Qui es-tu ?
Anya est une jeune femme très froide aux premiers abords. De nature réservée, certains la pensent timide, à tort. Elle s'expose simplement très peu et n'aime pas parler d'elle. La jeune femme vit mal son pouvoir et évite un maximum la proximité avec autrui, se protégeant un maximum des autres. Elle ne tolère aucun contact et cela peut la rendre facilement antipathique.
D'autres disent d'elle qu'elle est prétentieuse, condescendante par son comportement distant et son ton souvent vide d'émotion. C'est là encore une des barrières naturelles qu'elle a érigé pour se protéger. Anya a un tempérament calculateur, manipulateur et réfléchi qu'elle a poussé à son apogée. Elle s'est murée dans une tour et est concentrée pour réaliser son souhait le plus cher : faire cesser la guerre.
Pourtant au fond Anya est une femme beaucoup trop sensible et fragile, traumatisée par des expériences qui la hantent encore. Si ces dernières l'ont endurcie à un point extrême, parfois la demoiselle peut révéler une nature douce et aimante. Dévouée aux autres, elle agit souvent dans l'ombre ou de manière indirecte, n'aimant guère être mise sous les projecteurs.
Pourtant de part la richesse de sa famille et le prestige de son père, elle assume aussi un rôle qu'elle haït et qui accentue d'autant plus la vision de froideur que peuvent avoir les gens d'elle. La demoiselle doit toujours veiller à son image et n'a donc pas le droit aux débordements émotionnels ou aux écarts de conduite. De plus, beaucoup disent que si elle se dévoue ou aide autrui, ce n'est que pour se donner bonne conscience.
Pourquoi es-tu ainsi ?
Maman... Ho maman, que dois-je faire ? Dis moi ce que je dois faire... Je te sens me quitter. Tout ce sang répandu me dégoûte, son odeur me donne la nausée et son contact poisseux m'horrifie... Alors pour contrer le sort, je te sers un peu plus fort contre moi avec le fol espoir que le flot cesse. Nos sentiments se mêle en moi et ne font qu'accentuer ma peur et mon propre tourment. Alors, doucement tu me tires à toi dans ton monde, si loin de cette scène que jamais je ne pourrais oublier... A moins que ce ne fut moi qui me laissa couler dans tes souvenirs.
Je me revis en bébé, tenue dans tes bras, la joie nimbant tes joues de larmes alors que je hurlais désespérément ma douleur de venir dans ce monde froid avant d'être calmé par tes propres émotions. Déjà à cet époque, nous partagions quelque chose d'unique que j'ai finis par détester. Pourtant ici, avec toi, je me sens doucement envahi par ton calme, ton bonheur. Tu savoures ce souvenir et je ne peux qu'en faire de même, laissant le monde réel derrière nous le temps de ce voyage.
Le chaud de la scène bascule sur un souvenir plus vieux, celui d'un homme et je ressens ton amour démesuré pour lui, votre passion. J'ai l'impression d'entrer dans une tornade de feu, les souvenirs s'enchainant sur votre histoire, sur ce que vous avez vécu. Tant de choses violentes... Est-ce ça l'amour ? Un tsunami d'ardeur, de plaisir, de promesses ? C'est enivrant. Mais peu à peu, ce soleil radieux laisse poindre une ombre grandissante. La passion anime l'homme et pas seulement pour toi. Il vibre aussi d'une haine que tu lui découvre : Celle des vampires. Sa découverte de cette race laisse poindre en lui une violence que tu ne lui connaissais pas. Il parle de parasites, d'éradication... Je sens ta douleur face à ses mots, ses mots qui te touchent personnellement et qui fait que finalement tu l'as fui un jour en apprenant que j'étais en toi. Ton chagrin est si grand... Tu l'as laissé de peur qu'il ne te rejette... qu'il nous rejette... Ho maman... Ça a été si dur...
Soudain un flash me surprend. Ce même homme te fixe alors que la stupeur te fige comme un lièvre devant des phares. Le temps a passé depuis ton départ et vos retrouvailles, pourtant tu sais que c'est lui et il sait que c'est toi. Puis survient les coups.
Douleur.Nous avons envie de crier, de lui hurler stop mais rien ne sort devant son regard. Notre coeur se brise. Ce que nous redoutions est là. Il nous hait et alors que nous tombons au sol il nous regarde comme si nous n'étions rien, rien de plus qu'un déchet. Alors, nous comprenons que l'heure est venue. Son parti est en marche pour le grand massacre. Les vampires de Russie vont être traqué et massacré pour le simple fait d'exister et d'être différent. Nous fermons les yeux et prions pour que notre fille soit loin, loin de tout ça. Qu'elle échappe à cette folie même si son humanité la protègera peut être de leur violence... Mais non maman, je suis là et nous affronterons la chute ensemble. Alors oublie-le et sens tout l'amour que j'ai pour toi.
Je t'ai retrouvé ma tendre maman et je te tiens. Nos sangs se mêlent, nos esprits aussi. Tu sais maman, je ne te remercierais jamais assez d'avoir été là pour moi. Je me fiche de ce que tu es. Vampire, Humain, monstre ou ange, peu m'importe. Tu es celle qui a veillé sur moi alors que j'avançais dans ce monde hostile. Tu étais celle qui emplissait les vides de ton rire et séchait mes larmes quand je me détestais. Je t'aime ma tendre maman.
