils se battaient, ce dernier voudrait peut-être rester pour voir ce que cela pouvait donner ? Ce qui signifierait qu’elle ne pourrait pas parler à Bran de ce qu’elle avait fait. D’accord, Jilan avait été le premier au courant et elle n’aurait pas dû avoir de difficulté à parler devant lui, mais comme elle craignait encore la réaction de son ami, elle préférait le faire seul-à-seul. Evidemment, elle ne le dirait surement pas à haute voix, ce serait vexer Jilan et elle savait comment il pouvait être dans ce genre de situation. La réponse de Jilan quant aux dernières paroles du jeune loup, la fit sortir de ses pensées et elle leva littéralement les yeux au ciel. Sérieusement ? Ils allaient s’envoyer des piques, pour savoir lequel aurait le dernier mot ? Cette idée l’ennuyait au plus haut point. Parce qu’elle trouvait ce comportement puéril. Surtout pour elle qui ne cherchait pas continuellement à avoir le dernier mot ou à se montrer dominante envers le premier venu. Bref, elle ne répondit rien. Ni pour l’un, ni pour l’autre. Elle n’avait pas réellement envie de prendre le parti d’un des deux hommes, surtout pour ce genre de gamineries. Evidement, si c’était pour un cas plus sérieux, elle prendrait parti pour l’un des deux hommes. Mais pour le moment, si c’était pour définir qui savait pisser le plus loin, ce serait sans elle ! Quand Jilan décida de s’adresser directement à elle et surtout de cette manière, il s’assura de toute son attention. Elle lui avait menti ? Elle ne voyait pas sur quel point mais elle n’eut pas le temps de lui faire part de son interrogation qu’il y répondit. Bran ? Un louveteau ? Alors qu’il ne l’avait jamais vu sous se forme lupine ? Ni lui, ni même elle d’ailleurs. S’il la voyait, elle doutait qu’il la prenne alors au sérieux, vu qu’elle était le plus souvent plus petite que les autres de sa race. Elle comprenait le point de vue de son amant, Bran était jeune, plus jeune qu’elle mais...
« Contrairement à moi, il a toujours été loup. Il a toujours accepté son autre moitié... Alors oui, ce louveteau, comme tu dis, est certainement plus expérimenté que moi. Que ce soit en terme de combat ou d’instinct animal... Alors je ne pense pas t’avoir menti en te parlant de lui. Tu as bien vu mon changement non ? Tu m’as vu me battre ? Je n’aurais surement pas pu tenir tête et tuer ce lycan s’il ne m’avait pas entrainé plus tôt. »
Merde. En plus de reparler de ce moment là à Jilan, voila qu’elle informait en même temps Bran de ce qu’elle avait fait à l’un de leur congénère. Leann senti son humeur se dégrader quelque peu, parce qu’elle n’aimait pas cette situation. Et la suite des paroles de son amant ne l’aidèrent pas à se dire le contraire. S’il était venu pour foutre sa merde... Non mais il se prenait pour qui ? A juger ainsi sans avoir vu Bran en action ? Il était jeune mais il avait la force d’un lycan à la fin !
« Si tu le prends déjà pour une peluche sans l’avoir vu, je te conseille de ne jamais me voir sous ma propre forme, Jilan. Je suis plus petite et menue que lui, et pourtant tu sais de quelle force je dispose. »
Oh et puis zut à la fin ! Elle n’avait pas envie de prendre la défense de Bran, parce qu’il pouvait le faire lui-même et encore moins se disputer avec Jilan. Ca donnerait une trop bonne excuse à sa bête pour lutter à faire surface. Elle croisa alors les bras sous sa poitrine, pour les toiser à tour de rôle. Et dire qu’elle n’avait même pas élevé la voix ! Et après, on osait dire que les lycans étaient des boules de poils qui ne savaient pas se contrôler ! Cette blague !
Lorsque j'atterris au sol légèrement, en amortissant ma chute, après m'être laissé tombé du haut de mon perchoir, je remarquai que Leann n'avait pas été surprise par mon apparition. Il semblait que cette dernière avait fait des progrès incontestables depuis la première fois que nous nous étions rencontrés, et un mélange de fierté et de joie ne pouvait que s'emparer de moi lorsque je constatais cela. C'était un peu comme voir le plus jeune du groupe s'épanouir et devenir quelqu'un d'autre, de meilleur, et savoir que vous étiez à ses côtés. Pour ma part, je n'avais pas vraiment eu de tuteur pour m'apprendre les choses les plus importantes dans le fait d'être un lycanthrope, mais j'avais reçu des bases de mon père qui étaient largement suffisante pour me permettre de m'épanouir de moi-même par la suite. De plus, le fait d'être né ainsi, mi-homme mi-loup dès ma venue sur terre, avait surement joué un rôle crucial dans le presque adulte que j'étais. D'un autre côté, Leann ainsi que son compagnon était déjà des adultes, eux, même si dans le fond ce mot ne signifiait pas grand chose pour moi. Le principe selon lequel l'âge faisait la sagesse était tout relatif de mon point de vue, et si adulte signifiait prendre ses propres responsabilités et être indépendants, je l'étais alors depuis la mort de mes parents. Car bien que je vivais sous la tutelle de ma tante, je n'étais que rarement chez elle, et je me débrouillais parfaitement bien sans elle : je savais cuisiner lorsque je n'avais pas envie de chasser, si je voulais j'aurais pu jobber pour obtenir assez d'argent pour me payer ce dont j'avais absolument besoin, et j'avais un grand sens des responsabilités. D'un certain point de vue, du mien en tout cas, j'étais déjà un adulte peu importait l'âge que j'avais en ce moment. Mais revenant à la situation présente, j'observai à son tour la réaction du non-humain face à mon apparition soudaine, et je ne lus aucune surprise sur son visage ni sur sa posture, même si son odeur était bien présente dans l'air. Il semblait être du genre à ne pas me montrer ses émotions, et ce dernier me rendis mon hochement de tête totalement cordialement même si quelque chose me disait qu'il était légèrement grincheux.
Quant à Leann, elle me fit un sourire en coin alors qu'à son tour elle étudia la réaction de son amant. Et celle-ci sembla percevoir quelque chose sur le visage du jeune homme que j'étais incapable de remarquer, comme deux personnes se connaissant depuis un certain temps étaient capables de communiquer presque sans mots, et ce qu'elle vit lui fit lever les yeux au ciel. Que pouvait-elle bien lire sur le visage de son ami ? Telle était la question. Mais m'en préoccupais-je vraiment ? J'en doutais fortement. D'un autre côté, j'observai à l'expression corporelle de la louve à la chevelure mauve qu'elle se retenait, surement afin qu'on ne se prenne pas l'un dans les bras de l'autre, ce qui m'amena à me demander si l'amant de la lycanne n'était pas un brin jaloux, ou si elle voulait juste ne pas lui montrer à quel point nous étions proches. D'ailleurs celui-ci sembla m'examiner, ou m'évaluer allez savoir. Cependant lorsque je pris la parole, et mentionnai le fait que Leann et moi cette fois-ci n'étions plus seul, le non-humain ne tarda pas à répondre avec un petit sourire qui dissimulait une très nette provocation -tout du moins c'est ainsi que je le perçus- insinuant par là que j'étais peut-être celui qui était invité et non pas l'inverse, et donc que c'était afin que Jilan me rencontre que j'étais ici, et non pas selon le bon vouloir de la louve. Ce dont j'en doutais, auquel cas je pense qu'elle m'aurait précisé dans le message que j'allais rencontré son amant. Mais la remarque du jeune homme était tout de même à prendre en compte, même si je le soupçonnais juste de vouloir semer le doute. Cependant, la supposition qu'il avait faite ne me dérangea aucunement, et me fit même sourire, dans la mesure où même si il avait bel et bien raison, être l'invité ne me dérangeait absolument pas. Mais je n'étais pas prêt à me laisser faire par ce petit bonhomme qui, je le sentais, commençais à me prendre de haut. Lui offrant donc mon sourire habituellement provocateur, je répondis à sa petite remarque.
-J'en doute fortement, d'être l'invité sans le savoir. Cependant, peu m'importe que je sois l'invité ou pas, non-humain.
Son regard scrutateur se faisait désagréable au fur et à mesure que les quelques secondes s'allongeaient. Ses yeux lançaient très clairement des éclairs de désapprobation, ce qui m'irritait quelque peu d'autant plus que je ne connaissais pas la raison de ce sentiment négatif. Mais je n'allais pas tarder à le savoir, car ce dernier pris une nouvelle fois la parole, s'adressant cette fois-ci à Leann. Bien qu'il parlait sans conteste de moi, et de manière très peu louable. Un louveteau, moi ? Eh bien maintenant je savais ce qui le dérangeait tant : mon âge. Et pendant un instant, haussant un sourcil, j'hésitai entre l'envie de céder à la colère et de le déchiqueter entre mes crocs ou d'éclater de rire face à sa naïveté. Sans compter que celui-ci enchaîna avec une autre pique sur ce à quoi je ressemblais transformer. Mais je n'eus le temps de faire aucun des deux que Leann réagissait déjà. Pendant un instant, sous le coup de la provocation, j'avais quasiment oublié que l'homme qui se tenait en face de moi était l'amant de la louve que je m'étais promis de protéger. Si je commençais par tuer son amant...cette promesse risquait d'être légèrement compromise. Bien que je doute qu'il soit si facile à tuer, en tout cas je l'espérais. Cependant, je décelai dans les yeux de Leann une lueur d'agacement face au comportement du non-humain, mais aussi quelque chose d'autre, qui semblait un peu plus personnelle. Elle lui expliqua succinctement que j'étais un lycan de naissance et de par ce fait, j'avais eu tout le loisir d'apprivoiser la bête. Que j'étais celui qui l'avait entraîné à en faire de même, et par la même occasion c'était aussi moi son professeur en matière de combat et c'était grâce à cela qu'elle....Avait tué un autre lycan ?? Me tournant vers Leann avec une réelle surprise dans les yeux, je ne pus néanmoins m'empêcher de sourire en croisant les bras. Pourquoi un sourire à cet instant ? Parce que je ne me préoccupais pas de qui était le lycan qu'elle avait tué pour la bonne et unique raison que si c'était le cas, cela voulait surement dire que ce dernier avait mit sa vie en danger d'une quelconque manière que ce soit. Cependant, j'avais remarqué que la révélation de ce petit incident n'avait rien de voulu et l'humeur de celle que je considérais comme ma soeur de meute se dégrada d'autant plus. Elle continua sur sa lancée cette fois-ci en défendant ma forme lupine qui était, en effet, plus grande et massive que celle de Leann, et qui ne ressemblait au passage pas le moins du monde à une peluche. Susceptible diriez-vous ? Oui, je l'étais, comme tous les loups.
Cependant, tout au long de son discours, la voix de Leann n'était pas monté d'un seul octave, preuve de sa maîtrise améliorée vue la colère que je flairais sur elle. Cependant, même si d'un point de vue extérieur cela ressemblait énormément à un plaidoyer en ma faveur, j'étais plutôt d'avis qu'elle tentait de désamorcer une bombe avant que mon tempérament provocateur ne l'allume de manière regrettable. Ce qui fonctionna quelque peu pour ma part, car elle parvint à me calmer. Analysant donc la situation avec un peu plus de recul, je constatai qu'elle avait lâché le nom de la créature non-identifiée me faisant face au cours de son monologue : Jilan si je me souvenais bien. Nom bien étrange, mais Leann ou Bran n'étaient pas énormément mieux. Etant encore le seul à ne pas être connu des deux protagonistes, je m'avançai lentement vers Jilan sans la moindre agressivité dans la posture et me présentai à mon tour après le pourparler de la louve.
-Par ailleurs, le louveteau se présente, fis-je avec un sourire en lui tendant la main. Bran pour vous servir. Puis marquant une pause, je jetai un bref regard vers ma main, avec un sourire innocent et clairement provocateur. Ou peut-être auriez vous peur que je vous broie la main ?
J'hésitai à poser la question qui me brûlait les lèvres afin de connaître la nature de cet homme, mais je me retins estimant qu'il était encore trop tôt.
Diverses émotions émanait de l'adolescent qui leur faisait face, à tel point que si la colère de Leann n'avait pas été aussi perceptible pour lui qui était à ses côtés, peut-être que le Lightness n'aurait même pas remarqué celle-ci, tant son attention demeurait rivée sur leur interlocuteur. Qu'est-ce qu'il pouvait bien se dire dans sa petite tête de bête sauvage ? Encore une chose qu'il devrait s'abstenir d'exprimer à haute voix, de crainte de froisser à la fois son amante et son ami. Dans le cas de ce dernier, le jeune professeur se moquait bien de heurter ses sentiments. Il avait d'ores et déjà choisi de tester le garçon pour s'assurer des liens qui l'unissaient à la louve, autant que pour déterminer s'il ferait un bon sous-fifre ou non. S'il était aussi impulsif que ses congénères -et son expérience personnelle avec Kyarra l'avait prouvé- alors Jilan aviserait sur la manière de le considérer. La force était certes un atout, mais sans cervelle pour l'utiliser, ni modération pour éviter de se faire arrêter bêtement, elle ne servait plus à rien. Et le Lightness voulait surtout éviter ce dernier cas de figure, à présent qu'il avait en partie révéler son identité à l'adolescent. Son amante s'était chargé de lâché son nom dans la conversation -chose qui ne lui plut que très peu d'ailleurs mais passons- mais il doutait qu'elle ait informé son ami du véritable rôle que tenait le jeune professeur au sein du mouvement rebelle. A supposer seulement qu'ils en aient déjà parlé entre eux en son absence. Leann lui avait assuré que le garçon prenait son parti et chassait de l'humain, mais qu'en était-il réellement ? S'il avait déjà pu assisté à une démonstration, tout comme Kyarra et lui l'avaient fait le jour de le rencontre, cela lui ôterait de nombreux doutes cependant... La voix de leur interlocuteur le tira de ses pensées. En mettant de côté le ton qu'il avait employé, tout juste bon pour exprimer l'arrogance d'un vulgaire gamin, Jilan nota la manière qu'il eut de le désigner. Non-humain ? Alors le flair de ce petit n'était pas si mauvais que cela en fin de comptes ? Un bon point pour lui, d'autant qu'il n'avait pas eu l'idée stupide de l'appeler humain comme cela avait été le cas pour ce vampire ailé des plus pathétiques. Non pas que l’appellation en elle-même soit bien flatteuse, le Lightness le reconnaissait volontiers mais c'était toujours mieux de le comparer à ces stupides créatures. Et cela prouvait également que le loup n'avait pas d'idées précises sur sa véritable nature. Un bon atout pour lui de ce côté. S'il pouvait jouer sur l'effet de surpris pour parvenir à ses fins, c'était parfait ! A propos de ça, Leann non plus ne savait pas de quelle race il était en réalité. Et bien comme ça, il allait faire une pierre en deux coups et les informer ensemble ! En parlant de cette dernière, voilà qu'elle reprenait la parole. Elle répondait à la place de son ami ? Comme c'était touchant !...bien qu'inutile et ennuyeux. Le jeune professeur récupéra néanmoins les informations qui pourraient lui servir par la suite, notant le tout dans un coin de sa tête. Il devait reconnaître que son amante avançait un bon argument : le fait qu'elle soit capable de se battre de la sorte penchait en faveur de l'adolescent sur ce point. Jilan ne pouvait pas croire que l'enseignement dont avait bénéficié la louve soit l’œuvre d'une troisième personne, puisqu'elle n'en avait mentionné aucune autre supplémentaire...
« Merci pour ces précisions Leann mais je crois qu'il est capable d'y répondre tout seul tu ne crois pas ? » rétorqua t-il simplement sur un ton neutre.
Derrière les apparences d'une aimable courtoisie, le Lightness faisait surtout remarquer à l'intéressée qu'il n'avait pas besoin de ses commentaires, puisque la pique était notamment dirigée vers le garçon, même si, à la base, il s'était adressé à la jeune femme lors de sa prise de parole. Et bien quoi ? Il était capable de lui apprendre à se battre mais ne savait pas répondre pour assurer sa propre défense face aux attaques verbales ? C'était ridicule ! Tandis qu'il répondait à Leann, le jeune professeur ne prêta pas attention à l'évolution des états d'âme de leur interlocuteur, s'il s'énervait suite à ce comportement méprisant et hautain envers lui, ou s'il le prenait avec plus de philosophie que son amie. Honnêtement, Jilan doutait de la véracité de la seconde hypothèse puisque le garçon appartenait à cette race de sauvages mais on ne savait jamais... Lorsqu'il sentit du mouvement dans leur direction, le Lightness prit sur lui pour ne pas tourner immédiatement la tête vers l'adolescent, ce qui aurait pu être interprété comme une preuve de nervosité à son égard. S'il se savait relativement maître de ses émotions, le jeune professeur ne voulait pas laisser paraître ce qu'il essayait de cacher. Il s'attacha plutôt à détailler la posture du loup alors que celui-ci comblait la distance qui les séparait au fil des secondes qui passaient. Force était de constater qu'il se tenait droit et une certaine confiance -toujours teintée d'arrogance aux yeux de Jilan- semblait émaner de lui. Parce qu'il se savait certainement supérieur en terme de force physique contre ses deux interlocuteurs ? Probablement. Arquant un sourcil, le Lightness dévisagea le loup puis la main que l'intéressé lui tendait. Qu'est-ce qu'il avait à sourire de la sorte ? Stupide gamin. La réponse ne tarda pas à lui parvenir et le jeune professeur se retint à grand peine de lui rire au nez. Bran pour vous servir ? Rien que ça ? Alors qu'à vue d’œil, il devait encore être au lycée ? Cette blague... Bientôt, il allait devoir les recruter à la maternelle ou quoi ? Même si ça partait d'une bonne intention, Jilan ne parvenait pas à prendre au sérieux son interlocuteur. Et pour cause ! Alors qu'il mettait un peu plus de temps que nécessaire avant de venir serrer cette main tendue, la pique du garçon résonna. Oh ? Il voulait jouer le louveteau ? Très bien. Le Lightness lui rendit son sourire provocateur tout en levant son bras. Juste avant que leurs mains respectives ne se serrent l'une dans l'autre, il fit apparaître l'une de ses orbes transparentes, prenant soin de former un modèle de taille réduite comparé à d'habitude, afin que le garçon ne se rende compte de rien. Et lorsque leurs paumes entrèrent en contact, Jilan inséra sournoisement la petite sphère au creux de celle du loup, jusqu'à ce qu'elle pénètre entièrement sa chair. Tout cela étant bien sûr parfaitement indolore. Aussitôt que ce fut fait, il lâcha la main de son interlocuteur, l'ayant serrée comme convenu puis activa le pouvoir de l'orbe, à présent dans le corps de l'adolescent. Bran allait très certainement ressentir les effets de la petite sphère de manière accélérée puisque le temps d'action de l'orbe variait selon sa proximité avec la cible. Autant dire tout de suite qu'à ce stade, les effets seraient presque immédiats. Le garçon ressentirait peut-être tout d'abord une baisse de moral et d'entrain, révélant ainsi son visage lors des mauvais jours. Puis lors que son humeur serait au plus bas, la petite sphère se mettrait à absorber ses forces vitales. Il fallait seulement espérer pour lui, qu'il en possédait plus que ce que le Lightness prévoyait. Sinon, qui sait ce qui pourrait arriver ?
« Enchanté Bran... Je me demande jusqu'où tu serais prêt à me servir comme tu le dis si bien... »
A cet instant, le jeune professeur en oublia presque la présence de Leann à ses côtés. Elle-même n'avait jamais assisté à l'une de ses utilisations de l'orbe, comprendrait-elle ce qui était en train de se passer ? Peut-être même qu'elle n'apprécierait pas son choix pour tester son ami ? Comme si son avis l'intéressait dans ce genre de situation. La louve n'avait pas la charge d'une groupe de criminels sur les épaules. La trahison était la pire chose que l'on pouvait obtenir de la part de ses camarades de chasse. Jilan voulait s'en garantir et tous les moyens étaient bons pour cela.
