| par Invité Dim 5 Mai - 21:16
| Les apparences sont trompeuses, lui dit-elle, et la lightness hocha la tête d’un air pensif. Parfois les apparences reflétaient une part de vérité, comme pour elle, Nephtys, dont le physique délicat rendait bien compte de sa naïveté. Pourtant, plus que les apparences encore, elle pensait que c’était les préjugés qui étaient trompeurs, les idées que chacun se faisait sur telle ou telle race, telle ou telle personne, et qui entravaient régulièrement toute sorte de rencontres. Il fallait trouver le juste milieu ; juste assez méfiant, pas trop candide. La lightness apprécia de ne sentir aucun jugement dans les paroles de son interlocutrice.
Alors, Nephtys raconta en quelques mots un peu flous ses mésaventures, gênée de se trouver encore si perturbée par un changement que d’autres semblaient vivre si naturellement. Elle n’avait pas l’habitude de se confier, aussi leva-t-elle un regard un peu inquiet vers Amarra qui resta silencieuse, sans manifester quoi que ce soit. Embarrassée par sa déclaration et le silence qui s’en suivit, elle relança la conversation en questionnant la jeune femme sur sa vie dans cette ville. Elle lui raconta à son tour un peu de son histoire, sa peine d’avoir perdu celui qu’elle aimait, évitant son regard et jouant avec son verre.
« Oui, cette ville est tout à fait particulière… »Murmura-t-elle, « C’est un univers à part entière. »
Puis ce fut au tour de Nephtys de garder le silence. La jeune femme lui conta alors son histoire et la lightness n’osa pas intervenir, ayant peur d’interrompre ses confidences, de briser ce moment où deux inconnues venaient à chercher un peu de réconfort, de reconnaissance, de compréhension et de réponses peut-être, dans l’antre poisseux de ce bar miteux.
Elle était louve, et Nephtys comprit d’où venait le charme sauvage de son amie. Amarra vibrait d’une sensualité animale, puisant certainement cette beauté dans la nature de sa race. Ses paroles faisaient intimement échos, au plus profond d’elle, à ce que la lightness avait vécu ou vivait encore. Leur nature avait beau être profondément différente, elles restaient toutes deux la conséquence d’un changement puissant et obscur, qui apportait son lot de doutes et de mystères. Ses yeux clairs ancrés sur le visage d’Amarra ne se détachèrent qu’un instant pour suivre la main de la louve qui étreignait quelque chose sous son pull, s’y accrochant avec force, comme si elle voulait maintenir ce cœur qu’elle nommait monstre.
Elle ne comprenait pas tout, ni ce qu’était sa malédiction, ni ce qui se cachait si près de son cœur. Mais son pouvoir lui laissait ressentir sa peur, son attachement à la vie, malgré les nombreuses épreuves qu’elle semblait avoir vécues. Alors, Nephtys voulut lui prendre la main, se rappela de la douleur que pouvait provoquer son contact, et se ravisa, effleurant seulement la manche de son pull avant de poser sa main près de son amie, sans la toucher. Sans qu’elle s’en rendît compte, sans qu’elle ne se contrôle, son esprit se tendit vers celui d’Amarra, amical et apaisant, établissant ce contact que leurs corps interdisaient, pour adoucir ses pensées. Son regard planté dans le sien, la lightness esquissa un fin sourire.
« Je te dirais bien que tu n’es pas un monstre, mais tout dépend de ta définition de monstruosité. »
Elle écarta les bras comme pour embrasser le bar d’une étreinte.
« Je crois que nous sommes tous ici des monstres, des créatures étranges, issus de contes et légendes oubliés. Peux-tu croire que j’ai réellement des ailes ? Moi-même j’ai encore du mal à l’assimiler… »
Nephtys émit un petit rire désabusé. Ses deux appendices noirs et couverts de plumes lui étaient bien inutiles puisqu’elle ne savait pas comment faire pour voler.
« Mais ce soir, tu m’as sauvée d’une rencontre désagréable, prenant le risque de me toucher et d’en souffrir. En cela, tu ne peux pas être qualifiée de monstrueuse, au contraire, tu m’as été d’une grande aide. »
Elle s’interrompit lorsqu’on déposa leurs nouvelles boissons et prit le temps de boire une grande gorgée avant de reprendre la parole, sur un ton de plaisanterie.
« Après tout, tu es le preux chevalier de ma soirée, pas le sorcier démoniaque ! Et en cela, je te suis très reconnaissante. J'espère pouvoir un jour te rendre la pareille.»
Peu de chance que ça arrive n'est-ce pas ? Mais ce n'était pas là une histoire d'honneur ou de dette. Nephtys appréciait de plus en plus cette belle jeune femme qui semblaient plus intéressante et mystérieuse de minute en minute.
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