Mes yeux s'ouvrent et je me rends compte que je suis accrochée à un corps froid. Je gémis, mes larmes roulent sur mes joues. La douleur ne me quitte pas mais je sais que bientôt, bientôt elle s'en ira et que je te retrouverais. Je n'ai pas peur, au contraire, je souhaite que la mort m'emporte vite. Ce monde est trop horrible pour mériter que je m'y attarde. Je ferme les yeux et murmure à celle étendue près de moi que j'arrive.
Des pas s'approchent alors mais je n'ai pas envie de voir ce qui arrive. A quoi bon ? Est-ce encore un de ces hommes qui vient tuer ce qu'ils redoutent ? Ces hommes qui m'ont frappée à mort parce que ma mère est une vampire ? Qui d'elle ou d'eux est le vrai monstre ? Une femme obligée de se nourrir de sang pour vivre ou des humains qui tuent par peur. L'ombre s'arrête près de moi. Je la sens qui me regarde.
Va-t'en.
Le temps s'égraine lourdement dans l'air froid. Il est encore là. Je respire difficilement. Ma poitrine me lance. J'ouvre les yeux et le regarde. Il est là, devant moi. Il me scrute. Je le vois réfléchir, chercher. Alors, comme pour le frapper à mon tour je lui lance.
"T'es le pire père et le pire époux qu'ait porté ce monde..."Le vent emporte mes paroles que j'ai jeté avec toute la rage que je pouvais. Je referme les yeux alors que l'ombre se penche sur moi. Ne me touche pas... Je ne veux rien de toi, tu m'as tout pris. Maman... Même ça, tu ne me le laisses pas. Tu me soulèves, m'arrache à elle. Nos peaux se rencontrent et tes regrets m'envahissent. Ton chagrin aussi. J'aimerais fermer la porte, ne pas ressentir tout cela. Ma haine, ma douleur, mon chagrin ne devraient être qu'à moi et à moi seule. Pourtant je n'ai jamais eu cette chance. Je ressens tes remords. Tu n'as jamais su pour moi, n'est-ce pas ? Quant tu as su pour maman, ce qu'elle était, tu as dû te sentir trahi et tu as voulu la tuer. Tuer par amour, tuer par vengeance, tuer par passion... Je n'en suis même pas sûre...
Mais aujourd'hui tu me découvre et tu comprends peut être pourquoi elle a agit ainsi. Pour nous protéger justement de toi, de ta violence, de ta haine de sa nature qu'elle n'aurait jamais pu changé... Tant de regrets et de souffrance.
Comment peut-on haïr une personne dont on ressent la culpabilité, la douleur et le chagrin ? Tu me voles ma haine, tu me voles mon droit de ressentir ce que je devrais ressentir contre toi !
Je tente de me débattre mais tu me serres contre toi et sans un mot tu m'emportes. Mais tu ne m'auras pas. La mort sera la plus forte, quoi que tu fasses. Je la sens qui déjà me saisit peu à peu. La douleur s'estompe, mon esprit se détache puis enfin doucement je me sens glisser dans une douce torpeur. J'arrive, maman, j'arrive.
Mes yeux s'ouvrent et scrutent le plafond que je connais si bien. Cette grande maison qui ne m'appartient pas et où tout croule sous les richesses et les plaisirs. Parfois je regrette la simplicité de l'appartement de mon enfance... Maman me manque et quasiment toutes les nuits, je revis sa perte et ma mort. Parfois je revis aussi mon réveil, dans l'église où je suis sortie du cercueil dans un halo de lumière, des ailes blanches dans le dos, me retrouvant face à mon père, une nouvelle fois.
J'ai encore tant de rancœur, de haine, de colère mais je ne peux pas non plus nier ce que j'ai ressenti de lui quand il m'a enlacé sans un mot. J'aimerais le maudire et le blesser mais je ne le peux. Quand tu ressens ce qu'éprouve les autres, tu ne peux plus ignorer le poids des mots et des actes. Alors je garde ma douleur pour moi et je lui laisse la sienne.
Mon père m'a fait quitter la Russie, m'a amené ici à l'Avventura et désormais je peux enfin connaitre une vie où parfois, je n'ai pas à partager qui je suis. Je peux être moi, cachée dans mon corps et ne plus éprouver ce qu'éprouve les autres. Je le vis comme une bénédiction et c'est ce qui m'a poussé à rejoindre le Cercle, à proposer mon aide même si cela m'oblige à retrouver mon pouvoir. Je leur dois bien cela. Tout simplement. Aussi il m'arrive de ne plus avoir le sérum afin de répondre aux requêtes du Cercle, sinon je passe la majorité de mon temps avec, comme une citoyenne normale et cela me convient très bien.
Pour mon père, rien n'est pardonné, rien n'est oublié. Je partage peut être sa vie mais nos relations sont distantes. Il cherche à se faire pardonner et aide le Cercle, je crois. Il m'a aussi offert une librairie. Maman l'aurait aimé et je crois que c'est ce qui l'a poussé à m'en faire cadeau. Cela m'agace mais malgré tout, j'y travaille désormais quand je ne suis pas au service du Cercle.