Je ne connaissais rien de ce Jilan, et il était assez difficile de discerner et deviner ce à quoi il pensait, mais il était plutôt aisé de constater que son attention était focalisée sur moi et qu'il semblait m'analyser. Ce qui, en soi, était quelque peu dérangeant. Avoir quelqu'un dont l'attention, plus que les yeux -c'était pour vous dire-, était braquée sur vous pouvait être quelque peu embarrassant. De mon côté, je le détaillais de manière un peu plus discrète et, je l'espérais, moins insistante, m'aidant de mes sens autre que la vue pour recueillir autant d'informations que je le pouvais. Ce qui n'était pas grand chose, m'enfin on faisait avec les moyens du bord. Lorsque Leann pris la parole, cela sembla ramener l'attention du non-humain sur elle pendant un instant, comme si il avait oublié pendant quelques secondes la présence de la louve à ses côtés. Et lorsque cette dernière laissa échapper le nom du jeune homme, je vis passer quelque chose sur son visage qui me permis de déduire qu'il n'avait surement pas compté me révéler son nom tout de suite, ou en tout cas pas de cette manière. Mais le mal, si on pouvait dire, était déjà fait, et que je sache son nom n'allait tuer personne. En tout cas, j'en doutais fortement. Mais je commençais sérieusement à me demander pourquoi Leann l'avait emmené ici. Non pas que sa présence me dérangeait réellement, ou que je ne l'aimais pas. Mais les quelques phrases qu'il avait lâché -même si je le soupçonnais d'intentionnellement me provoquer- me faisaient penser qu'il était ici pour une raison bien précise. Tout comme la manière qu'il avait de me regarder, comme si il étudiait mes réactions.
Lorsque je prononçai le mot "non-humain", cela sembla quelque peu le surprendre. Mais si j'interprétais bien l'expression de son visage, c'était un point positif. M'en préoccupais-je de savoir si je "marquais des point" dans son estime ? Pas le moins du monde. Je m'en fichais comme d'une guigne. Mais pour autant, je ne tenais pas à être désagréable envers celui avec qui ma soeur de meute -si je pouvais l'appeler ainsi- partageait ses nuits. D'ailleurs, cette dernière repris la parole afin de s'adresser à son amant -et me défendre par la même occasion. Et bien que ce qu'elle disait n'était pas dénué de sens, cela sembla ennuyer notre cher Jilan. Qui le lui fit d'ailleurs remarquer de manière faussement polie. Je retroussai les lèvres l'espace d'une milliseconde et réprimai l'envie de gronder. Même si il n'avait pas tord dans le fond, je n'aimais pas la manière dont ce non-humain parlait à Leann, ni d'ailleurs son ton en général, que je trouvais hautain voir méprisant. Notamment à mon encontre. Mais cette dernière me dérangeait beaucoup moins car je m'en moquais de la manière dont il me traitait moi, un étranger, contrairement à la louve. Cependant, je m'attelai à prendre une attitude et un expression faciale clairement dénuée de toute forme d'agression avant de m'avancer vers lui. Je maintenais mon désir de vouloir rester agréable dan la mesure du possible.
Alors que je marchais dans la direction des intéressés, je constatai la vive tension qui avait parcouru le corps du dénommé Jilan avant qu'il ne relâche celle-ci et se retourne vers moi. Mais il prit tout son temps pour me serrer la main, hésitant visiblement pour une raison ou une autre à accomplir ce geste pourtant pas si compliqué. Mais ma dernière pique sembla le motiver et, d'un sourire tout aussi provocateur, il finit par tendre la main. Mais dans le processus, pendant une fraction de seconde je flairai quelque chose de bizarre, comme une perturbation dans l'air. Je fronçai les sourcils alors que ma main rencontra celle de Jilan. Et la perturbation disparut aussi vite qu'elle était apparue. Je n'avais pas eu le temps d'identifier ce que c'était, et comme cette odeur avait disparu je décidai de ne pas m'en préoccuper plus que ça. Mais je restais tout de même sur mes gardes. Et en me serrant la main, il laissa échapper une nouvelle fois une phrase dont je n'étais pas sur d'avoir pleinement saisi le sens. A quel point j'étais prêt à le servir ? Soit il se servait de mon ironie, soit il y avait une part de vraie dans ce qu'il disait. Et vu le nombre d'annotations qu'il avait faite, qu'elles soient exprimées à voix haute ou muette, je pariais sur la deuxième option. Ce qui me fit perdre toute trace de sourire provocateur et me fit recouvrir mon sérieux. Avec une impressionnante rapidité qui m'étonna moi-même à vrai dire. Je n'avais plus tellement envie de rire, même pour provoquer mon interlocuteur.
-Pas très loin j'en ai bien peur. Mais j'ai l'impression que quelque chose est attendu de moi, je me trompe ?
Puis regardant Leann, je me rappelai vivement que cette dernière m'avait fait part d'une information très importante plus tôt, et qui témoignait que mon apprentissage avait porté ses fruits. Me tournant alors complètement vers celle-ci, faisant fi de l'amant distant, je tentai de sourire. Mais étrangement, seule une vague grimace qu'on pourrait difficilement considérer comme joyeuse étira mes lèvres. Que m'arrivait-il ? J'avais un manque soudain d'entrain que je ne comprenais pas et que je n'arrivais pas à m'expliquer. Mais cependant je pris quand même la parole, avec un manque d'enthousiasme à travers lequel je ne me reconnaissais pas. Quelque chose clochait clairement....
-Alors Leann, tu m'as parlé d'un lycan que tu as affronté non ? Qu'en est-il ?
Spoiler:
HRP !
J'ai posté avant Leann car cette dernière me l'a demandé, étant donné que dans nos post on ne lui as pas laissé énormément de marge de réponse. Donc voilà ^^
La louve avait finalement abandonné l’idée de prendre part à la conversation entre les deux hommes. Et plus elle y réfléchissait, plus elle se disait que son intervention n’allait pas plaire à Jilan et peut-être même à Bran. Le premier, parce qu’elle en avait peut-être un peu trop dit sur le second. Puisqu’il ne lui avait pas demandé de lui répondre autant de choses. Peut-être qu’elle n’aurait pas dû prendre autant la défense du jeune loup ? Mais elle savait que si elle ne lavait pas fait, sa bête intérieure aurait grondé et fait valoir ses droits. Quant à Bran, peut-être qu’il n’allait pas apprécier de voir qu’elle ne le laisser pas se débrouiller seul ? Si seulement elle pouvait être dans leur tête et savoir ce qu’ils pensaient à ce moment précis, cela l’aiderait surement pas mal. Mais ce n’était pas encore une de ses capacités et elle doutait que cela ne le devienne un jour. Son amant lui confirma ses pensées lorsqu’il prit la parole pour s’adresser à elle, ce à quoi elle répondit par un faible haussement d’épaule. A la fois d’excuse et de « tant pis c’est trop tard ». De toute manière, il n’avait qu’à pas s’adresser à elle s’il n’avait pas voulut qu’elle ne lui réponde. Quand ce fut au tour de Bran de parler, et surtout qu’il s’avança vers le jeune professeur, Leann ne pu s’empêcher de faire un mouvement de côté pour s’approcher du duo improvisé. Si elle ne faisait pas confiance à Bran ? Ce n’était pas tout à fait ça mais elle craignait qu’il ne se passe quelque entre eux. Que ce soit l’un ou l’autre des hommes qui commencent. Devait-elle les laisser agir comme des grands ? Ou au contraire intervenir dès maintenant ? Se retenant de soupirer, elle se dit qu’elle allait leur faire confiance, à l’un comme à l’autre. Et surtout parce qu’elle doutait que Jilan apprécie vraiment qu’elle puisse se mêler de cette conversation. Après tout s’il était venu, c’était bien pour rencontrer Bran non ? A cet instant, un déclic se fit dans l’esprit de la lycanthrope. Pour le rencontrer ? Parce qu’il était celui qui était à l’origine de son amélioration dans son art du combat ? Ou parce qu’elle lui avait fait part du fait que le lycan était de son côté ? Plutôt penché vers l’organisation rebelle de la ville ? Si c’était effectivement le cas, se pourrait-il, qu’il soit en train d’essayer de tester les capacités de Bran ? En plus de son mental ? Comme il avait pu le faire avec elle ? Des semaines plus tôt ? Cette idée faillit lui faire lever les yeux au ciel tellement elle lui paraissait évidente maintenant qu’elle y pensait. Et elle, elle venait de... Si elle ne recevait pas de remontrance pour la prise de défense de son ami, elle pourrait surement être heureuse. Son attention fut alors portée sur les deux mains, tendues, des hommes. L’espace d’une seconde elle cru voir quelque chose dans celle de son amant. Mais cela ne dura pas assez longtemps pour qu’elle ait une certitude sur ce qu’elle avait pensé voir. Elle prit donc cela pour un reflet quelconque avec les quelques rayons de soleil qui filtraient d’entre les arbres. A moins qu’elle ne soit en train de chercher des explications et excuses pour ce que préparait Jilan ? Elle lui faisait confiance, mais sa partie lupine montrait déjà les crocs. La suite des évènements allait être drôle si elle commençait vouloir protéger Bran de son interlocuteur... Leann fit rapidement taire sa bête intérieure. Le loup était assez grand et puissant pour se défendre seul devant un seul ennemi. Même si de son point de vue, son amant ne constituait pas l’ennemi. Sauf que, quelques secondes après que leur main se soit quitté, elle senti quelque chose du côté de son ami. Elle ne pouvait pas prétendre reconnaitre et sentir toutes les émotions de manière certaine, mais elle n’en restait pas moins réceptive à ce genre de chose. Comme tous les lycans, canidés ou félins. Le changeant qui s’opéra en lui était bien trop brutal et différent de ce qu’elle avait déjà pu percevoir chez lui. Le regard de la jeune femme se dirigea alors aussitôt en direction de Jilan et la prise de parole de ce dernier lui donna raison pour ce qui était du fait de le tester. Qu’est-ce qu’il avait bien pu lui faire ? Elle savait qu’il pouvait guérir les blessures, mais elle ne lui avait jamais demandé s’il possédait d’autres dons... Peut-être qu’elle aurait dû. Plus les secondes passaient et plus elle sentait quelque chose de sombre grandir chez son ami. De la mauvaise humeur ? De la violence ? En temps normal, le deuxième point n’était pas mal mais le premier. Leann n’avait pas le souvenir d’avoir déjà vu Bran de mauvaise humeur, surtout en sa présence. Sa prise de parole la fit sortir de ses pensées et elle en avait presque oublié ce qu’elle lui avait avoué. Le lycan ? Ah oui...
« Il est mort. Le cœur presque arraché... » Oui, elle ne s’attarda pas spécialement dessus parce que l’état de son ami lui paraissait être en train de s’aggraver. « Bran ? Ton loup s’agite vraiment... »
Elle le sentait bien proche de la surface, et même si elle savait qu’ils étaient en entente plus ou moins commune, elle savait aussi qu’il y avait des moments où le loup pouvait prendre le dessus. Sans qu’on ne puisse l’en empêcher. Si c’était le cas maintenant, cela la rassurerait presque, de voir que même les lycans de naissance pouvaient être comme les autres. Mais pour le moment, la jeune femme se déplaça lentement pour se mettre devant Jilan. Un coup d’œil à ce dernier lui fit comprendre qu’elle ne voulait pas qu’il bouge. Chose qu’il prendrait surement mal, compte tenu du fait qu’il n’aimait pas recevoir d’ordre. Mais elle ne tenait pas non plus devoir se battre contre Bran tout en essayant de le protéger, lui. Il devait probablement en avoir conscience. Du moins, elle l’espérait. Mais peut-être que le jeune loup n’allait pas apprécier qu’elle prenne maintenant la défense de son amant ? Prendrait-il cela comme une marque de défis ? Si tel était le cas, elle était prête à se battre. Ce ne serait pas la première fois qu’ils échangeraient des coups ! Son calme à elle était revenu. Bien que sa propre bête essayait doucement de se frayer un chemin vers la sortir pour inciter celle de Bran à en faire autant. Dans le fond, peut-être qu’il irait mieux une fois sa bête déchainée ? Quoi que ce serait probablement risqué de la libérer.
La rapidité avec laquelle le sourire provocateur du garçon disparut de ses lèvres, surprit grandement le Lightness. Se pourrait-il que son interlocuteur soit finalement autre chose qu'un gamin immature et insolent au possible ? Etait-il capable de faire preuve de sérieux lorsque la situation l'exigeait de lui ? Dans le fond, c'était une bonne nouvelle à prendre en compte mais Jilan préférait ne pas se réjouir trop vite. Qui sait, peut-être que l'ami de Leann ne serait jamais le sien ? Le jeune professeur se connaissait bien, il n'accordait pas sa confiance à n'importe qui, surtout du fait de la position qu'il occupait au sein des rebelles. Si le dénommé Bran réussissait le test et intégrait leurs rangs, il ne lui faudrait pas beaucoup de temps pour se rendre compte de la place que prenait le Lightness au sein du groupe armé. Raison de plus pour s'assurer qu'il était fiable, parce qu'il connaissait son visage de surcroît. Et avec la louve qui venait de lâcher son prénom... Toutes ces réflexions faillirent lui arracher un soupir exaspéré, une chance que le garçon reprit la parole à cet instant. Pas très loin ? Qu'entendait-il par là exactement ? Il fallut un peu de temps à Jilan pour réaliser que le lycan venait simplement de répondre à sa précédent pique. Sérieusement ? Il daignait lui donner un début de réponse alors même que le jeune professeur ne savait pas encore dans quel camp le placer ? Leann avait beau dire, s'il ne le voyait pas tuer un humain sous ses yeux, le Lightness doutait de pouvoir adopter le même point de vue que son amante. Et l'âge du concerné ne jouait pas en sa faveur non plus, qu'importe l'angle sous lequel on présentait les choses. S'entraîner entre membres d'une même race n'était définitivement pas la même chose que rejoindre les idéaux d'un groupe, aussi tranchés soient-ils et enfin, obéir à des ordres qui n'étaient plus les siens. Tout le monde n'était pas capable de se soumettre à l'autorité et Jilan comprenait parfaitement que son physique pourrait plus amuser que convaincre une créature connue pour sa force inégalée... Il allait donc devoir s'imposer face à Bran ou tout simplement lui faire comprendre qu'il n'était pas du genre à plaisanter et que s'encombrer d'individus inutiles à ses yeux ne faisait pas parti de ses projets. Si la situation devait arriver à ce stade, il ne faisait aucun doute que seule une intervention de Leann pourrait sauver la peau de son ami. Mais pour revenir à ce que l'intéressé lui avait répondu, le jeune professeur ne sut pas trop comment le prendre. Malgré le sérieux plus qu'apprécié du garçon, le Lightness avait comme l'impression que son interlocuteur n'était pas disposé à recevoir des ordres de sa part. C'était ennuyant comme prise de position. Les fortes têtes, il préférait les éliminer s'il ne pouvait pas en tirer parti. Est-ce que la louve n'avait pas imaginé le pire scénario en acceptant de les confronter ? Il serait peut-être temps pour elle de réaliser que la mort de son ami était envisageable du point de vue de son amant.
« Tu es plus perspicace que tu ne le laisses voir. En effet, je suis là pour déterminer si tu serais utile pour notre groupe, ou meute si tu préfères. Leann a prétendu que tu possédais la même vision de cette ville que celle que j'ai, à savoir, une ville peuplée d'idiots qui croient en une paix imaginaire. A toi de me le prouver. »
Ce fut volontairement qu'il n'ajouta pas de pistes pour guider le loup concernant les façons possibles de lui prouver qu'il ferait un bon rebelle. Le jeune professeur n'avait pas l'intention de lui révéler qu'il était déjà en train de le tester, et ce, sans que le principal concerné ne s'en rende compte. C'était là tout l'intérêt de la chose et Jilan était impatient de voir quelle serait la réaction de la bête tapie au fond de la conscience du garçon une fois qu'elle serait suffisamment proche de la surface. Allait-il subitement se mettre à agir comme Kyarra l'avait démontré sous ses yeux plusieurs mois auparavant ? Peut-être que son amante se sentirait obligée d'intervenir pour éviter que son ami ne se jette sur lui ? Difficile de savoir si les instincts bestiaux prendraient le dessus sur l'amitié qui liait les deux lycans. Quand bien même, si jamais la situation venait à dégénérer, le Lightness se tenait prêt à intervenir. L'espérance de vie de Bran résidait dans un claquement de doigts. Quelque chose de sombre sembla s'agiter dans l'être du garçon. Sa bête peut-être ? A moins que son humeur ne se dégrade pour de bon ? Puisque l'orbe était directement au contact de la victime, le mécanisme ne prendrait que quelques minutes avant de s'attaquer à l'énergie vitale de la cible. Il était possible que le loup tapi en lui se manifeste pour tenter de défendre son hôte ? Le jeune professeur ne put s'empêcher d'afficher un sourire satisfait en voyant l'évolution de l'influence de la petite sphère sur leur interlocuteur. La voix de Leann le tira de ses pensées. La pauvre petite s'inquiétait pour son ami ? Comme c'était touchant ! Elle aurait dû y penser avant d'accepter sa venue.
« Laisse le faire Leann. Je veux voir ce qu'elle vaut la peluche. »
Mon changement d'humeur avait beau être particulièrement préoccupant, ça ne m'empêchait pas de remarquer certaines petites choses. Premièrement, lorsque je m'étais approché de Jilan pour lui tendre la main, Leann avait fait un pas dans sa direction. Inutile de dire que c'était pour protéger son cher ami. Ce qui, par ailleurs, voulait surement dire que ce dernier n'était peut-être pas aussi rapide ou fort que nous, lycans. D'ailleurs, de ce que j'en savais, aucune espèce de ce bas monde n'était aussi fort qu'un loup surtout lorsqu'il était transformé. Quoi que ce Jilan soit, il était surement pas assez rapide et fort pour me battre en duel singulier. Mais cela ne voulait pas forcément dire qu'il était sans défense. D'ailleurs, c'est ce que ma seconde constatation m'apprit. Car lorsque mes changements d'humeur brutales commencèrent, la louve à la chevelure violette à laquelle je m'étais attaché avait regardé son amant avec un regard pour le moins surpris. Après bien sur s'être mise entre le non-humain et le loup que j'étais. Surement devait-elle percevoir d'une manière ou d'une autre ma profonde agitation intérieure qui pourrait, en effet, être préjudiciable à son petit-ami. Et par ailleurs, cela voulait aussi dire que ce que j'avais perçu en un coup de vent n'était pas si anodin que ce que je croyais l'être, et était bien le responsable de ce qui était en train de m'arriver. J'espérais juste qu'il ne le regretterait pas..
Toutefois, même si je sentais mon humeur se dégrader, ce n'était pas pour autant que je n'allais pas tout faire pour garder mon calme aussi longtemps que possible. Je fermai les yeux alors que j'écoutais Leann me raconter très brièvement ce que voulait dire ses précédents mots. Elle avait donc arracher le coeur d'un autre lycan. Pourquoi ? Dans quelles circonstances ? Mais l'écouter devenait de plus en plus difficile, alors qu'à l'intérieur de mon esprit, un combat pour la domination était en cours. Et le loup était en train de gagner. Il ne fallait pas lui en vouloir, je venais de me faire plus ou moins magiquement empoisonné -pour me tester avait dit le dénommé Jilan ? D'ailleurs si je comprenais bien, celui-ci avait une place importante dans le groupe des Rebelles, et sa présence ici avait pour but de s'assurer que j'étais de leur côté, comme le lui avait surement dit la louve qui l'accompagnait. Etait-il encore en train de douter à cause de mon jeune âge ? Cependant, toutes ces préoccupations n'atteignaient pas le loup, qui était de plus en plus désireux de faire surface. Si j'avais ouvert mes yeux, surement auraient-ils été de cette couleur dorée qui était le signe de la proximité de la bête. Mais les dernières paroles du non-humain attisèrent un peu plus la flamme du loup à l'intérieur.
Je peux nous protéger. Je vais nous protéger. Tu réfléchis trop.
C'était les paroles du loup, avant qu'il ne m'arrache le contrôle de mon corps. A cause de ce que Jilan m'avait fait, mon contrôle sur mon loup en avait été affaibli. Mais je lui faisais confiance. Je me transformai alors en l'énorme loup blanc d'un mètre cinquante que j'étais, et toute la mauvaise humeur que je renfermais fis surface comme une explosion de violence. Mais le loup était meilleure que l'humain pour gérer toute cette violence, car c'était dans sa nature. Je montrai les crocs en direction de l'homme et grognai brièvement. Mais je fus interrompu par Leann qui, à son tour, avait opté pour la transformation. Tenait-elle tant à protéger ce petit prétentieux qui m'avait provoqué ? Tenait-elle tant à lui ? Il était peut-être tant de vérifier, et par la même occasion de montrer à Jilan que je n'étais pas juste une peluche incapable. Je me jetai alors sur lui, mais comme je le pensais, Leann m'intercepta et nous roulâmes à terre quelques secondes. S'en suivit un bref combat durant lequel elle réussit à m'entailler les flancs et à mordre mon épaule. Elle était sérieuse, et voulait vraiment défendre l’homme qui se tenait à l’écart. Cependant j’étais plus expérimenté qu’elle, plus fort, et mes sens me donnaient un certain avantage. Au bout de deux minutes de bagarre acharnée, je pris le dessus et plaquai Leann au sol, l’immobilisant sous mon poids. Je grognai deux secondes, puis comme à l’entraînement, je lui mordis gentiment la truffe pour lui signifier que c’était terminé. Suite à cela, je la laissai se relever en m’éloignant un peu. Bien, elle faisait confiance à Jilan, et tenait à lui. Et même si le loup avait très envie de lui arracher la tête, il ne prendrait cependant pas le risque de blesser sa sœur, pas même ainsi. Je reniflai avec mépris, mais cependant, je consentis à reprendre forme humaine. Ce serait dur de parler ainsi.
Mais pour une obscure raison, ma transformation ne fut pas quasi-instantanée comme elle aurait du l’être. Elle prit presque une minute entière pour s’accomplir, et fut extrêmement douloureuse. Mais je ne poussai pas le moindre cri pour autant, me remettant debout comme si de rien était, ignorant la douleur dans mes membres et mes articulations. Et je me sentais un peu faible. Cependant, bien que j’avais repris forme humaine, mes yeux étaient toujours doré. Me tournant alors vers le lightness, je tentai d’agir comme si de rien était. Gardant mon sérieux, je soupirai et me lançai.
-Donc c’est un test de recrutement pour les Rebelles c’est bien ça ? Désolé mais j’aimerais couper dans le vif du sujet. Je vois bien que mon âge vous pose clairement un problème, mais cela ne change rien à ce que je pense. Je n’ai peut-être que 17 ans, mais j’ai déjà tué auparavant, et ça ne me pose aucun problème : à bien des égards je ne suis plus un enfant. Et j’aurais très bien pu vous briser la nuque en une seconde lorsque je vous ai tendu la main, mais Leann semble tenir à vous et vous faire confiance. Je ne vous fais pas confiance, mais je fais confiance à Leann. Donc venons-en aux faits : que dois-je faire pour vous prouver mon implication à la cause ?
Plus le temps passait, plus je me sentais faible. Mes forces m’abandonnaient petit à petit. A cette vitesse, dans environ une demi-heure je serais pompette et incapable de faire quoi que ce soit.
-Par ailleurs, il serait plaisant que vous arrêtiez ce que vous êtes en train de me faire. Je n’apprécie pas forcément de me faire pomper mon humeur et mon énergie.
L’ordre de Jilan comme quoi elle devait laisser faire le jeune lycan ne fut pas très bien apprécié, bien qu’elle ne le montra pas. Elle allait l’écouter mais ça ne lui plaisait pas qu’il ne prenne pas plus au sérieux que ça Bran et la menace qu’il pouvait représenter. A moins qu’il n’ait un moyen sûr et efficace pour se défendre ? Sans tuer le lycan ? A cette idée, Leann faillit avoir un frisson dans le dos. Jilan, se retenir de tuer alors que sa vie pourrait être en danger ? C’était surement la meilleure idée de l’année ! Ce qui ne lui plaisait encore moins de se souvenir de ce petit détail technique. Surtout qu’elle doutait fortement que Jilan prenne la peine de s’occuper de ce qu’elle pourrait ressentir s’il finissait bel et bien par tuer Bran. Mais toute l’attention de la jeune femme quitta son amant -et les pensées qui allaient avec- pour se porter vers son ami. Bien qu’aucun signe n’était encore visible sur le corps du loup, il ne faisait aucun doute que sa bête était beaucoup trop proche de la surface qu’à son ordinaire. Il maintenait un meilleur contrôle sur son autre partie, d’habitude. Un coup de Jilan ? L’envie de lui demander ce qu’il avait fait pour parvenir à un tel résultat brula les lèvres de Leann. Mais cette dernière se retient d’ouvrir la bouche. Elle l’interrogerait une fois que la situation se sera calmée. Et bien qu’elle gardait en mémoire ce que lui avait dit Jilan, elle commença cependant à transformer ses mains, puis ses avants bras. Pour le moment, seul son amant pouvait en avoir connaissance de façon visuelle, puisqu’elle avait mit les mains derrière son dos. Allait-il prendre la parole pour l’empêcher de continuer ? Ou au contraire, la laisserait-il faire ? Peut-être pour voir ce qu’elle donnait une fois sous forme lupine ? Jusqu’où elle pourrait aller, face à son ami, pour lui ? Du Diable si elle le savait ! Elle n’avait pas la rapidité de métamorphose de certain autre lycanthrope et elle ne souhaitait pas être prise par le temps, si elle devait agir. Et le professeur pouvait dire ce qu’il voulait, elle ne pouvait tout bonnement pas rester sur le côté, à regarder Bran lui sauter dessus. C’était tout bonnement impossible. Et tant pis s’il venait ensuite l’engueuler pour ne pas l’avoir écouté. Elle était prête à subir ses remontrances. En entendant le grognement, qui était tout dirigé vers Jilan, la louve y répondit bien qu’encore sous sa forme humaine. Le grognement n’était pas aussi imposant, du fait que ses cordes vocales n’étaient pas encore faites pour ce genre de chose, mais on pouvait nettement entendre qu’il s’agissait d’une mise en garde. Contre Bran. Quand elle le vit bondir dans leur direction, en fixant l’homme qui était derrière elle, Leann ne tient plus et prit forme lupine. Faisant fi de la douleur qui lui transperçait le corps sous le changement de place de ses muscles et os, du bruit sonore que cela entrainait, elle heurta le loup de plein fouet. Lorsqu’ils touchèrent terre, il ne restait plus que ses cheveux violets encore visibles mais qui disparaissaient petit à petit sous son pelage gris tacheté de noir. Elle ne perdit pas de temps en voyant dans les yeux de son ami cette envie de retourner vers Jilan. Il en était hors de question. Quoi qu’on puisse lui dire, si elle était là, elle ne laisserait personne s’en prendre à lui. Quoi que ce soit. Et bien que plus petite que le loup blanc, la lycanne ne se démonta pas et parvient même à le blesser, tâchant de rouge ce blanc immaculé. Peut-être qu’elle aurait pu s’en féliciter si la situation était autre. Sa louve intérieure n’était pas tout à fait d’accord pour lui porter de véritables coups mais Leann ne voulait pas non plus lui laisser la possibilité de prendre le dessus sur elle. Chose qui finit cependant par arriver. Ses grognements menaçants avaient encore retentit alors que son adversaire du moment la plaquait au sol. Encore un exemple du fait qu’elle n’était pas encore experte dans l’art du combat. Bien qu’elle savait se défendre et attaquer, elle avait encore à apprendre et la situation le montrait parfaitement. Ce qui la frustrait presque maintenant. Le fait qu’il vienne la mordiller sembla calmer Leann, parce qu’elle avait conscience qu’il n’agirait pas ainsi dans un vrai combat. Elle gronda cependant une dernière fois, pour lui faire comprendre son mécontentement suite à son comportement. Elle se dégagea rapidement de sa prise sans le quitter des yeux et sans trop s’éloigner de lui. Il n’avait plus cet air de prédateur au fond des prunelles mais encore une fois -bien qu’il restait un petit quelque chose qui ne lui plaisait pas, elle ne voulait prendre aucun risque.
En le voyant reprendre forme humaine, Leann revient auprès de Jilan, comme un parfait petit chien, bien dressé qui revient près de son maître. Bien que la comparaison avec un animal dressé de ce genre ne lui plaisait pas tant que ça, elle devait reconnaitre que ce n’était pas totalement faux. Bien qu’elle savait encore mordre comme bon lui semblait. Et le fait de ne pas être restée à sa place initiale allait surement lui attirer des pépins. Tant pis. Elle finit par s’asseoir près de jambes de son amant, bien qu’elle lui arrivait tout de même à hauteur de hanche. Petite mais toujours plus grosse qu’un chien normal. La jeune femme ne perdit pas une miette de la transformation en sens inverse de son ami et elle nota une chose qu’elle n’avait encore jamais vu chez lui : le temps de métamorphose était plus long. Parce qu’il semblait fatigué ? Lorsqu’il finit par être nu devant eux, elle ne pu s’empêcher de penser que Jilan allait surement faire une remarque là dessus. Mais peut-être qu’elle se trompait ? Qu’il n’allait pas également jouer les provocateurs de ce côté-ci ? La jeune louve écouta les propos qui suivirent. Elle piqua légèrement sur une chose : il avait déjà tué ? S’il parlait ainsi, c’était qu’il s’agissait d’humain. Or, elle ne se souvenait pas qu’il lui en ai déjà parlé. A moins qu’elle n’ait oublié ? Non, ils s’étaient dit qu’ils se retrouveraient pour tuer un humain ensemble, pour une première fois... Bref, elle sorti de ses pensées pour écouter la suite. Qu’il dise à haute voix qu’il avait remarqué qu’elle tenait à Jilan, n’était peut-être pas une bonne idée. Puisqu’il n’y avait pas ce genre de sentiment du côté de son amant. Ses oreilles se baissèrent légèrement vers l’arrière à cette pensée avant qu’elle ne secoua sa tête lupine pour quitter ses songes. La suite l’aurait faite sourire si elle avait été sous forme humaine. Il lui faisait confiance ? Alors qu’elle venait de l’attaquer ? C’était une bonne comme une mauvaise chose. Heureusement qu’elle n’était pas du genre à se servir des personnes comme des pions ! Par contre, qu’il avoue ne pas avoir confiance en Jilan, bien que dire la vérité était surement la meilleure idée, elle ne savait pas trop si cette information allait plaire à l’intéressé. A tous les coups, apprendre qu’un subordonné ne lui faisait pas confiance, cela allait mettre le bordel, plus qu’il n’était déjà présent ! A moins que le professeur joue sur le fait que Bran faisait confiance à Leann ? Chose qui n’était que peu probable, compte tenu du fait que Jilan lui-même ne lui faisait pas entièrement confiance. Un vague grondement monta dans sa gorge avant qu’elle ne baisse la tête comme pour s’excuser pour sa petite intervention non demandée. Pour le reste, elle resta calme et attentive. Peut-être qu’elle pourrait même reprendre forme humaine à son tour ? A cette idée, elle senti sa bête s’agiter. Elle était étrangement calme et sage alors si elle devait déjà retourner au fin fond du corps de la jeune femme, se serait surement après une lutte de domination. Dans ce cas, Leann consenti à rester sous forme animale. Sauf peut-être si l’un ou l’autre des deux hommes lui demandait son avis sur quelque chose. Auquel cas, elle devrait redevenir humaine pour répondre.
De là où il se trouvait, Jilan pouvait parfaitement sentir et apercevoir les changements provoqués par le pouvoir de l'orbe sur son interlocuteur. Ce gamin allait enfin comprendre ce qu'il en coûtait de se mesurer au chef des Rebelles. Car même si la force physique resterait sa principale faiblesse à l'encontre de nombreuses autres races, le Lightness ne voulait pas se limiter à la seule utilisation de ses méninges pour se faire respecter de ses recrues. En dehors de sa capacité à régénérer les blessures physiques contre sa propre énergie, le jeune professeur savait tout à fait de quoi la petite sphère transparente était capable et il n'hésiterait jamais à s'en servir pour s'imposer en face d'un futur membre un peu trop sûr de lui. Le louveteau était en train de l'apprendre à ses dépends et il était plaisant de voir comment il tentait de rester maître de lui tout en étant soumis au pouvoir néfaste de l'orbe sur son organisme. Même sans que l'intervention de Leann ne soit nécessaire, le Lightness sentait à quel point cette chose, cette bête tapie au sein de son être, se trouvait proche de la surface. Et l'excitation de la voir à l’œuvre ne fut plus que plus grande. Quel dommage qu'il n'y ait aucune sorte de gibier pour l'adolescent car Jilan ne s'incluait nullement dans les proies potentielles de l'intéressé. A ce sujet, il valait mieux pour Bran qu'il ne tente rien de dangereux dans sa direction où il pourrait bien perdre quelques membres ou organes avant même d'avoir atteint sa cible. Le jeune professeur ignorait jusqu'où la capacité d'absorption de l'orbe avait pu aller mais il ne faisait aucun doute que s'il décidait de la faire exploser d'un claquement de doigt, puisque l'objet se trouvait à l'intérieur du loup, les dommages seraient considérables. La transformation du garçon le prit par surprise puisqu'il faisait des efforts monstres pour demeurer calmer. A moins que ça ne soit la forme lupine de l'intéressé, laquelle était réellement haute comparé à ceux de son espèce, qui avait pris de court le Lightness ? En effet, il n'avait encore jamais vu de loup blanc dans l'Avventura ou parmi les Rebelles. Dans son esprit, la déduction s'était faite, comme quoi, les lycans étaient généralement bruns ou noirs sous leur forme animale. La surprise se mua alors en vif intérêt, lequel était bien entendu alimenté par la taille imposante de la bête transformée. N'ayant jamais vu son amante sous sa seconde forme, et ce, malgré les affirmations précédentes de cette dernière, le jeune professeur n'avait qu'un unique moyen de comparaison : Kyarra. Leur rencontre datait un peu mais si ses souvenirs étaient exactes -et il n'en doutait pas le moins du monde-, même sa partenaire de chasse n'était pas aussi imposante en terme de gabarit. Restait à voir si la sauvagerie de Bran égalerait celle de sa mentor.
Le fait que l'animal montra soudain les crocs à son intention ne lui arracha qu'un froncement de sourcils. Voulait-il jouer à ce petit jeu là ? Si c'était le cas, son espérance de vie s'en trouverait grandement réduite. Qu'en penserait Leann ? Prendrait-elle mal le fait que son amant ait tué de sang-froid le lycan qui l'avait entraînée et qu'elle considérait comme un ami ? Jilan n'eut pas le loisir de s'attarder davantage sur la question que le loup passait à l'action. Il vit très distinctement l'animal bondir sur lui et au moment ou le Lightness se décidait à utiliser son dernier recours, voyant sa vie menacée, l'intervention de la louve survint au bon moment. Elle ne mentait donc pas quand elle affirmait vouloir rester à ses côtés en tant que garde du corps... Les deux masses poilues roulèrent sur le sol, formant un étrange duo aux pelages bien différents l'un de l'autre. Des grognements s'échappaient de temps à autre, meublant le silence lourd de conséquences qui avait peu à peu remplacé le semblant de conversation aimable entre les trois interlocuteurs. Le jeune professeur ne perdit pas une miette du combat qui se déroulait sous ses yeux. Qu'importe le vainqueur, il avait finalement l'opportunité de vérifier les capacités de chacun des lycans. Dans le même temps, cela lui permettait de tester quels étaient réellement les effets de l'orbe sur le mental des représentants de cette race. D'ordinaire, on les décrivait comme particulièrement violents et instables, du fait de leur nature lupine ancrée en eux. Jilan s'était toujours interrogé à ce sujet, pour savoir s'il prenait consciemment des risques en employant la petite sphère transparente sur l'un d'entre eux, entraînant par là une accélération de l'apparition de la bête. Et c'était bel et bien le cas, une chance peut-être que le dénommé Bran semblait posséder un peu de contrôler sur sa partie lupine. Le combat s'acheva un peu trop rapidement à son goût d'autant que Leann ne parut pas en sortir victorieuse. Manque d'expérience peut-être ? Le Lightness réalisa alors qu'il allait devoir se heurter à un choix difficile : éliminer le louveteau s'il ne présentait pas le moindre intérêt ne lui poser pas de problèmes particuliers mais il perdrait par là, la seule personne capable d'entraîner son amante pour qu'elle devienne plus forte. Lui n'en n'avait pas les moyens physiques, il pouvait seulement la manipuler mentalement. Quant à Kyarra... Sentant son humeur s'assombrir légèrement en se rappelant le départ brutal de la louve, le jeune professeur préféra observer la séparation des deux combattants. Est-ce que ce bref affrontement avait détendu l'adolescent ? Car il se recula aussitôt, sans chercher à arracher la gorge de son adversaire, alors même que Leann s'était placée en travers de son chemin. Comme ils étaient mignons... Jilan attendit patiemment que son amante revienne à ses pieds -chose qui le surprit tout de même- et parvint à ne pas formuler de commentaires concernant le gabarit de cette dernière. Ce n'était pas la taille qui faisait la force. Tandis que l'adolescent reprenait progressivement forme humaine, le Lightness applaudit lentement, trop peut-être pour exprimer des félicitations sincères. Non il ne jouait pas sur l'hypocrisie pour une fois, il informait simplement Bran à travers ce geste, qu'il avait apprécié la tournure des événements. Le tout sans un mot ! Le discours de son interlocuteur redevenu humain -et à présent entièrement nu !- ne tomba pas dans l'oreille d'un sourd mais le jeune professeur avait déjà une réponse tout faite pour lui :
« Ce n'est pas le fait de tuer qui est difficile, c'est savoir quand on doit se montrer discret ou quand on doit se faire remarquer. Si tu tues et que tu te fais prendre par la suite, inutile de compter sur quelqu'un de l'organisation pour te sortir du pétrin dans lequel tu te seras fourré toi-même. Il va s'en dire que vendre tes partenaires pour sauver ta propre peau te vaudra une mort pure et simple. Quant à être capable de me tuer... Comment peux-tu être aussi sûr de toi alors que tu ne sais rien de mes capacités ou de ma nature ? Lycan ou pas, si ce n'est pas de l'arrogance, il s'agit de stupidité de ta part. »
Voilà qui était dit. Concernant la seconde partie de ses propos, Jilan avait conscience d'inclure un peu de bluff dans ses propres paroles mais l'adolescent ne pourrait pas discerner le vrai du faux dans ce qu'il venait d'affirmer, surtout avec l'assurance dont il avait fait preuve. Puisque Bran n'avait pas plus d'informations à son sujet, il lui serait mal avisé de tirer des conclusions hâtives. Mais il restait un dernier point à aborder entre eux et même si la suite des propos de l'adolescent suivit sa réponse, le jeune professeur n'y accorda aucune espèce d'importance. Il était le maître de ce petit jeu, ce serait à lui de décider quand il devrait stopper les effets de l'orbe.
« C'est regrettable que tu ne me fasses pas confiance. J'étais à la recherche de membres sur lesquels compter pour les projets futurs de l'organisation. J'aurai même pu passer outre ton jeune âge et t'accorder une place de choix... Serais-tu rancunier quant au fait que je t'ai testé ? C'est ton droit le plus strict mais si tu n'es pas non plus capable de comprendre que lorsqu'on est à la tête d'un réseau criminel, on ne peut pas se permettre d'accepter les traîtres, ne serait-ce qu'un seul, alors tu ne me seras pas plus utile qu'un chien en laisse. Et je ne prendrai pas le risque de te laisser en vie après ce que tu viens d'apprendre. »
S'il avait arboré une expression sincère et désolée à propos du fait qu'il était déçu de la réaction de Bran à son encontre, le Lightness se reprit bien assez vite, retrouvant un visage neutre et froid, à l'image de l'être qu'il était. Lentement, il porta sa main droit à hauteur de son visage, celle-ci étant légèrement repliée sur elle-même, comme si le jeune professeur s'apprêtait à claquer des doigts. Mais avant de passer à l'action, il reprit, s'adressant cette fois à la louve :
Comme je l'avais escompté, Leann s'était interposée entre son amant et moi et bien que le combat fut de courte durée, il permit à mon loup d'obtenir les quelques réponses dont il avait besoin. Ceci avait eu pour effet de calmer le loup un tant soit peu, mais assez pour me faire reprendre le contrôle que j'avais plus ou moins perdu. Mon loup n'aurait jamais blessé, ou tué Leann, aussi fou de rage et de colère qu'il ne le soit. Cependant, ce petit test de ma part n'eut pas l'air de faire beaucoup plaisir à cette dernière qui gronda de mécontentement lorsque je la laissai se relever. Je m'excuserai plus tard de mon comportement, mais cela ne signifiait point que je le regrettais pour autant. Par ailleurs, lorsque je laissai la louve tranquille, elle retourna au pied de Jilan comme si ce dernier était son maître, son Alpha quelque part. Et surement était-ce le cas, car je ne connaissais pas grand chose au lien qui les unissait. Mais il semblait bien complexe dans tous les cas. Quant au non-humain, lorsque je m'étais transformé il avait semblé être surpris. Par ma taille ? Ou était-ce quelque chose d'autre encore ? Son regard étonné envers mon pelage me donna un petit indice de la réponse exacte. J'étais un loup blanc énorme, et il était vrai qu'au cours de ma courte vie, je n'avais pas rencontré beaucoup d'autres lycanthropes de ma taille ou qui arborait le même pelage que le mien. Voir aucun à vrai dire. Même mon propre père était un loup d'une noirceur totale, qui n'était pas sans rappeler le pelage d'une certaine Amarra que j'avais rencontré. Amarra, qui était la seule louve à ma connaissance plus imposante que moi-même, et dont la sauvagerie et la bestialité dépassait tout ce que j'avais déjà vu. Elle n'avait aucun contrôle sur sa louve, à l'opposé de moi qui exerçait -en temps normal- un contrôle parfait sur le mien. Ou plutôt, je préférais qualifier ceci d'équilibre, car il n'était jamais totalement possible de contrôler cette bête à l'intérieur de nous, et ce dénommé Jilan avait, semblait-il, un excellent moyen de fissurer ce contrôle. Mais maintenant que je l'avais repris, il était temps de reprendre forme humaine pour taper un peu la discussion avec celui qui n'avait rien fait pour arrêter le combat, même si il avait semblé prêt à réagir lorsque j'avais fait mine de sauter sur lui.
Durant ma transformation, je perçus les applaudissements lents et espacés de l'homme qui me faisait fasse et me demandai pour quelle raison. Peut-être était-ce encore l'une de ses maintes provocations, signe de son ironie flagrante et théâtrale. Mais en observant sa posture, son visage et son odeur, je compris que ce n'était pas le cas. Oh ! ce n'était certainement pas des félicitations, mais non pas des reproches non plus. Mais j'étais bien trop préoccupé à garder un contrôle de fer sur le loup et mes envies de violences pour m'interroger plus sur la signification de ce geste qui aurait pu paraître anodin. Lorsqu'il eu terminé, il ne prit pas la parole pour autant, et je me décidai à le faire. Il sembla m'écouter attentivement. Tout comme Leann d'ailleurs, dont je perçus la surprise puis le mécontentement lorsque je parlai d'abord de mon passé meurtrier, puis de son affection pour l'homme. En y repensant, je ne lui avais jamais parlé de ces deux hommes -les meurtriers de mes parents- que j'avais tué de sang froid. Pour quelle raison ? Peut-être n'y avais-je pas songé lorsqu'elle avait parlé de chasser un humain pour notre première fois ensemble, car je n'avais pas considérer cette tuerie comme une chasse, mais plutôt comme un massacre organisé, planifié. Mais je lui lançai un regard significatif pour lui montrer que j'avais perçu son étonnement et que je me rattraperais plus tard sur cette information. Toutefois si j'étais encore vivant, car je sentais à présent presque nettement la présence de l'orbe à l'intérieur de mon corps qui continuait de me pomper de l'énergie. Je n'eus pas longtemps à attendre la réponse de mon interlocuteur, qui me fit sourire, non pas de provocation ni d'amusement, mais d'entendement. Je comprenais ce qu'il voulait dire par là. Et je comprenais tout à fait la seconde partie de son discours, qui une fois de plus avait pour but de me faire douter de mes capacités à le tuer. Ce qui, cette fois, avait bien plus d'impact maintenant que je goûtais à son "pouvoir" ou peu importait comment il appelait ceci. Il semblait manquer de force -surement d'où la présence de Leann à ses côtés ?- mais ses réflexes étaient bon, et j'étais presque sur que si Leann n'avait pas sauté pour m'intercepter, il aurait réagit d'une manière ou d'une autre. Cependant, la partie ou il mentionna ma mort certaine si jamais je vendais des camarades m'interpella. Il ne savait donc rien des loups ? Ou peut-être en avait-il pas rencontré d'honorables.
Je ne l'interrompis pas cependant, alors qu'il continuait de me répondre, nullement prêt semblait-il à annuler les effets de ce fichu machin qu'il avait mit en moi. Etait-il vraiment étonné qu'après quelques minutes passées en sa compagnie -où il avait passé le plus clair de son temps à me provoquer- je ne lui fasse pas confiance ? Je fis fis de sa dernière menace sur ma vie, alors qu'il semblait interroger Leann sur son opinion. Il se préoccupait peut-être de savoir si cette dernière avait quelque chose contre le fait qu'il me tue. Et j'étais curieux de savoir sa réponse vis à vis de cela, mais pas au point de risquer de mourir sur un malentendu. Cependant, comme il l'avait faire remarqué, il avait néanmoins laissé échapper de nombreuses informations à propos de son rôle au sein des Rebelles. Dont il semblait être le chef, et -naturellement- un recruteur qui était venu tester une potentielle nouvelle recrue. Comment s'attendait-il à ce qu'un lycan, fier et orgueilleux, s'agenouille devant lui sans même avoir reconnu sa force auparavant ? Attendait-il de ses recrues un tel assujettissement dès les premières rencontres ? Surement pas. Cependant, si il dirigeait cette organisation criminelle comme il semblait le prétendre -et je n'avais aucune raison d'en douter- alors je comprenais mieux son assurance. Surement avait-il eu déjà affaire à des êtres qui s'étaient crus supérieurs à lui grâce à leur avantage physique, et s'en était-il débarrassé. Quoi qu'il en soit, c'était à mon tour de prendre la parole, sans attendre la réponse de Leann qui était restée pour l'instant assez calme et sous forme lupine. Elle prendrait au moins quelques secondes à redevenir humaine si elle voulait répondre, ce qui m'en laissait largement le temps. Poussant un soupir, je regardai droit dans les yeux mon interlocuteur avec un sérieux bien loin de la puérilité que pouvait me conférer selon certain mon jeune âge.
-Eh bien, effectivement ça en fait des révélations. Mais j'ai quelques points à éclaircir, étant donné que maintenant je suis bien mieux au courant de la situation. Premièrement, lorsqu'un loup chasse, il ne grogne que si il ne veut se faire repérer. La discrétion, ou son manque, n'est pas un problème pour moi. Mais vous aurez peut-être l'occasion de vérifier cela par vous-même, comme vous semblez aimer les tests. Par ailleurs, je ne sais pas quels loups vous avez déjà rencontrés jusqu'à présent, mais pour ma part, je ne vends pas les miens. Question d'honneur et de fierté. Comme vous l'avez remarqué, bien que j'ai momentanément perdu le contrôle de moi-même, je n'ai pas pour autant tué Leann.
Prenant une brève pause pour respirer, j'enchaînai par la suite sans lui laisser le temps de répondre.
-Et il semble qu'on se soit mal compris. Certes je ne vous fais pas confiance pour l'instant, cela n'inclut pas que je ne vous respecte pas. Bien que vous soyez dépourvu de notre force physique, je conviens que vous avez de quoi largement compenser cette "faiblesse" si l'on puis dire. Et je respecte cela. Truc de loup : ne vous attendez pas à ce que je vous suive si je ne suis pas au courant de ce que vous êtes capable de faire. Et c'est maintenant le cas. De même qu'un chef a le devoir de tester ses recrues, une recrue a selon moi le devoir d'au moins une fois tester son chef. Ce que je viens de faire. Il aurait été bien stupide de faire confiance à un étranger après quelques minutes passé avec celui-ci, non ?
Je ne savais pas si ma réponse allait changer l'avis de mon interlocuteur, mais si ce n'était pas une manière indirecte de lui signifier que j'étais prêt à rejoindre son groupe et l'accepter en tant que chef, je ne voyais pas franchement ce que je pouvais faire d'autre pour lui. Le manque de confiance ne signifiait pas forcément le manque de loyauté, et la confiance ne s'obtenait pas en un claquement de doigt. Mais avec le respect, la loyauté et le temps, tout venait à point. Et c'était tout ce que je pouvais lui accorder pour l'instant.
Le moins que l’on puisse dire, c’était que l’applaudissement de Jilan surprit ses deux interlocuteurs. Il était assez rare de le voir agir de la sorte. A moins, qu’il n’ait apprécié de voir deux lycans se battre, plus ou moins sérieusement ? Ou le fait que Bran ait réussit à reprendre le contrôle de sa bête ? Pour sa part, Leann aurait pensé que le processus de domination durerait plus longtemps que cela. Mais elle avait oublié le fait qu’il avait toujours vécu avec cette autre partie de lui, et donc, qu’il devait mieux la connaitre pour la dompter. Dans le fond, cela la rassura légèrement. Bien qu’elle ait aimé se battre contre lui, comme toujours, si elle avait dû devenir réellement sérieuse dans l’optique de le tuer, cela l’aurait surement atteinte moralement. Se défendre ou défendre quelqu’un était une chose, qu’elle avait faite. Mais si elle avait été obligée de le tuer pour l’empêcher de mettre en pièce Jilan... Cette pensée lui fit hérisser les poils de son pelage. Tuer son ami pour sauver son amant... Elle se savait n’être pas encore assez forte mentalement pour supporter une telle chose. Peut-être qu’elle allait devoir remédier à ce petit problème ? Après tout, en restant aux côtés du jeune professeur, elle s’était engagée sur une route dangereuse et très probablement mortelle. Peut-être devrait-elle essayer de mettre en pratique ce qu’il avait pu lui dire des mois plus tôt ? Concernant le fait de s’attacher... Mais pour le moment, là n’était pas encore le problème. C’était ce qui était en train de se dire entre les deux hommes. Concernant le fait d’être discret ou non, Leann serait bien intervenue pour lui dire qu’elle aurait pu lui donner cette information lorsqu’ils auraient chassé un Homme. Enfin, elle doutait presque que son avis soit demandé. La suite des propos de son amant la laissait presque dubitative, même si cela ne se voyait pas. Il disait être capable de tenir tête à un lycanthrope ? Alors dans ce cas, pourquoi ne rien lui avoir dit ? Non pas le fait qu’il pouvait être supérieur à elle, mais plus dans l’optique que cela aurait peut-être pu l’aider à devenir plus forte ? A moins que... Cela ne soit quelque chose simplement dû à sa race ? Dans ce cas, il n’y avait aucun intérêt à lui communiquer de telles informations. La suite des propos de Jilan la fit stopper ses propres pensées, elle n’avait aucune envie de louper les paroles de l’un ou l’autre des hommes présents. Et quand le discours de son amant lui parvint, elle senti presque le roussis. Ainsi donc, elle avait vu juste dans le fait qu’il n’acceptait pas le manque de confiance de Bran. Que c’était petit de la part de cet homme, lui qui ne faisait pas non plus confiance à autrui. Qui avait avoué ne jamais la donner entièrement. Mais même en lui jetant la pierre, Leann ne pouvait pas réellement lui en vouloir. Il avait ses raisons, même si elle ne les appréciait pas. Sans qu’elle ne s’en rende vraiment compte, ses griffes étaient depuis quelques minutes déjà en train de pétrir le sol. Comme si elle voulait garder encore l’esprit sur terre et... Ne pas exploser. Perdue trop loin dans l’attention qu’elle portait aux paroles, elle ne s’était pas aperçu que sa bête était en train d’essayer de prendre de plus en plus le contrôle. Si tantôt, Leann n’avait pas aimé que Bran s’en prenne à son amant, la louve intérieure de la jeune femme n’appréciait pas non plus que le contraire se fasse. Il y avait surement des choses qu’elle ne parviendrait jamais à changer entre elles. Mais la question de Jilan lui permit de reprendre ses esprits. Si elle voulait sauver le loup, il n’y avait qu’une seule option : qu’elle redevienne humaine pour communiquer. Cette idée ne plu pas à sa moitié qui laissa échapper un grognement de mécontentement, inaudible pour les deux hommes, puisqu’il s’agissait d’une lutte intérieure.
Alors qu’elle se mettait sur ses pattes, voila que le plus jeune des interlocuteurs ici prenait la parole. Parce qu’il souhaitait plaider sa cause de lui-même ? C’était assez brave, si toutefois il ne creusait pas sa tombe plus rapide. Leann espérait qu’il avait bien comprit qu’il devait peser ses mots en présence de son amant. Du moins, être sûr de s’être bien fait comprendre. Pour plus de respect, la jeune femme s’écarta un peu de Jilan au moment où elle commençait le processus de métamorphose inverse. Que ce soit dans un sens ou dans l’autre, il n’était pas ce que l’on pouvait qualifier de propre. Puisque du fluide corporel s’échappait du corps, les poils lupins tombaient pour être remplacés par la pilosité humaine. Alors que les craquements d’os se faisaient entendre pendant que le lycan parlait, elle essayait de rester attentive à ce qu’il disait. Mais c’était un exercice assez difficile. Outre le fait de la douleur qui irradiait le corps des lupins à chaque transformation, elle était aussi aux premières loges pour les sons. Elle remarqua également une chose, comme Bran, elle mettait plus de temps que tout à l’heure à changer de forme. Mais elle se savait ne pas être fatiguée. Etait-ce parce qu’à l’inverse, précédemment, elle avait commencé le processus au préalable ? Ou était-ce parce qu’elle avait ressenti la nécessité de se changer rapidement en louve, qu’elle avait été plus rapide ? Cette hypothèse fut notée dans un coin de son esprit, si tel était le cas, elle allait pouvoir essayer de jouer là dessus pour les prochaines fois. Elle n’entendit pas toutes les paroles de Bran, mais certaines lui firent lever les yeux au ciel. Il venait d’avouer qu’il avait également testé Jilan ? Elle doutait que cette information joue en sa faveur, puisque l’intéressé n’était pas du genre à aimer ce genre de procédé. Bien qu’elle ne savait pas si elle pouvait communiquer un avis sur la question, puisqu’elle avait suivis le professeur pour d’autres raisons que celles de Bran. Peut-être qu’elle ne voyait pas les dangers que lui semblait flairer ? Faisant fi de cette réflexion qui ne lui apporterait rien pour le moment, Leann finit par être de nouveau humaine et comme l’autre loup, entièrement nue. A cette pensée, elle se maudit de ne pas avoir prit son sac de vêtement. Vu l’état dans lequel était ceux jonchant le sol, elle était bonne pour revenir de nuit pour essayer de ne pas trop attirer les regards. Quelle plaie. Sentant son humeur baisser légèrement, elle ne prit pas la peine de commenter les dires de son ami, pour le moment et s’adressa directement à son amant :
« J’ai besoin de lui. Quoi que tu penses de lui pour le moment, c’est le seul que je connaisse et en qui j’ai confiance, qui puisse continuer à m’entrainer et à mieux connaitre ma bête. Je veux devenir encore plus forte, et il peut m’y aider. »
Sa voix était claire et sûre et même si elle considérait Bran comme son ami, comme un frère, ses sentiments n’avaient pas parlé à cet instant. Ce n’était que de la logique pure et elle savait que Jilan n’était pas stupide pour ne pas le voir. Elle ne pensait pas qu’il avait quelqu’un d’autre sous la main, sinon, il lui aurait déjà présenté et n’aurait pas attendu davantage. Au risque de lui faire perdre du temps sur son apprentissage. Elle pensa très rapidement à Jean-Dame. Il avait combattu probablement plus souvent et avec plus de technique que Bran mais... Cet homme n’était surement pas le meilleur choix compte tenu du camp qu’il avait semblé choisir. Sortant de ses pensées, la jeune femme reprit, toujours en s’adressant à Jilan :
« Il ne te fait pas confiance pour le moment. Ok c’est dit. Mais il ne peut te trahir. Comment je peux en être aussi sure ? Parce que s’il le faisait et qu’il t’arrivait quelque chose, j’en serais blessée et je ne lui pardonnerais pas. » Levant les yeux au ciel devant la difficulté de s’expliquer pour la suite, elle enchaina : « Je ne peux pas t’expliquer avec des mots ce qui nous lie, ça n’a rien de sexuel... Un truc de meute, de loup probablement. Je n’en sais rien... Mais je sais qu’il ne fera jamais rien contre moi... Et par extension, contre toi. »
Et là dessus, elle en était certaine. Ce sentiment n’avait rien à voir avec de l’amour et l’aveuglement qui allait avec. Mais bel et bien d’un sentiment de lien qui les unissait. Leann espérait simplement que son amant allait accepter cette explication, même s’il ne pouvait probablement pas le comprendre. Mais s’il ne pouvait pas le comprendre, allait-il l’accepter ? C’était un homme de sciences après tout.
« Ne perd pas l’opportunité d’avoir deux lycans sous tes ordres parce que tu es septique devant mes paroles, Jilan. »
Lorsqu'il avait posé la question à son amante, Jilan s'était plutôt attendu à ce que l'intéressée reprenne forme humaine immédiatement avec l'intention de lui communiquer une réponse claire. Cependant, la voix de la louve ne lui parvint pas sur le moment, preuve qu'elle avait conservé sa forme animale. Il était certain qu'elle ne pourrait pas parler sous sa forme actuelle, qu'attendait-elle donc pour inverser la transformation ? Venait-elle d'être prise au dépourvu qu'on s'adresse à elle directement ? Pensait-elle vraiment pouvoir demeurer sous sa forme lupine jusqu'à la fin de la conversation alors même que la vie de son ami était en jeu ? Le jeune professeur espérait pour elle qu'elle ne conserve pas cette attitude si elle voulait réellement devenir sa seconde. Certes, il n'appréciait que rarement ses interventions, la discussion entre eux trois en était la preuve. Mais ce n'était pas pour autant qu'il n'avait pas besoin de son avis de temps à autre. Et ce moment était finalement arrivé. D'un autre côté, le Lightness n'avait aucune certitude quant au fait d'obtenir une réponse, peut-être que Leann se contenterait d'une approbation, même silencieuse. Qui ne dit mot consent comme l'enseigne le proverbe. Était-ce vraiment le cas ? Accepterait-elle sans broncher qu'il mette fin aux jours de son ami ? Jilan était partagé entre la satisfaction et la déception : satisfait de voir qu'elle le laisserait achever ce gamin sans rien dire pour s'y opposer mais déçu qu'elle ne cherche pas davantage à prendre parti pour celui qui deviendrait son subordonné indirectement. Puisqu'il gardait à l'esprit que Bran servirait de mentor à son amante afin qu'elle devienne plus forte, ce serait tout de même dommage de gâcher une si belle utilité non ? Mais si c'était bel et bien la décision de la louve... L'intervention verbale de l'adolescent le surprit. Le jeune professeur ne s'attendait pas à ce qu'il défende sa cause de lui-même, bien qu'il y fait remarquer plus tôt au cours de la conversation, que son interlocuteur était parfaitement capable de s'expliquer tout seul, sans que Leann intervienne en sa faveur. Mais en l’occurrence, il risquait surtout de s'enterrer plus vite, avant même que la louve ne donne son avis, si telle était son intention. N'ayant rien de mieux à faire pour le moment, le Lightness se décida à écouter ce que l'autre avait à lui dire... Et il dut reconnaître que le gamin voyait juste sur la plupart des points cités. La chose la plus surprenant restant tout de même le fait qu'il n'ait pas cédé totalement à sa partie lupine, alors même qu'il s'apprêtait à lui arracher la gorge, Bran s'était étrangement contrôlé face à son amie. Jilan aurait pu le critiquer concernant ce détail, comme quoi il n'était pas aussi sauvage qu'il le désirait mais dans le fond, il appréciait l'optique de compter un lycan maître de lui dans ses rangs. Son amante n'avait pas ce problème avec sa partie lupine puisque celle-ci était quasi inexistante aux yeux de son protecteur. Mais dès lors que l'adolescent reprenait la parole, les premiers mots prononcés attirèrent toute l'attention de son interlocuteur. Ils s'étaient mal compris ? Voilà qu'il venait d'activer sa curiosité, parce que le jeune professeur se demandait bien ce que le lycan allait lui sortir par la suite. La surprise dut traverser un bref instant les iris hétérochromes. Bran admettait le respecter à défaut de lui faire confiance ? Alors même qu'il ne lui donnait pas les meilleures raisons du monde pour cela. Le Lightness se mit à réfléchir de plus belle. Devait-il lui communiquer à son tour le fond de sa pensée ?
« Je suis surpris de t'entendre dire ça. Non seulement j'ai voulu te tester mais également te faire une démonstration de force car j'imagine que c'est ainsi que fonctionnent les lycans. Le chef de meute se doit d'être fort pour diriger son groupe. C'est le même fonctionnement chez les rebelles. »
Et à présent ? Où était l'intérêt de lui faire part d'une chose pareille puisqu'il était sur le point de lui ôter la vie ? Lui faire découvrir le second aspect des pouvoirs de l'orbe ?
« J'ai besoin de lui. »
L'intervention de son amante se révéla fortuite. Dire qu'il n'avait même pas remarqué que la louve à ses pieds s'était doucement éloignée de lui pour ensuite reprendre forme humaine. Il fallait croire que l'adolescent avait réussi à attirer son attention un long moment. Était-ce une bonne ou une mauvaise chose pour lui ? La suite allait déterminer quel serait son sort. Jilan jeta un coup d’œil en biais en direction d'où provenait la voix de la jeune femme et s'il ne fut pas surpris de la découvrir nue elle aussi, le Lightness dut prendre sur lui pour ne pas la dévorer du regard. Ce n'était ni le lieu, ni le moment pour cela. Même s'il portait à présent son attention vers Leann, le jeune professeur ne baissait pas non plus sa garde du côté du second loup. La tension qui s'était imprégné dans l'air quelques minutes auparavant semblait avoir disparu mais il se refusait toujours à considérer Bran comme un allié. Il voulait d'abord entendre le point de vue de sa seconde. Ce qui ne tarda pas à arriver. Ses premiers propos ne faisaient qu'exprimer à voix haute ce qu'il pensait tout bas, aussi Jilan n'y accorda que peu d'intérêt. La suite en revanche, réveilla son esprit calculateur. L'idée d'obtenir les services de l'adolescent à travers la personne de son amante lui avait vaguement traversé l'esprit au cours de la conversation, surtout après avoir vu à quel point ils semblaient proches. Mais il ne l'appréciait pas pour autant, puisqu'il comptait beaucoup sur le soutien du lycan. S'il ne pouvait bénéficier que de son aide après l'accord de Leann, autant dire immédiatement qu'il ne lui serait pas utile à lui. Et cela ne lui plaisait pas. Toutefois, sa seconde marqua deux points, à seulement quelques secondes d'intervalles : le premier était qu'elle assurait elle aussi que son ami ne le trahirait jamais, même sans lui faire totalement confiance. Le second, c'est qu'elle lui faisait remarquer, subtilement et en présence de Bran, qu'avoir deux lycans sous ses ordres pour exécuter ses ordres directs ne pouvait qu'être bénéfique pour lui. Restait à savoir s'il accepterait de faire des contres parties afin de ne pas avoir à se débarrasser du jeune loup. Le Lightness garda le silence pendant quelles minutes, pesant minutieusement le pour et le contre dans tout ce qui venait d'être échangé entre eux. Autant la défense de leur interlocuteur que les affirmations de son amante.
« Des paroles bien sages en effet... Très bien. Je te crois Leann et procédons selon tes mots. »
A peine eut-il fini de s'exprimer à son tour, que le jeune professeur exécuta un rapide mouvement du bras vers la droite, lequel se trouva suspendu parallèlement au sol l'espace de quelques secondes, avant de venir reprendre sa place initiale, le long du corps de son propriétaire. En même temps que le membre se mouvait dans l'air, l'orbe jaillit aussitôt du torse de l'adolescent pour venir rebondir dans l'herbe verte sous leurs pieds. Mais au lieu de reprendre la parole pour s'expliquer quant à la suite des événements, Jilan s'approcha lentement de son interlocuteur. En chemin, il récupéra l'orbe, qui disparaissait peu à peu au creux de sa paume. En arrivant à la hauteur du lycan, il l'a fit passer rapidement dans sa main gauche, avec un petit geste tout simple puis dirigea sa main droite vers les blessures sur le flanc de Bran. Celles-ci se seraient très certainement cicatrisées au cours des prochaines heures, du fait de la nature de l'intéressé mais le Lightness voulait apporter une petite nuance dans la perception que devait avoir le garçon de lui. Laissant seulement quelques centimètres entre sa paume et la peau de Bran, le jeune professeur activa son second pouvoir, celui de guérison et une douce chaleur irradia les blessures de l'intéressé, avant qu'elles ne disparaissent totalement en quelques secondes. Preuve qu'elles n'étaient décidément pas bien graves mais le message était passé. Quoiqu'il en soit, Jilan décida d'expliquer son geste, afin d'éviter tout malentendu :
« Comme tu peux le voir, je suis quelqu'un d'exigeant envers mes hommes mais je sais aussi faire preuve de générosité lorsqu'ils le méritent. Je n'attends pas de toi que tu m'apprécies ou même que tu me fasses confiance, seulement de l'obéissance et de la rigueur. Tu as ce qu'il faut pour te faire un nom au sein de l'organisation, ne me déçois pas... » Se reculant alors, le jeune professeur tourna les talons pour prendre le chemin inverse, celui qui le conduirait jusqu'à la lisière du bois pour rejoindre la ville. « Tu peux remercier ma Seconde. Sans elle, tu te serais fais bouffé par les vers. »
Au moment d'arriver à la hauteur de la louve, restée quelque peu en retrait, le Lightness marqua une pause et s'arrêta pour la dévisager. Après quelques secondes d'hésitation intérieure, Jilan déboutonna sa chemise pour la passer sur les épaules de la jeune femme. A travers son regard, il lui faisait comprendre la raison de ce geste. Dire qu'à ce stade de la conversation, cela ne le dérangeait pas de tourner le dos au lycan, preuve étant, qu'il lui faisait assez confiance pour cela. Même s'il préférait que Leann s'occupe de lui par la suite. Chose qu'il s'empressa de communiquer à l'intéressée :
« Je te laisse t'en charger pour la suite. » Un sourire malicieux se dessina sur ses lèvres tandis qu'il ajoutait sur le même ton. « Essaye de ne pas l'abîmer celle-ci... »
Un flash-back le prit soudain, même s'il parvint à masquer son malaise. Leann avait renversé un verre sur sa chemise lors de leur rencontre et lui en avait offert une. Mais celle qui lui avait en premier fait don d'un vêtement similaire c'était... Le Lightness se recula alors de la jeune femme, son expression était redevenue neutre. Il ne fallait pas qu'il perde de vue ses objectifs premiers.
Spoiler:
Je pensais me retirer du rp, étant donné que Jilan ne va pas prendre part à votre chasse, il serait trop à la traîne ! x) Comme je ne sais ce que vous comptez répondre ou non, je n'ai pas développé son départ de la clairière mais selon vos posts, j'aviserai pour en écrire un dernier car je doute d'avoir beaucoup de choses à ajouter pour décrire son départ. Bonne lecture !
Tout le monde semblait être quelque peu sur la réflexion, s'abandonnant à des pensées qui nous menaient toujours plus loin dans les méandres de nos esprits. Mais alors que le non-humain semblait prêt à finir ma vie littéralement d'un claquement de doigt, sa décision semblait être mise en attente par l'absence de réaction de Leann. Celle-ci n'avait pas encore entamé sa transformation en sens inverse pour retrouver son humanité, et ma vie pendant à ce mince fil. Mais je me doutais bien que si elle ne renonçait pas très bientôt à sa fourrure, ce fil allait irrémédiablement se casser sans espoir de retour. Mais j'en profitai pour prendre la parole, et je crus comprendre que Jilan m'accorda ce répit comme étant un moyen de me laisser une dernière chance de me rattraper en attendant que son amante reprenne forme humaine. Et il sembla que mes paroles eurent l'effet escompté. Elles n'avaient pas pour but de le flatter, ni de renforcer son égo, ni même de sauver ma vie, mais juste de lui dire le fin fond de ma pensée. Car ce que je disais là n'était que stricte vérité, et si celle-ci me permettait de m'en sortir vivant, je ne voyais pas pourquoi je m'en serais privé. Et ce que je venais de dire fit immanquablement réfléchir mon potentiel recruteur qui, je le voyais à son expression, méditait sur la justesse de mes dires. Peu de lycans pouvaient se vanter d'avoir autant de contrôle que moi, ou une sauvagerie si bien éduquée. Et la seconde partie de mon intervention acheva de capter son attention alors qu'il se tournait vers moi pour prêter pleinement attention à mes propos. Il se passa quelques secondes avant que celui-ci ne réponde, secondes durant lesquelles le craquement des os de Leann en pleine transformation résonna comme une complainte réticente et assourdissante à mes oreilles sensibles. Je tentai de ne pas grimacer, me rappelant que c'était le quotidien de la plus part des loups. Ma transformation était pratiquement indolore et instantanée en temps normal, à force de l'exécuter, ce qui me garantissait un avantage certain sur beaucoup de mes semblables, et parfois sortait de mon esprit la difficulté qu'elle représentait pour eux.
La réponse de l'être surnaturel me surprit quelque peu : je m'attendais surement à ce qu'il ne voit pas d'un très bon oeil le fait que j'ai voulu tester sa force. Je ne pensais pas que cela avait été son but dès le début, de me montrer de quoi il était capable. Et il avait raison, nous lycans avions besoin de reconnaître la force de notre chef pour l'accepter en tant que dirigeant, et j'étais ravi d'apprendre que c'était pareil chez les rebelles. Mais il ne s'agissait pas seulement de la direction d'un groupe qui nécessitait qu'un chef prouve sa force, il devait aussi prouver par là qu'il était en mesure de veiller sur les siens, de les protéger si nécessaire. Car le travail d'un dominant au sein de la meute n'était pas seulement de dominer, mais aussi de s'occuper de ceux qu'il dominait. Et bien que son orbe aspirait toujours mon énergie, me rapprochant à chaque pas un peu plus de l'inactivité totale, si j'en croyais ses paroles, il faisait ceci pour protéger les rebelles, et le groupe qu'ils constituaient. Deux bons points pour monsieur ! C'est alors que la voix de Leann retentit. Pour un peu, j'aurais été surpris. Je m'étais laissé distrait par la réponse de Jilan et avait quelque peu relégué Leann au second plan, essayant de faire fi des percutants indices de la douleur due à sa transformation. Mais son intervention sembla tourner en ma faveur, ce dont je lui fus reconnaissant. J'écoutai son témoignage et, bien que j'étais totalement d'accord avec elle sur tout ce qu'elle disait, je ressentis le besoin de préciser que si je rentrais chez les Rebelles, ma loyauté ne dépendrait pas uniquement de mon attachement à Leann. Ce n'était qu'une raison de plus pour que je ne trahisse pas tout ce petit groupe de criminels. Enfin, criminels c'était beaucoup dire. Selon moi, nous étions juste réalistes : une paix inter-espèce alors que les humains servaient de nourriture aux vampires (et parfois aux lycans), que ces derniers polluaient la nature (menaçant par ailleurs les élémentaires) et étaient tellement effrayées par les créatures de la nuit que leur premier réflexe était de les tuer. Sans parler des quelques créatures possédés par des démons...bien, je pensais qu'il était inutile de continuer, et je ne comprenais pas comment certains pouvaient se bercer avec une telle illusion de paix. Mais c'était eux qui établissaient les lois, ce qui faisait de nous des hors-la-loi, des criminels. "Nous", c'était beaucoup dire : je n'appartenais pas encore au groupe.
Alors que l'attention de Jilan se tournait vers Leann, je ne pus manquer la bouffée de désir que la vue de la jeune louve nue avait déclenché en lui. Cependant, il parut rester concentré et réprima plus ou moins cette soudaine tension sexuelle. Pour ma part, la vue du corps nue de Leann ne déclencha en moi aucune envie sexuelle, comme celle-ci l'avait souligné dans son discours, bien que j'en reconnaissais sa beauté. Et pendant une seconde je me demandai si les sens de Leann avaient pu percevoir cette flambée, ou l'aurait-elle juste constaté dans la lueur de ses yeux -si jamais il y en avait une. Puis alors que la louve termina son discours, le silence s'installa entre les trois êtres non-humains présents. Un silence qui était pour moi cependant tout relatif, car je percevais les battements de coeur de mes interlocuteurs presque aussi facilement que si j'avais ma tête collée contre leur poitrine. Mais la fatigue m'emportait peu à peu, et je fermai les yeux qui avaient perdu leur éclat bestiaux et toute trace d'animosité -tout comme ma posture détendue. Puis lorsque je sentis que l'amant de la louve était prêt à donner sa réponse, je rouvris les yeux attendant le verdict. Celui-ci souligna la justesse du plaidoyer de Leann, et accéda à sa demande. Ce qui signifiait que je n'allais pas mourir aujourd'hui. Puis se tournant vers moi, l'homme fit un geste vif du bras puis le laissa retomber. Et en moi, je sentis quelque chose remuer, se frayant un chemin indolore à travers ma poitrine. Jusqu'à ce qu'une petite orbe lumineuse sorte de ma poitrine et vint se poser sur le sol. Cela correspondait à l'odeur fugace que j'avais senti avant que celui-ci me l'injecte dans le corps, et je la mémorisai. Presque immédiatement, je sentis mon énergie revenir, ainsi que ma bonne humeur et quelque part au fond de mon être, la bête se calma. Suite à cela, il se dirigea vers moi d'une démarche lente et mesurée, mais qui ne trahissait aucune animosité. Il ramassa l'orbe qui disparaissait petit à petit, et une fois en face de moi -je n'avais pas bougé d'un pouce-, il leva sa main droite face à mes blessures. Je fronçai mes sourcils alors que l'odeur de sa magie emplissait l'espace qui me séparait de lui. Et en quelques secondes, toutes mes blessures furent guéries. Il passait ses nuits avec une louve, donc je me doutais bien qu'il savait que dans l'heure qui suivait, je n'aurais surement plus aucune trace de ces quelques blessures qui étaient restées. Son geste était purement symbolique et surement un moyen de me montrer son autre talent. Qui soit dit en passant était totalement ironique : d'un côté cet homme pouvait ôter la vie d'un simple claquement de doigt, mais d'un autre il avait le don de guérison. Contradictoire. Puis s'en suivirent quelques paroles qui semblèrent signer mon entrée officielle au sein des rebelles, auxquelles j'acquiesçai d'un air grave et proférai un simple "Compris" même si je n'avais pas particulièrement apprécié sa dernière remarque, ce que je me gardai de montrer cependant. Suite à cela, il se dirigea vers Leann -sa Seconde avait-il dit-, lui passa un manteau autour des épaules et lui adressa quelques mots que je n'eus aucun mal à percevoir, puis il s'éloigna. L'air avait totalement perdue de sa tension, et je me dirigeai alors vers Leann avec un sourire aux lèvres.
Si elle n’avait pas déjà prit l’habitude de voir cette lueur dans les yeux de son amant, peut-être que la jeune femme aurait rougie. Mais elle savait -et ce n’était en rien de l’arrogance- qu’il appréciait la vue de son corps et surtout, le lieu et le moment ne prêtait pas vraiment à ce genre de comportement. Peut-être que dans d’autres circonstances, plus tard, le pseudo couple pourrait revenir ici ? Pour se mêler en Nature ? La louve faillit lever les yeux au ciel face à de telles pensées. Sérieusement. Ce n’était toujours pas le moment pour ça. Tsss. A croire qu’elle n’était pas la seule attirée par le corps de son partenaire de vie. Après avoir dit ce qu’elle pensait et en voyant que Jilan gardait le silence, elle commençait à croire qu’elle n’avait pas trouvé les mots justes pour sauver Bran. Si tel était le cas, il ne faisait aucun doute qu’un duel plus violent qu’elle n’avait pu avoir avec sa seconde moitié serait déclenché à la mort du jeune loup. Si on lui enlevait de nouveau un lycan de sa vie, la bête deviendrait probablement incontrôlable pour l’esprit humain. Surtout en sachant qui en serait responsable. Bien que les doutes commençaient à l’assaillir, la stripteaseuse ne laissa rien paraitre sur son visage ou sur son corps. Restant extérieurement détendue. Peut-être que les deux hommes prendraient son attitude comme un manque d’attachement envers le lycan ? Pour Jilan, ce serait chose compréhensible. Mais pas pour Bran, il devait avoir conscience qu’elle tenait à lui, non ? Qu’elle n’agissait de la sorte, que pour se montrer forte ? Même si elle se trouvait en présence d’individus dont elle avait confiance. Mais peut-être qu’elle aussi, ne voulait pas que l’on voit ce qui pouvait la toucher ? Pourquoi ne pas agir de la sorte en tout temps ? Du moins, pour ce qui était de la peur de la perte. Parce que oui, elle avait beau être devenue plus forte et indépendante, elle ne pouvait pas encore faire fi de ce petit détail concernant son attachement émotionnel à certaines personnes. Mais comme pour répondre à l’angoisse qui montait intérieurement chez la jeune femme, son amant décida d’arrêter le supplice en prenant la parole. Si Bran était toujours debout, cela signifiait déjà une chose. A moins qu’il ne veuille expliquer son choix avant de passer à l’action. Jilan s’assura toute l’attention de la louve dès ses premiers mots. Et en entendant ces derniers, elle fut particulièrement soulagée. Elle avait donc trouvé ce qu’il fallait pour convaincre l’homme ? En voila une bonne nouvelle ! Et peut-être qu’avec cette façon de parler, son amant n’oublierait pas qu’elle pouvait aussi se montrer adroite dans ses raisonnements ? Qu’elle n’était pas simplement faite de muscles et de force ? Elle l’espérait. Mais peut-être qu’il le savait déjà... La suite l’intrigua énormément. Voir à l’œuvre l’un des pouvoirs de son amant était presque excitant. Mais elle chassa rapidement ce genre de pensées pour se concentrer exclusivement sur ce qu’elle voyait et sentait. Comment se prémunir d’une telle attaque ? Elle n’en avait pas la moindre idée. Non pas qu’elle pensait en avoir besoin contre Jilan, mais s’il existait des individus capables de faire la même chose, là, ce serait probablement problématique. Elle s’étonna tout de même qu’une simple petite boule comme ça ait pu faire de tels changements chez le loup. S’il pouvait agrandir le diamètre de cette petite sphère, est-ce que ses effets seraient plus rapides ? Plus violents ? Leann ne pouvait pas s’empêcher de se poser une multitude de question en voyant ce spectacle. Elle était tellement plongée dans ses pensées, qu’elle n’avait même pas fait attention au déplacement du professeur, qui se rapprochait dangereusement de Bran. Mais elle ne ressenti pas le besoin d’aller auprès d’eux -même si sa bête lui hurlait le contraire- puisqu’elle avait confiance en Jilan. Elle regarda avec le même intérêt son second pouvoir se mettre à l’œuvre. Elle avait déjà eu l’occasion d’en être un sujet, ce soir là... Leann se mit à toucher inconsciemment le bras qu’il lui avait soigné. Essayant tant bien que mal de ne pas se souvenir de cette soirée, parce qu’elle savait qu’elle pouvait encore s’énerver. Ce qui était stupide non ? Mais pas aux yeux de la jeune femme. Malheureusement. Elle sorti de ses pensées lorsque l’intéressé principal de ces dernières prit la parole. Exigeant ? Elle faillit sourire à cette qualification. Mais la menace sous-jacente qui suivit l’en empêcha. D’abord, parce qu’il faisait habilement comprendre que rien n’était jamais joué. Ensuite, parce qu’elle pouvait aussi prendre ses propos pour elle. Loin d’elle l’envie de le trahir, mais elle avait cependant conscience qu’il n’accepterait pas d’erreur, de quiconque. Si ça lui faisait peur ? Peut-être un peu, mais elle se savait aussi suffisamment désireuse de rester à ses côtés pour ne rien faire contre lui. Chose qu’il savait surement et dont il pouvait se servir à sa guise... La suite la surprit sans qu’elle ne le montre. Sa seconde ? Elle savait qu’ils avaient parlé d’être son bras droit mais là... Il venait d’officialiser la chose. Comment elle se sentait ? Etrangement... Elle était toute excitée. Et si elle n’avait pas trouvé ça déplacé, elle lui aurait surement sauté dessus pour l’embrasser et le remercier de sa confiance. Mais ce serait se montrer puérile non ? Aussi, resta-t-elle à sa place.
En le voyant se rapprocher et surtout s’arrêter auprès d’elle, cette envie fut plus difficile à refreiner. Mais il lui donna un autre sujet de penser, puisqu’il était en train d’ouvrir et d’ôter sa chemise. Et comme si les rôles se trouvaient maintenant inversés, c’était à elle de faire l’effort de ne pas trop le mâter. Même si, elle ne se gêna pas vraiment l’espace de quelques secondes alors qu’il lui passait sa chemise par dessus les épaules. L’odeur de son amant l’enveloppait maintenant et une terrible envie de rentrer avec lui se fit sentir. Après tout, on était dimanche et il n’avait pas de cours à donner, donc, journée libre ! Malheureusement, les propos qui franchir sa bouche la firent presque bouder. Quel rabat-joie ! Il ne pouvait pas se déshabiller devant elle et partir comme ça ! C’était parfaitement injuste et déloyale de lui demander ça, maintenant ! En entendant sa recommandation et se souvenant de ce qui était arrivé à sa chemise lors de leur première rencontre, Leann senti ses joues devenir légèrement rouges. Ils en avaient déjà parlé ! Ce n’était pas entièrement sa faute si son verre s’était renversé sur lui ! Même si à l’heure actuelle, elle ne regrettait pas que cela se soit passé de la sorte. Elle s’approcha alors de lui, et déposa un baiser sur le coin des lèvres de son amant avec un léger sourire sur les siennes. Quoi ? A défaut de ne pas rentrer avec lui, elle avait tout de même le droit non ? Même si, dans le fond, cela revenait à montrer qu’elle était attachée à lui d’une certaine manière...
« Tu peux compter sur moi... » Levant les yeux au ciel en sachant que même murmurer Bran allait entendre la suite, elle lui chuchota quand même à l’oreille. « Je te déteste presque de partir, alors que tu me donnes envie de ton corps... »
Elle en profita pour lui lécher l’oreille avant de se reculer et de s’envelopper dans la chemise qu’il lui avait prêté. Elle allait vraiment devoir apprendre à ne pas plus s’attacher à cet homme, si elle ne voulait pas souffrir... Elle le regarda ensuite partir sans dire un mot avant de se tourner vers Bran, dont elle avait presque oublié la présence. Quelle idiote. Ses paroles l’amusèrent. Parce qu’il voyait juste.
« Si crois aussi... Et déjà sache que je n’avais aucune idée qu’il essaierait de te recruter... Même si ça paraitre presque logique quand j’y pense... Mais félicitations pour avoir passer le cap ! » Marquant une pause, en perdant un peu de sa bonne humeur, elle ajouta : « Enfin... Tu as conscience de ce que ça implique, hein ? Pour toi, comme pour ta tante ? »
Elle doutait que ce ne soit pas le cas et même s’il n’y avait pas pensé, il ne pouvait malheureusement plus revenir en arrière. Jilan ne pourrait pas tolérer une telle chose.
Malgré l'immobilité et le détachement visible de Leann lorsqu'était venu le moment du Jugement Dernier, cette apparence ne me trompa en aucune matière. Je percevais les battements de son coeur qui accéléraient, et une légère odeur de crainte qui émanait d'elle, même involontairement. Mais rien de son visage ou de sa posture ne trahissaient cette petite crainte intérieure, et je ne pouvais lui en vouloir de tenir à rester impartiale dans ces conditions. Comment prendrait son amant le fait qu'elle me défende aussi farouchement ? Considérerait-il cela comme un manque de loyauté envers sa personne ? Et ne sachant pas ce qui liait ces deux jeunes gens -qui se connaissaient d'ailleurs bien avant que je n'apprenne à connaître et apprécier Leann-, il était surement tout à fait légitime de sa part de se poser ce genre de questions. Et maintenant que je faisais parti des Rebelles, la question se posait aussi pour moi : à qui devait aller ma loyauté première ? A Leann la première louve avec qui j'avais tissé des liens forts jusqu'ici, ou alors à Jilan celui qui était devenu mon chef, mon patron, mon "Alpha". Je doutais que les motivations qui me pousseraient à agir pour l'un aillent à l'encontre de celles de l'autre, mais si jamais cela arrivait, que devrais-je faire. J'avais tout de même prêter serment de loyauté au chef des Rebelles, mais comment réagirais-si je devais blesser Leann pour "le bien du groupe". D'ailleurs qui faisait parti de ce groupe ? Comment mes relations avec les autres membres de ce groupe se dérouleraient-elles ? Car bien que nous travaillions tous pour être libre d'avoir le choix de suivre nos instincts si nous le voulions, ce qui impliquait parfois de tuer les êtres des autres classes, cela signifiait que ces derniers projettaient peut-être par la suite de tuer ceux de ma race. Nous étions déjà suffisamment bon pour nous entre-tuer entre lycans, nous n'avions pas besoin que des vampires ou que des humains ou autres se mettent à nous chasser. Ces mêmes vampires, humains et autres que je m'apprêtais à aider. Mais qui a dit que cette perspective ne me plaisait pas ? Un sourire rêveur fit frémir mes lèvres alors que je pensais à tous les futurs combats que ce futur me suggéraient. Mais les bagarres futures n'étaient que des effets secondaires -souhaitables pour ma part- de ce que je voulais le plus : ne pas être réduit au stade des simples humains avec un surplus de force, de vitesse et de bestialité. Mais rencontrerais-je un jour ceux qui m'aideraient à accomplir cette tâche ? Mais camarade ? Car le mot d'ordre de cette organisation était la discrétion non ? Comment s'organisait donc tout cela ?
Tant de questions dont les réponses ne viendraient que plus tard. Alors il n'y avait pas lieu d'y penser maintenant, même si plus tard cela deviendrait une préoccupation de taille. J'en connaissais au moins deux en tout cas. Et je préférais éviter de penser à eux à l'instant présent car, alors que Jilan s'était rapproché de Leann, l'air s'était empli de phéromones et les paroles lourdes de sens qu'ils s'échangeaient étaient chargées d'une sensualité étant péniblement durs à occulter. Cependant, pour plus d'intimité, je fis comme si je n'avais rien entendu même si Leann savait que je n'avais pas perdu une seule miette de ce qui s'était dit. Jilan quant à lui ignorait que mes sens étaient bien plus développés que ceux de ma race, mais cette information avait des chances de l'intéresser, et à notre prochaine rencontre je comptais bien lui faire un bilan sur mes capacités. Si Leann ne le faisait pas avant moi, bien sur. Et peut-être que par la même occasion j'en apprendrais plus sur ses capacités à lui. Car bien qu'il était évident qu'il possédait le don de guérison -pouvait-il l'utiliser sur lui ?-, j'étais bien curieux d'en savoir plus à propos de cette petite orbe de lumière qu'il avait placé dans mon corps. Sans compter que je ne connaissais toujours pas à quelle race il appartenait. Mais répondrait-il à la curiosité du loup que j'étais ? Et me considérait-il toujours comme un "louveteau" ?
Leann se retourna enfin vers moi, recouvert de l'odeur de Jilan, et elle me sourit en retour d'un air amusé. Cela me rassura un peu de savoir qu'elle n'avait pas prévu que son amant soit là pour me tester, et même si je ne lui en aurais pas voulu dans le cas contraire, cela me détendit un peu. Qu'elle aurait du se douter ou non que celui ci profiterait pour évaluer mon potentiel n'influait en rien sur ma vision des choses. On ne pensait pas toujours à tout. Cependant, ce qui m'inquiétait un peu plus était la deuxième partie de ce qu'elle avait à me dire. Est-ce que je savais ce que cela impliquait pour moi...comme ma tante ? Oh je savais bien ce que cela impliquait pour moi, mais je ne comptais pas impliqué ma tante dans tout cela et je n'avais en aucun cas pensé à ce que ma récente alliance pouvait signifier pour elle. Et j'avais encore du mal à envisager cela. Oh bien sur cela ne posait aucun problème au vue des sorties, des différentes missions éventuelles que j'aurais à effectuer. Mais maintenant que j'y pensais effectivement, si jamais quelqu'un me suivait jusqu'à chez ma tante, elle serait en danger. Et elle était la seule famille qui me restait. Ce qui voulait dire que je pouvais pas prendre ce risque. Mais je ne pouvais pas non plus la quitter. Cependant j'étais capable -et je l'avais fait un grand nombre de fois- de rester plusieurs jours sans rentrer à la maison. Pendant ce laps de temps après chaque mission, je ne devrais donc aller ni au repère des rebelles, ni chez moi : la maison serait ma seconde mesure. Et je devais donc par la même occasion découvrir si quelqu'un me suivait pendant cette même durée de latence : ce qui ne devrait pas être très difficile, au vu de ma nature prudente et mes prédispositions. Dans le cas contraire, je me verrais obligé de me séparer de ma tante et de trouver un loyer pour moi-même. Hochant la tête en direction de Leann, je finis par lui répondre, avec un certain sérieux.
-Oui, je sais ce que cela signifie. Ma tante n'en saura rien, et si il y a la moindre chance que l'on remonte jusqu'à elle, ou jusqu'à Nous, je prendrai les mesures qui s'imposent.
L'atmosphère était légèrement tendue, et mon loup était quelque peu nerveux par rapport aux implications que je venais de suggérer. Marchant donc un peu pour me détendre, j'attendis que ma camarade réponde et la laissant terminer. Puis désireux de détendre l'air, je repris la parole.
-Sinon, j'aimerais bien en savoir plus sur ce qui s'est passé depuis la dernière fois qu'on s'est entraîné, dis-je avec un sourire doux.
Même si elle ne l’avait pas voulu, la suite de question qu’elle communiqua à son ami sembla le faire réfléchir. Un peu. Mais cela signifiait surtout qu’il devait se rendre compte petit à petit de l’envergure de la situation. Pour sa part, la louve n’avait plus personne à qui elle était attachée et qui ne connaissait pas ses penchants. Alors, elle n’avait pas trop à s’en faire. Ou du moins, elle n’avait pas les mêmes préoccupations que Bran. Qui lui, devrait faire attention à ne pas mêler sa tante dans cette histoire, pour la garder en sécurité. Il devrait également probablement lui mentir souvent, bien qu’il lui ait déjà dit que sortir et passer un temps fou dehors ne dérangeait pas la femme. Mais tout de même. Pour un peu, la louve se sentir presque mal pour son ami et la situation dans laquelle il allait se trouver. Mais de toutes manières, les dés étaient déjà lancés et aucun retour en arrière ne pouvait être fait et ne serait toléré. Mais en croisant le regard du jeune lycanthrope, Leann se dit qu’elle était peut-être en train de s’en faire pour rien ? A en croire ce qu’elle voyait dans les iris de son interlocuteur, ce risque sous jacent ne lui faisait pas tant peur que cela. La jeune femme écouta sa réponse sans un mot. Autant elle avait comprit la première partie de sa phrase sans même qu’il ne la prononce, autant la suite la surprit un peu. Prendre les mesures hein ? Evidemment, c’était ce qui était demandé aux membres pour garder le plus longtemps possible leur anonymat. Mais l’entendre dire de tels propos alors qu’il était aussi jeune... La louve faillit secouer la tête à cette pensée. Voila qu’elle commençait à se dire comme son amant, que Bran était trop jeune. N’importe quoi. Elle était l’une des mieux placées pour savoir de quoi était capable son ami, même si elle n’avait pas encore eu l’occasion de le voir à l’œuvre dans une chasse à l’Homme. Seulement avec des animaux et leurs combats pour l’entrainement. Et elle savait que si elle n’avait pas la capacité de régénérer aussi rapidement et bien, elle serait probablement couverte de cicatrice à l’heure actuelle. Bref, sortant de ses pensées, elle senti cette petite tension dans l’air. Peut-être qu’il agirait réellement mais que dans le fond, cela le faisait peur ? Après tout, la vie d’une personne chère à ses yeux serait en jeu à partir de maintenant, en plus de la sienne. Comment prétendre ne pas être un peu anxieux ? Leann le vit commencer à marcher et un faible sourire se dessina sur ses lèvres alors qu’elle venait le rejoindre tout en répondant :
« C’est une très bonne chose... Mais n’oublie pas que je suis là aussi hein... Ce n’est pas parce que les choses sont un peu plus... Complexes ? Maintenant que ça change quelque chose entre nous... Ma bête ne le tolérerait pas de toutes manières. » Finit-elle par dire avec un ton qui s’était légèrement mué en plaisanterie sur la fin.
Mais dans le fond, c’était purement la vérité. Cette moitié d’elle avait déjà réagit à l’idée que Jilan puisse tuer le loup, Leann n’était pas idiote pour imaginer ce que serait le résultat si elle venait à réellement le perdre. Un deuxième loup dans sa vie disparut... ? Elle préférait ne pas du tout y penser. Pas maintenant. Plus tard. Elle avait encore cette fâcheuse tendance à repousser à plus tard ce qui lui faisait peur. Peut-être qu’elle allait devoir travailler là dessus aussi ? Pour devenir plus forte ? Ce n’était pas une idée à exclure. Il lui restait encore tant de choses à faire... C’était presque effrayant. Mais de l’autre côté, si elle regardait ce qu’elle avait été et ce qu’elle était maintenant, elle ne pouvait pas ne pas voir ses propres progrès... La jeune femme se mit à marcher auprès de son ami, ses bras enveloppant toujours sa chemise sans qu’elle ne s’en rende vraiment compte. Et même lorsque ce fut le cas, elle ne changea rien. Bran était au courant, ou devait sentir qu’elle était attachée à Jilan non ? Mais peut-être pas jusqu’à quel point... Ce qui était surement mieux comme cela.
-Sinon, j'aimerais bien en savoir plus sur ce qui s'est passé depuis la dernière fois qu'on s'est entraîné.
Là, la lycanne se stoppa presque net à ces propos. Ce qui s’était passé ? Bien trop de choses à son goût ! Et pas des meilleures. Mais elle ne pouvait pas tout dire à son ami, certaines choses devaient rester sous silence. C’était presque un devoir. Bon mais par où commencer ? Peut-être avec l’humain qu’elle avait tué ? Le premier de sa vie ? Reprenant la marche après seulement quelques secondes d’arrêt, elle commença à parler :
« Ca risque d’être un peu long... » Sauf si elle occultait quelques petits passages. « Déjà. J’ai tué un de mes clients... » Si on sentait de la culpabilité dans ses propos ? Aucune. « La raison est ridicule : il m’a énervé... Il m’a obligée à repenser à mon père, à cette époque... C’est pire être à mes yeux... Alors... Je l’ai tué et... Manger... »
Leann marqua une petite pause, c’était davantage le fait de reparler de son paternel qui ne lui plaisait pas que parler de sa victime. Il y avait encore des choses contre lesquels elle n’arriverait pas à faire face. Et l’homme qui était à l’origine de la mort de son frère resterait surement l’une de ses plus grandes peurs. Mais bon, ça, personne ne le savait. Seul Jean-Dame avait eu vent de ce qui s’était passé dans son enfance mais elle ne le pensait pas capable de jouer là dessus, contre elle. Sortant de ses pensées une nouvelle fois, elle reprit la parole pour continuer son récit.
« Et pour le lycan... Hum... Jilan était en danger... Je me suis interposée face à une première adversaire, qui a ensuite reçu le soutient du lycan en question. Ils devaient être proches, leur odeur l’attestait, surement de la même famille et c’est ce qui à surement causer la perte de l’homme... J’ai réussis à prendre le dessus sur lui et à le tuer... Son corps battant dans la paume de ma main, dans sa cage thoracique... » Tout en expliquant ce passage, elle avait levé la main, paume vers le ciel, comme si elle se remémorait ce moment et imaginait l’organe au creux de sa main. « J’ai surement agis par instinct à cet instant, en sentant qu’il était en danger... Peut-être que j’aurai pu mieux me battre... »
Sa main vient caresser son épaule qui avait été déboitée et son bras cassé. Si son amant n’avait pas utilisé son dos, elle aurait surement passé des très mauvais jours à souffrir le temps que ses os se ressoudent...
« Voila dans les grandes lignes ! » Ajouta-t-elle comme pour se changer les idées.
Si elle attendait l’avis de son ami ? Curieusement oui. Elle ne lui avait peut-être pas dit pourquoi Jilan avait été en danger, mais elle lui avait fait part de la raison de son meurtre humain. Même son amant ne le savait pas. Peut-être parce qu’elle pensait pouvoir se montrer davantage faible face à Bran qu’à son chef ? Probablement. Surtout parce qu'elle ne voulait pas montrer ses faiblesses à son amant, de peur qu'il ne pense qu'elle ne lui était plus utile...
Alors que je suis le sombre chemin sur lequel m'avait amené mes réflexions sur le sujet, je ne pouvais nier qu'une certaine tension avait non seulement envahi mon corps, mais mon coeur par la même occasion. J'étais tout à fait conscient des dangers que supposait mon choix dernier, et de la menace qui pesait alors sur les personnes qui m'étaient proche, mais je ne pouvais ni ne voulait faire demi-tour. Cela n'était pas une solution envisageable.Quel genre de loup serais-je si, comme un lâche, je courbais l'échine devant les difficultés et que je fuyais toute forme de danger pour vivre une vie tranquille et saine ? Mes choix impliquaient beaucoup de choses, non seulement pour moi mais aussi pour les personnes qui m'étaient proches : ma tante, Leann, et même peut-être cette hybride vampire-lycan du nom de Ellie. Quoique cette dernière s'était volatilisée de la ville de tous les dangers il y a quelque temps et ne semblait pas prête à revenir, ce qui l'écartait inévitablement de toutes formes de danger. Cependant en ce qui concernait ma tante et Leann...Eh bien je me porterai garant de la sécurité de la première tandis que je continuerai à entraîner la seconde qui était déjà plus que capable de se battre et se défendre par elle-même. Je n'étais pas du genre à laisser les gens que j'aimais pâtir des conséquences de mes actions ; je préférerais mourir plutôt que les laisser souffrir par ma faute. Lorsque je posai brièvement le regard sur la louve à la longue chevelure violette, je perçus la compassion que reflétait ses yeux, comme un miroir du cheminement de mes propres pensées. Et sans même que nous ayons à parler, je sus qu'elle savait.
Alors que je marchais tranquillement pour me détendre, elle s'approcha de moi et, avec un sourire, prononça des paroles qui m'apaisèrent. Elle serait toujours là pour nous et cela ne changerait rien dans notre relation. C'était déjà une chose que je savais sûre malgré le nouveau tournant qu'avait pris ma vie. Et peut-être qu'au fil du temps je me rendrais compte d'à quel point les choses pourraient être similaire sans toutefois être pareil, plus jamais. Ses pensées suffirent à m'apporter un répit bienvenue dans mon esprit obscurci par l'absence de lumière du chemin sur lequel je m'étais engagé. Souriant petit à petit, je finis par afficher un vrai et large sourire comme j'en avais l'habitude lorsque ma camarade finit ses paroles par une petite plaisanterie qui abordait tout de même un fond de vérité. Bien qu'elle avait tout fait pour ne pas le faire remarquer, j'avais perçu son inquiétude lorsque j'avais été sur le point de me faire tuer par son amant, et je ne pouvais qu'imaginer les sentiments de la bête dont les instincts protecteurs étaient exacerbés. Mais avait-elle pour autant raison sur toute la ligne ? Aurait-elle seulement la possibilité de m'empêcher de mourir, malgré toute sa bonne volonté ? Personne ne le pourrait, pas si mon heure était arrivée. Pas même la lune...
Pendant notre petite marche parlante, elle avait resserré ses bras autour de la chemise de son amant comme si elle désirait s'accrocher à ce dernier même si celui-ci était déjà parti. Je pouvais sentir ce sentiment de bien-être, d'affection qu'elle émanait à l'égard de ce dernier, et pourtant qu'elle ne voulait pas montrer si évidemment en sa présence. Ses réactions lorsque le non-humain était là me faisaient penser qu'elle ne voulait pas lui laisser le soupçon de cette profonde attache. Mais alors que je pensais continuer à détendre l'atmosphère avec ma prochaine question, une vive tension de la part de mon interlocutrice se fit ressentir et elle s'arrêta de marcher quelques secondes. Elle semblait réfléchir avec rapidité, et cette brusque crispation ne pouvait signifier que deux choses : soit elle avait peur de ma réaction, soit elle réfléchissait à ce qu'elle allait dire (ce qui impliquait inévitablement un choix, et donc des cachotteries). Les battements de son coeur s'étaient en effet légèrement accélérés. Mais si elle décidait de me cacher certaines choses, je me doutais bien qu'elle avait ses raisons et je ne lui fis pas remarquer que ce petit changement dans son attitude m'avaient mis la puce à l'oreille. Alors patiemment, j'écoutai ce qu'elle avait à me dire. Et quel ne fut pas mon amusement lorsque je décelai une note de contrariété lorsqu'elle évoqua son père alors que le fait de manger son client passait crème pour la louve. Mais je notai quelque part dans ma tête que l'évocation de son père était un sujet sensible.
Je hochai de la tête, plus pour moi-même que pour Leann qui était partie dans ses pensées, et attendis qu'elle continue. Ce qu'elle fit au bout de peu de temps, enchaînant avec le meurtre du lycan. Qui à ce que j'avais compris était un dommage collatéral dans une histoire assez compliquée dont les détails ne me parviendraient surement pas. Mes lèvres s'étirèrent en un sourire fier lorsqu'elle mentionna le fait qu'elle fut capable d'établir un lien de connexion avec ses deux adversaires grâce à leur odeur. Et parti d'un air rêveur lorsque, de ce même air rêveur, elle évoqua le coeur de son opposant sujet à ses derniers battements au creux de sa main. Elle s'expliqua brièvement sur les raisons de sa dernière action, s'excusant en quelque sorte par la même occasion alors qu'elle attendait visiblement mon avis, même si ces excuses étaient vaines. Tout simplement parce qu'elle était toujours là jusqu'à ce jour. Arborant un mince sourire, je pris toutefois quelques secondes pour répondre, écoutant la voix du vent et m'adonnant aux différentes odeurs qui m'entouraient tout en fermant les yeux : le cri des oiseaux au loin, le bruit de nos pas, l'odeur des petits animaux cachés par-ci par-là, l'odeur de Leann, et celle de Jilan qui persistait sur sa chemise. Puis souriant plus franchement, je tournai mon regard vers la louve à la longue chevelure.
-Dommage que personne n'ait pu te souhaiter bon appétit lorsque tu as mangé ce pauvre bougre. Si il était assez téméraire pour t'irriter, il l'était donc tout autant pour mourir. Aucune compassion vis-à-vis de l'homme, et plutôt un amusement non feint transparaissait dans le timbre de ma voix. J'espère au moins qu'il était bon ! Puis prenant une courte pause, j'enchaînai avec le deuxième fait. A propos de ce lycan, si je comprends bien tu l'as tué pour défendre Jilan donc. Eh bien ce n'est pas plus mal. Et puis si tu es encore vivante à ce jour, c'est que tu t'es assez bien battue, quoi que tu en penses, dis-je avec fierté. Tu as pu rester en vie face à des adversaires de taille, et tu avais intérêt. En affichant un sourire malicieux, je poursuivis. Sinon j'aurais été obligé de les traquer pour régler compte !
Pourvu qu'il n'ait pas été trop tard pour que je suive la piste. Par ailleurs, je ne fis pas non plus remarquer qu'elle avait implicitement fait comprendre que la première adversaire contre qui elle s'était battue n'était pas morte. Dans ce cas que s'était-il passé ? Il y avait des zones d'ombres sur ce dernier fait, mais si ma camarade ne les avait pas éclairé c'est qu'elle devait avoir des raisons. Et bien que ma curiosité me démangeait, je respectai son choix. Prenant donc quelques secondes, voir une ou deux longues minutes, je me remémorai tout ce qui devait être dit avant que nous revêtions notre forme animale pour aller chasser. Notamment lorsqu'elle avait tiqué à l'évocation de mes meurtres à moi. Prenant cette fois-ci la parole de mon propre chef, je lui racontai donc l'histoire derrière tout ça, d'un ton neutre.
-Comme tu l'as remarqué lors de mon plaidoyer, j'ai moi aussi tué. Deux êtres-humains. C'était des chasseurs de lycans, ils se promenaient avec des fusils chargés aux bals en argent. C'étaient eux les responsables de la mort de mes parents, alors que j'étais encore trop petit pour faire quoi que ce soit. Plusieurs années se sont écoulées, et je les ai de nouveau croisé dans la forêt. Là, je les ai suivi, effrayé, puis tué. Mais pas mangé. Ce n'était pas une chasse, mais une vengeance, pure et simple.
Ces derniers mots étaient cruciaux car en effet, je n'avais jamais chassé d'humain. Ni mangé d'ailleurs. Je m'étais contenté d'égorger ces deux meurtriers après avoir croisé au hasard leur senteur que je n'avais jamais oublié depuis le jour de la mort de mes parents. Levant les yeux aux ciels pendant ma marche, je me perdis dans mes pensées qui s'égaraient vers mes défunts parents alors que j'étais en attente du verdict de Leann. Mon père m'avait un jour dit que la couleur de mon pelage était un reflet de la pureté de ma mère, une pureté qui coulait en moi. Pensait-il toujours la même chose à présent ? Alors que je m'apprêtais à chasser des humains ? Peut-être, ou peut-être pas. Mais mon père était un loup qui suivait ses instincts, et j'étais sur que le chemin que j'empruntais ne le dérangeait aucunement. Etait-ce la même chose pour ma mère qui était humaine ? Je n'en saurai jamais rien. En attendant, je continuais de vivre ma vie.
Si elle s’attendait à ce que son ami lui reproche les meurtres qu’elle avait pu perpétrer ? Pas vraiment. Pour avoir déjà parlé avec Bran de ce genre de sujet, la louve savait qu’il ne lui reprocherait rien. Ou, peut-être simplement le fait de ne pas l’avoir invité ? Cette faible note d’humour la fit légèrement sourire. Même si les choses étaient devenues plus dangereuses pour eux, du fait que les deux lycans faisaient maintenant officiellement parti des opposants de la ville, Leann ne pouvait pas arrêter de se sentir comme dans un autre monde en présence de son jeune ami. Comme si le fait d’être avec un autre membre de sa race pouvait la calmer et l’apaiser de tous les maux du monde. C’était aussi la sensation qu’elle avait eu lorsqu’elle était avec Danaliel... Repenser à son ancien compagnon la fit serrer des dents et elle le chassa rapidement. Ce n’était plus le moment de penser à lui. Il faisait parti d’un passé révolu, à jamais. Mais c’était bel et bien la même chose, la même tranquillité maintenant avec Bran qu’avant avec Dan. Peut-être un truc de loup ? Dans tous les cas, la voix de son interlocuteur la fit sortir de ses pensées et le moins que l’on puisse dire, c’était qu’il savait faire de l’humour. Un léger sourire amusé se dessina alors sur les lèvres de Leann. Lui souhaiter « bon appétit », vu l’état dans lequel elle était à ce moment elle, elle doutait fortement qu’elle aurait pu entendre de telles paroles. La suite lui fit le même effet : il l’a détendait et l’amusait. « Non, il avait un arrière goût d’alcool dans le sang et la chair. » Répondit-elle sans vraiment faire attention. L’irriter, qu’il avait dis ? C’était un peu plus que cela, lui faire repenser à son frère disparut et à tout ce qui en découlait... C’était clairement de la haine qui avait émané de la jeune femme à ce moment là. Oui, si vous souhaitez faire sortir Leann de ses gonds, il suffit de lui parler de son père, ou d’utiliser les mêmes mots désobligeants à son encontre et le tour était joué. Bien sûr, dans cette ville, peu de personnes étaient au courant de cela. Jean-Dame savait ce que son paternel représentait pour la louve. Et Bran venait probablement de comprendre que ce n’était pas un sujet à user sans réfléchir. Quant à la suite. Elle se sentait presque mal à l’aise qu’il lui fasse ce genre d’éloge. Parce qu’elle ne l’avait pas vu sous le même angle. A vrai dire, depuis cette nuit là, elle évitait de repenser à ce qui s’était passé après son retour à l’appartement. Le fait d’avoir été violente envers la fiancée de Jilan ne... Bordel ! Non ! Elle ne voulait en aucun cas repenser à cette vulgaire sangsue ! Cela l’énervait autant que ça lui faisait mal. La jeune femme inspira profondément pour se calmer et reporter toute son attention sur les dernières paroles de Bran. Leur régler leur compte ? Cette idée la fit sourire et elle vient passer l’une de ses mains dans les cheveux de son interlocuteur, tendrement.
« Merci de te dévouer... Mais si je dois vraiment mourir... J’espère avoir la force d’emmener avec moi mon adversaire... Sinon, je serais une piètre combattante, hein ? »
Son ton était redevenu léger. Il n’y avait pas à dire, ce gamin -bien qu’elle ne pensait pas un mal avec ce terme- parvenait à la rendre de bonne humeur. Peut-être qu’elle aurait dut aller le retrouve ce fameux soir ? Non ... Stop. Elle reprit sa main après quelques secondes, gardant un faible sourire sur le coin des lèvres. Et maintenant ? Elle avait encore une chose ou deux à lui dire concernant l’organisation, puisque Jilan ne l’avait pas fais. Mais était-ce vraiment le bon moment ? Après tout, ils n’étaient pas sans se revoir... Mais peut-être que le plus tôt serait le mieux ? Le temps qu’elle se décide, son ami avait déjà prit sa propre décision et surtout, reprit la parole. Et Leann fut sincèrement surprise qu’il se mette à parler de ce sujet en particulier. Parce qu’il avait perçu chez elle, ses sentiments lorsqu’il avait évoqué son passé ? Il n’y avait pas à dire, ils ne pouvaient pas se cacher grand chose entre eux... La louve l’écouta avec attention. Des chasseurs de lycans ? La suite fut presque assez simple à deviner, ce qui n’enlevait en rien le malheur de l’histoire. Mais au moins, Bran avait réussis à les mettre à mort. C’était une bonne chose. Certains peuvent dire ce qu’ils veulent concernant la vengeance, si elle pouvait revenir en arrière, et faire souffrir davantage son père pour ce qu’il avait fait, en terme de vengeance, elle le ferait. Tout comme retrouver Léon et lui faire payer toutes ces années de prostitution forcée. Mais encore une fois, elle chassa de genre de pensées de son esprit. Même si elle voulait mettre à exécution sa vengeance sur ce dernier homme, elle n’avait pas la possibilité de quitter Avventura. Pas maintenant qu’elle se devait de rester auprès de Jilan.
« Je vois... Je suis contente que tu aies pu te venger. Même si ça ne peut pas effacer leur crime, au moins, ils n’ont pas le loisir de vivre. C’est une bonne chose. »
Et elle le pensait sincèrement. La vengeance ne ramenait pas les morts, ne nous faisait pas sentir mieux, certes. Mais au moins, les meurtriers étaient punis. C’était surement ce qui les attendait. En voulant laisser libre court à leurs pulsions, chasser des Humains, le duo de lycan pourrait se retrouver à être prit pour cible par vengeance. Leann n’y voyait pas d’objection. Elle y était préparée. Un sourire amusé se dessina sur ses lèvres de nouveau, alors qu’elle s’approchait de Bran, l’air un peu trop joyeux pour ne pas passer pour une gamine.
« Et bien, on fera ta première fois ensemble ! On choisira une bonne proie ! » Oui dit comme ça, sa première phrase laissait entendre autre chose, sans même qu’elle ne s’en rende compte. « Comme il est encore tôt, peut-être qu’il y a un joggeur dans le coin ? On pourrait essayer de s’en faire un ? Qu’en dis-tu ? »
Oui, à croire qu’elle était en train de lui proposer d’aller dîner et non pas d’aller chasser et tuer un Homme. Mais bon, quelle différence pour des lycans ? Dîner et chasser revenaient au même, non ?
« Mais... Avant qu’on le fasse... J’aimerais que les choses soient claires... » Son ton n’était pas froid ou tranchant, simplement sérieux. « Tu... acceptes réellement de suivre les ordres de Jilan ? Quel qu’ils soient ? D’essayer de recruter des membres ? Il doit y avoir le moins de personne possible au courant du rang de Jilan... Alors... Je suppose que c’est à nous de faire en sorte d’agrandir nos rangs pour le garder en sécurité... Pour moi, c’est une chose normale... Mais... Penses-tu pareil ? »
Tout comme moi je l'étais en présence de Leann, celle-ci semblait détendue et sereine lorsqu'elle était à côté de moi. Bien qu'à certains moments, elle semblait avoir des moments de tension subites et passagères, surement dues à des mauvais souvenirs dont le passé de la louve semblait être parsemés. Mais j'avais appris à ne pas interroger les gens sur leur passé, car ramener les souvenirs à la surface et faire les gens en parler ne faisaient que rendre ce passé plus présent dans leur coeur parfois, ainsi que les sentiments qu'il apportait. Si elle décidait d'en parler d'elle-même, je l'écouterais. Autrement, je me satisferais de ce qu'elle me dirait. Chacun son passé, chacun ses démons. J'en avais pas beaucoup pour ma part, car tout ce qui aurait pu constituer les démons de mon passé avait été résolus : les meurtriers de mes parents étaient morts, j'avais trouvé une meute -voir même deux, si l'on considérait Leann et les Rebelles comme deux meutes différentes- et bien que je n'en sache pas plus sur la meute de mon père, je n'étais plus seul. Je ne l'avais jamais vraiment été grâce à ma tante qui m'avait recueillie sans poser de questions, même celle-ci ne pouvait constituer une véritable meute pour moi. Nos univers étaient trop différents ; elle ne se préoccupait pas le moins du monde du conflit entre le Cercle et les Rebelles, connaissait l'existence des êtres surnaturels mais ne s'en souciait guère et avait même parfois tendance à oublier que j'en étais un -je faisais tout pour ne pas mettre en avant mes capacités lorsque j'étais en sa présence. Mais avec Leann, et d'ailleurs avec tous ceux que j'allais rencontrer chez les Rebelles, je n'avais pas besoin de faire attention à ne pas les mettre à l'aise. Ils savaient pour ma nature et leur rappeler de temps en temps que j'avais un moyen de perception et des capacités qui étaient légèrement supérieurs aux leur pouvait parfois aider. Grâce à mon petit don, j'étais surement la créature de la nuit avec les sens les plus développés de l'Avventura. Bien qu'un hybride Ours aurait surement un meilleur odorat que le mien, ou un hybride chauve-souris une meilleure ouïe. Mais en moyenne, je restais supérieur à la moyenne. Mais retournant à la discussion, mon interlocutrice fut amusée par la petite plaisanterie que j'avais faite et je ne pus m'empêcher de rire lorsqu'elle me décrivit le goût de l'humain qu'elle avait manger. Même si sous forme humaine l'alcool pouvait avoir bon goût, sous forme animale ce dernier pouvait être désagréable au milieu de saveurs meilleures tels que le sang et la chair. C'est ce qu'il en coûtait de manger un homme qui venait probablement de se saouler.
Cependant la suite de mes propos, concernant sa survie et donc le succès de sa bataille, elle sembla la mettre mal-à-l'aise. Je la vis à la légère expression sur son visage et une faible tension. Il était inutile de dire que j'étais sacrément observateur, et c'était une conséquence de mon dos. Ce qui m'avait rendu particulièrement doué dans la lecture des gens, savoir si ils mentaient ou pas, savoir ce qui les dérangeait ou au contraire leur faisait plaisir. Et je sus que quelque chose à propos de ce jour où Leann avait tué le lycan la dérangeait. Et subitement, l'odeur de sa tristesse -une tristesse sourde- et de sa colère emplirent mes narines pendant un bref instant. Ce jour ne lui avait décidément pas plus, bien que ça ne semblait pas être le meurtre du lycan en soit qui la dérangeait. Elle prit une profonde inspiration et se calma avant d'écouter la fin de ce que j'avais à lui dire, et à mon plus grand bonheur elle sourit de nouveau, tendrement cette fois-ci, tout en passant sa main dans mes cheveux. Ce contact m'apaisa et me détendit comme seul celui de Leann pouvait le faire. Puis à l'écoute de ses paroles, je ne pus m'empêcher de sourire de fierté et de compréhension. Nous étions des loups, nous avions un certain honneur et cet honneur passait parfois par la bataille. Lorsque cette dernière avait pour but un établissement de la valeur de l'opposant, perdre tout comme gagner inspirait un certain respect pour l'adversaire. Cependant lorsque la bagarre concernait la protection d'un être cher ou d'une cause, la défaite était quelque chose que nous avions un peu de mal à supporter. Et d'ailleurs je m'entraînais quotidiennement afin de ne pas me reposer sur mes lauriers et mes capacités latentes. Le monde regorgeait de combattants digne de ce nom et je comptais bien me hisser au sommet.
-Y a toujours plus fort que soit, mais je comprends ton désir. Tu es une vraie battante maintenant, lui souris-je avec une joie sincère dans les yeux.
La raison pour laquelle on avait commencé à s'entraîner Leann et moi était que celle-ci -outre le fait qu'elle m'avait piqué ma proie- avait voulu devenir plus forte et surtout moins soumise. La différence était maintenant nette entre la Leann d'avant et celle de maintenant. Son changement presque radical si je devais me fier à ce qu'elle m'avait dit sur sa personne. Je ne savais pas ce qui l'avait poussé à prendre ce chemin, mais il lui réussissait à merveille. Elle sembla par ailleurs avoir quelque chose à me dire par la suite, mais ce que j'avais à dire occupa son attention car je désirais lui faire part de ce bout de mon passé. Lorsque je lui racontai ma vengeance, m'étant fait justice moi-même, celle-ci acquiesça de manière entendue. Certains diraient que mon acte était immoral, inutile car il n'aurait pas ramener mes parents, que la vengeance était une lame à double-tranchant. Mais quoi que l'on dise sur la vengeance, elle semblait ne pas penser de la même manière. Et moi non plus. Tuer les meurtriers de mes parents m'avaient apporté un sentiment de justice, car j'avais été trop jeune pour défendre mes parents à cette époque. Trop jeune et trop faible. Mais ce n'était plus le cas, et ils s'en étaient pris à ma famille. Je n'étais pas rancunier au point de m'en prendre à la leur, bien que j'aurais surement été en mesure de remonter jusqu'à elles, mais ce genre de vengeance ne m'intéressait pas ; seuls ceux qui m'avaient fait souffrir devraient payer en retour. La mort n'était peut-être pas une souffrance suffisante pour certain, mais j'estimais que celle dont ces chasseurs avaient été victimes étaient assez violente pour me satisfaire. Et il me paraissait tout à fait normal que, si un jour je m'étais laissé à la vengeance, d'autres se laisseraient aller à leur tour à ce sentiment et seraient susceptibles de s'en prendre aux êtres qui m'étaient chers et à moi-même. Et j'étais préparé à cette éventualité. Elle ne me faisait pas peur, ne me dérangeait pas. C'était à moi de protéger ceux qui m'étaient proches. Et de les venger en cas d'échec. Un cercle vicieux me diriez-vous ? Peut-être bien, mais le monde était un cercle vicieux alors pourquoi vouloir désespérément échapper à notre essence ?! Les paroles de Leann apaisèrent mes pensées et je fus heureux de savoir qu'elle était sur la même longueur d'onde que moi à ce sujet. Puis cette dernière s'approcha de moi, souriant comme une gamine se préparant à recevoir sa sucette préférée, et je ne pus réprimer un sourire entendu à la voir si joyeuse. Je passai un bras autour de ses épaules afin de la lui serrai brièvement tout en la regardant.
Ma première fois ? Je chassai rapidement les premières images qui m'étaient venues naturellement à l'évocation de l'expression "première fois" pour envisager la partie de chasse qui s'annonçait. Et chaque parcelle de mon être se réchauffa d'excitation et d'impatience. Mon loup jappa pour partager mon impatience et je le sentis mentalement remuer la queue à l'évocation de cette chasse. Lorsque la louve évoqua l'éventuelle présence de joggeur du petit matin, j'acquiesçai avec entrain en lâchant un "Bien sur !" enjoué. Cependant, avant que nous partions, elle s'écarta un peu afin de reprendre un peu de sérieux, et je devinai que cela avait quelque chose à voir avec mon intégration au Rebelle. Reprenant moi aussi un air sérieux j'écoutai ce qu'elle avait à dire. Si j'acceptais le leadership de Jilan ? Oui. J'étais un dominant, c'était sur et Jilan l'avait remarqué. Mais il avait réussi à m'imposer sa force -même si elle n'était pas purement physique-, et je savais qu'il prendrait soin de ses troupes tant que celles-ci s'atteleraient à faire ce qui était bon pour le groupe. Et cela suffisait à forcer mon respect. J'étais peut-être plus fort physiquement que lui, mais je n'étais pas sur de pouvoir le vaincre en combat singulier si il se mettait à faire exploser mes organes de l'intérieur. J'étais un lycan, pas un dieu. Et je pensais que ses ordres n'iraient pas à l'encontre de l'intérêt du groupe. Tant qu'il serait loyal à ses engagements en tant que chef, je lui serai loyal. Quant au fait que les gens ne soupçonnent pas le statut de Jilan, je pouvais comprendre. Plus de gens étaient au courant pour lui, et plus ce dernier était en danger. L'anonymat, même au sein d'un groupe, pouvait être bénéfique. Qu'il soit criminel ou pas, si on connaissait l'identité du chef du groupe, il était quasi-certain que ce dernier se verrait visé. Ce qui nous ramenait, à Leann et moi -à la supposition que nous étions les seuls du groupe à savoir pour Jilan et être plus ou moins en contact direct avec lui-, la tâche de choisir les nouveaux futurs membres. Ce qui me convenait parfaitement car grâce à mes capacités, j'étais sans doute le plus à même à tester le niveau de confiance que l'on pourrait accorder à quelqu'un. Hochant la tête lorsque Leann eut terminé, je lui répondis dans la seconde qui suivit, avec sincérité et sérieux.
-J'ai accepté Jilan en tant que mon chef, ce qui implique que je m'engage à suivre ses ordres quels qu'ils soient. Tant qu'il ne trahit pas notre cause, et je doute que ce jour arrivera, il n'y aucune raison pour que je ne lui sois pas loyal. Et je comprends son désir d'anonymat, c'est judicieux de sa part de ne pas révéler son statut, même aux gens qui l'entourent, et je m'engage à respecter cet anonymat. Par ailleurs, je pense que je suis bien placé pour évaluer les futurs membres, et ce serait un plaisir pour moi de le faire. Je ne tiens pas à accueillir des traîtres parmi nous, tout comme j'ai l'intention de rallier à notre groupe ceux qui le sont à notre cause. Les loups prospèrent parce qu'ils opèrent en meute : plus la meute est grande, plus elle est forte. Et plus elle est forte, plus elle peut abattre de gros gibiers, terminai-je avec un clin d'oeil.
Cela restait une logique de loup, mais elle s'accordait bien avec la situation et c'était tout à fait ce que je pensais et que je ressentais. Leann pourrait sentir ma sincérité, j'en étais sur. Quelque secondes se perdirent dans le vent. Mais tant de sérieux et tant d'événements depuis ce matin avaient creusé mon ventre et, à présent vide, il gargouilla bruyamment pour me rappeler à l'ordre. Posant une main sur mon ventre, je souris d'excuse face à cette manifestation peu congrue à la situation.
-Eh bien je pense que mon estomac a parlé, rigolais-je plaisamment.
Toujours plus fort que soi ? Bran avant cruellement raison sur ce point et ne pas s’en rendre compte pouvait signifier la mort. Quoi qu’on en dise. Seuls les fous pouvaient se permettre d’occulter ce genre de choses. Ne jamais se reposer sur ses acquis, toujours essayer d’aller plus loin, de repousser ses limites physiques... Voila ce qu’elle devrait faire. Pour être plus forte. Toujours plus forte. Et survivre. Parce que même si elle avait le désir de protéger Jilan et Bran, c’était bel et bien son propre désir de survie qui avait parlé pour qu’elle se prenne en main. Dire qu’il lui avait fallut un autre drame dans sa vie pour parvenir à ce résultat. Elle pouvait surement remercier Danaliel de l’avoir abandonné... Une chose était sûre, les paroles de son ami étaient très bien accueillit. Qu’on la reconnaisse comme combattante était une bonne chose pour la louve. Surtout que ça ne venait pas de n’importe qui. Bran avait plus d’expérience qu’elle et elle supposait donc naturellement qu’il savait de quoi il parlait. Mais même en lui disant ça, elle continuera de s’entrainer seule et surtout en sa compagnie. Pour progresser, il fallait souvent une tierce personne et pour elle, il s’agissait de son ami et frère de meute. Et puis, c’était tellement agréable d’être en sa compagnie ! Sans que ce ne soit par attirance sexuelle ou amoureuse. C’en était presque reposant. Elle n’avait pas à se poser des questions sur son comportement envers lui, sur le fait de s’attacher et d’un amour à sens unique. Non. Parce que Leann savait qu’elle n’était pas la seule à ressentir ce genre de chose. Peut-être pas dans les mêmes termes que le jeune lycan, mais cela ne devait pas être loin. Ils étaient devenus assez proches pour qu’elle ressente presque ses émotions. Comme s’ils étaient réellement liés par quelque chose. Bien sûr, c’était surement à double tranchant mais elle s’en fichait. Elle faisait entièrement confiance à Bran. Dans le cas contraire, elle n’aurait pas accepté qu’il approche son amant. Son sourire qui s’était communiqué à son ami montrait bien combien ils pouvaient être proches. Et la prise du jeune loup lui valut une rapide lèche sur sa joue. Quoi ? Ils étaient tous deux des bêtes au fond, et le tactile avait une grande place entre eux. Alors pourquoi se priver de ce genre d’envie ? Leann pu sentir l’excitation monter chez lui, comme un doux goût qi venait se placer sur sa langue, qu’elle aurait pu réellement goûter si elle avait de nouveau passé sa langue sur la peau de Bran. Et comme pour faire échos à ce désir, la propre bête de la jeune femme se mit à faire les cent pas à l’intérieur de son corps -métaphysiquement parlant, bien entendu-. C’était tellement grisant de sentir que leur loup respectif pouvait être connecté à l’autre. Grisant et probablement très dangereux aussi. S’il arrivait quelque chose à l’un, il ne faisait aucun doute que l’autre en pâtirait. Mais pour le moment, une conversation dès plus sérieuse avait lieu entre eux. Et l’attention de la jeune femme était toute tournée vers son ami. Savoir qu’il acceptait Jilan comme supérieur lui plu, réellement. Elle n’aurait eu aucune envie de les voir s’affronter de nouveau pour savoir lequel méritait le rang de dominant. Parce que si une telle chose aurait dû arriver, elle se serait probablement interposée et montré les crocs à son tour. Mais Bran était assez sain d’esprit pour accepter. Elle fut quand même surprise sans pour autant que ça se voit sur son visage, c’était juste une petite pensée, qu’il ne prenne pas mal l’anonymat de leur supérieur. Après tout, cela signifiait que seuls eux allaient courir un danger face au Cercle. Puisque Jilan, lui, serait protégé derrière son masque d’innocence. Leann l’avait naturellement accepté, pensant d’abord à la sécurité de l’homme dont elle tombait amoureuse de jour en jour un peu plus qu’à la sienne. Mais que Bran pense la même chose... C’était vraiment un miracle. A croire que tout avait déjà été décidé et que les deux loups étaient fais pour se rencontrer pour que ça se passe ainsi... Un large sourire se dessina sur la fin de ses propos. Ils étaient vraiment sur la même longueur d’onde. Ca faisait étonnement plaisir !
« Je suis réellement heureuse de t’avoir volé ta proie ce jour là, quand on voit ce que ça donne aujourd’hui ! » Elle déposa un rapide baisé sur la joue de son ami et lui souffla un « Merci » dans un murmure.
Oui, elle le remerciait de cette logique et même un peu d’être ce qu’il était. Parce qu’elle ne pouvait pas croire qu’elle aurait pu trouver un frère de meute et surtout un ami comme lui partout. Alors qu’elle se perdait lentement dans ses pensées, le son qui produisit le ventre de Bran la fit éclater de rire. Ca, c’était un rappel à l’ordre en bonne et due forme ! Elle garda son sourire et hocha la tête.
« Oui ! Allons-nous amuser ! Mais avant... »
Leann retira la chemise de son amant. Elle n’avait pas la moindre envie de la voir réduite en morceau à cause de sa transformation. Elle la plia donc soigneusement et la plaça dans le creux d’un arbre. Et comme elle ne savait pas jusqu’où allait les mener leur chasse, elle frotta son bras sur l’écorce de l’arbre, pour y marquer son odeur. Elle pensait pouvoir retrouver le parfum de Jilan dans cette forêt mais si elle avait du sang plein les narines... C’était peut-être autre chose. Alors elle voulait mettre toutes les chances de son côté pour retrouver ce malheureux bout de tissus. Bran devait être en train de se dire qu’elle était ridicule d’agir de la sorte mais ça ne la dérangeait pas, puisqu’il devait avoir conscience de son affection pour leur chef respectif. Une fois tout cela fait, elle se tourna vers son ami et commença aussitôt sa transformation.
« J’ai envie de me lâcher ~ » Lança-t-elle alors que son corps prenait lentement la forme de sa louve intérieure.
Elle n’attendit pas de voir si Bran avait terminé -ce qui était très probablement le cas- pour partir en courant entre les arbres. Elle se donnait à cœur joie de courir à toute vitesse, évitant les branches au dernier moment. Mais surtout, l’un de ses principaux sens était à l’affut : son odeur. Il pistait l’odeur d’humain. S’il y en avait un dans le périmètre, elle le trouverait. Jappant de plaisir, la louve pu voir que son ami était en train de courir à ses côtés. Ils étaient peut-être imposants -Bran davantage qu’elle- mais ils ne faisaient aucun bruit. Les branches sur le sol n’avaient pas le temps de craquer sous leur poids qu’ils étaient déjà passés. Au bout de plusieurs dizaines de minutes, de kilomètres parcourut, l’essence tant chercher lui parvient. Sans avoir besoin de vérifier, elle savait que le loup à ses côtés l’avait également senti. Il ne leur restait plus qu’à s’amuser ! Et comme de vrais loups qu’ils étaient : ils allaient l’encercler. Mais ils lui laisseraient le temps de courir, prenant même la vitesse cruellement lente d’Homme pour faire durer le plaisir de la chasse...
Pendant un instant elle sembla méditer la justesse de ce que je venais de dire -"Il y aura toujours plus fort que soi"- et cela me fit plaisir. Non pas que je doutais qu'elle le savait, mais au moins maintenant je savais qu'elle ne se reposerait jamais sur ces acquis et chercherait à de venir toujours plus forte. Comme je le faisais moi-même. Je m'entraînais tous les jours pratiquement, que ce soit seul, avec Leann, ou une bande d'humains qui se décidaient parfois à se mesurer à moi. Dans le cadre du sport, je m'arrangeais pour ne pas leur briser des membres. Mais certains étaient bon et se débrouillaient bien dans l'art du combat, et même si ils leur manquaient la vitesse et la puissance de mon espèce, ils le compensaient parfois en agissant à plusieurs. Cependant, rien ne valait un bon entraînement avec la louve qui se tenait à mes côtés au moment présent. Elle s'améliorait au fil des entraînements et elle en était même venu à être un entraînement pour moi aussi. Lorsque je la pris par les épaules, elle déposa une lèche sur mon visage comme elle avait l'habitude de faire. Cela pouvait sembler étrange d'un point de vue extérieur, cependant cet acte ne me dérangeait nullement et en tant que loup il me paraissait même anodin. Et je pouvais sentir mon excitation pour la chasse à venir se répercuter sur l'humeur de la louve à mes côtés.
Lorsque je parlai à Leann de ce que je pensais de la situation, elle semblait tout aussi étonnée qu'heureuse de voir que je partageais son point de vue. Il était vrai que je n'avais pas l'habitude de recevoir des ordres, et que je n'aimais pas particulièrement cela non plus, mais Jilan était le chef et je respectais cela. De plus, prendre le commandement des Rebelles alors que je ne m'étais jamais vraiment impliqué dans cette guerre ni chercher à savoir ce que les deux partis faisaient exactement n'était pas une excellente idée. Et je ne comptais pas non plus en devenir le chef dans l'avenir. Mais si Jilan venait à mourir, ou disparaître, qui prendrait le relais ? Leann ? Quelqu'un d'autre ? Et serais-je prêt à suivre ses ordres calmement si jamais cela arrivait ? Peut-être pour Leann car je lui faisais confiance même si j'étais plus dominant qu'elle. Cependant si c'était quelqu'un d'autre...Qui sait. Et elle sembla encore plus surprise que je respecte le désir d'anonymat de notre petit chef étrange, de la même manière que j'acceptais d'assister ma soeur de meute lors des recrutements de futurs membres. Cela nous placerait, elle et moi, en première ligne face aux dangers qui feraient surface. Mais comme je l'avais dit plus tôt, j'étais plus que capable de me défendre par moi-même, sans compter que j'obtiendrai l'aide de Leann en cas de problème et vice-versa. Peut-être qu'à l'avenir, elle et moi formerions un duo dans des combats à venir. Ce qui m'enjouait presque autant que la chasse à venir.
En déposant un baiser sur ma joue, elle me remercia pour avoir...voler ma proie le jour de notre rencontre ? A ces mots, je ne pus m'empêcher d'éclater de rire et de lui offrir un large sourire suivi d'un rapide baiser sur la joue aussi. Et ce fut à son tour d'éclater de rire lorsque mon ventre se manifesta bruyamment pour nous rappeler à l'ordre. Nous avions assez retardé le moment de la chasse. Mon loup s'agitait et était impatient de sortir pour pouvoir s'amuser et profiter des moments à venir. Mais avant que nous partions accomplir ce pour quoi nous étions venus initialement ici, la lycanthrope aux cheveux violets enleva la chemise de son amant, la pliant soigneusement avant de la déposer entre les branches d'un arbre et de frotter son bras à l'écorce pour le marquer de son odeur afin de le retrouver. Je doutais qu'elle aurait vraiment eu besoin d'accomplir ce dernier geste pour retrouver la chemise, cependant je trouvai ça attendrissant. Un sourire tendre s'épanouit sur mes lèvres alors que celle-ci terminait d'accomplir les derniers gestes et d'entamer sa transformation. J'étais content pour elle, des sentiments qu'elle éprouvait, et espérait que notre leader saurait la rendre heureuse comme elle le méritait. Puis, alors que les paroles de la louve en plein Changement me parvinrent, je me transformai à mon tour pour revêtir la forme du loup blanc qui tapissait l'intérieur de mon être. J'attendis que ma compagne finisse, mais celle-ci ne fit pas l'effort de l'inverse -sachant surement que j'aurais déjà fini ma transformation- et s'élança dans les bois à toute vitesse. A mon tour, je m'élançai tel un éclair blanc dans la forêt savourant la sensation de pouvoir courir en toute liberté aux côtés de celle que nous considérions comme notre soeur de meute. Mes pattes touchaient à peine le sol qu'elles n'y étaient déjà plus, ayant presque l'impression de survoler les terres qui défilaient sous nos pattes. Elles heurtaient le sol sans faire le moindre bruit, comme deux brises se faufilant à travers les feuilles des arbres. En tant que humain, mes sens étaient déjà sacrément développés, mais en tant que loup ceux-ci étaient tels que le monde revêtait une autre forme autour de moi. Une nappe de senteurs, complétée par un tableau de sonorités qui venaient se superposer à la simple vue du loup. Je plaignais ceux qui ne pouvaient pas faire l'expérience d'un tel maelström de sensations et d'informations, une telle harmonie avec la nature, une telle plénitude des sens.
Au bout de quelques kilomètres parcourus en gambadant de la sorte, je perçus enfin l'effluve que nous cherchions : un parfum d'humanité se perdant dans la sauvagerie de la nature. Une seconde plus tard, Leann aussi l'avait senti et sans plus tarder, jappant de plaisir, je me dirigeai vers la source de l'odeur. Lorsque nous nous rapprochâmes de l'homme -il avait environ la trentaine-, nous ralentîmes afin de mieux appréhender la chasse. Comme l'avait supposé la louve avant notre départ, c'était un randonneur et il semblait être venu s'aventurer seul dans les bois de si bon matin. Il portait des chaussures autant fait pour la course que pour la randonnée, ce qui n'était pas plus mal, et un gros sac d'où je pouvais flairer l'odeur de nourriture, avec une bouteille d'eau sur le côté du sac. Classique. Je fis signe à Leann que je prenais le côté gauche, et me faufilant sur le flanc du randonneur, je m'arrangeai pour rester silencieux et invisible aux yeux de notre futur victime. Ses chaussures faisaient dix fois plus de bruit que nos coussinets sur le sol et il était aisé de le repérer même grâce à notre ouïe fine. Puis, volontairement, je fis craquer une branche au milieu des feuillages. Le randonneur surprit se retourna dans ma direction mais ne vit rien. Les battements de son coeur commencèrent à s'affoler. L'odeur de la peur vint doucement se mélangeait à celle de la sieur de l'homme. Un autre craquement. Et encore un. Puis un autre à nouveau. Notre victime ne savait plus où donner de la tête et sa peur emplissait à présent l'espace qui me séparait de lui. Une odeur exquise et alléchante qui excitait mes instincts. Et alors, d'un coup, le randonneur lâcha son sac et détala à travers les branches de la forêt. La chasse était lancée. A mon tour, je m'élançai et le rattrapai avant d'apparaître devant lui pour lui bloquer le passage, le fixant de mes yeux or les babines retroussées sur mes crocs. Il dérapa et tomba au sol avant de vouloir reprendre sa course. Mais il était déjà trop tard. Nous l'encerclions. Il ne pouvait aller nul part. Il tenta de s'enfuir à plusieurs reprises, mais Dieu qu'il était lent ! Pendant quelques instants, nous tournâmes autour de lui, nous délectant de son effroi et de sa panique. Puis, lorsque sa peur se transforma en résignation, lorsque ses battements de coeur commencèrent doucement à ralentir, ne pouvant augmenter d'avantage, c'est à ce moment là que je sautai à sa gorge dans un profond grondement bestial...
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par Invité Dim 27 Avr - 18:54
